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Après les intempéries hivernales

Des pertes conséquentes dans les cultures

L'heure est au ressemis en Côte d'Or. Sur les plateaux châtillonnais, 40 à 50% des terres sont concernées. L'Auxois ne semble pas mieux loti. Une chose est sûre : la facture est salée pour les agriculteurs.
Par Aurélien Genest
Des pertes conséquentes dans les cultures
Plus de 43% des terres de Bernard Louet, dans le canton de Venarey, sont à re-semer. Côut de l'opération : près de 20 000€, auxquels il faut ajouter la baisse de potentiel liée aux cultures de printemps.
Il y a de la casse dans les cultures. Ce n'est pas Bernard Louet, céréalier à Source-Seine, dans le canton de Venarey-les-Laumes, qui dira le contraire. Sur ses 290 hectares de cultures, 126 sont à ressemer, soit plus de 43% de ses terres. Cette proportion illustre bien la situation sur les plateaux du Châtillonnais. Damien Ronget, technicien grandes cultures à la Chambre d'agriculture de Côte d'Or, signale que 40 à 50% des terres sont [I]«à retourner»[i] dans ce secteur. [I]«Dans l'attente de connaître tous les chiffres de l'Auxois, le Châtillonnais est la région la plus touchée du département. Environ 80% des esterels et escourgeons sont à retourner, tout comme 20 à 25% des blés»[i] signale Damien Ronget. [I]«Sur l'ensemble du département, la moutarde est gelée à plus de 90 % et le pois d'hiver à 98%. Oui, le climat a de grandes irrégularités depuis cinq ans et nous en faisons les frais de manière récurrente»[i] poursuit le technicien.

[INTER]100% sur trois cultures[inter]
Bernard Louet avait espéré que ses cultures [I]«repartent»[i], mais au lieu de s'améliorer, [I]«elles ont empiré de jour en jour»[i].
Seuls ses 80 hectares de colza sont [I]«à priori»[i] épargnés. [I]«Les dégâts concernent 100% de l'orge d'hiver, soit 30 hectares, 100% des pois d'hiver, soit 25 hectares et 100% du lin, qui représente une surface de 21 hectares. Le blé est touché à moitié, donc 50 hectares sont à resemer»[i] chiffre l'agriculteur, qui se serait bien passé de ce nouvel épisode climatique. [I]«Il manque plus qu'un coup de sec derrière et c'est la totale»[i] ajoute t-il en se rappelant : [I]«ici, les températures sont descendues à -20°C. Le vent a accentué le gel. Contrairement à 2003, il y a pas eu de neige, ça n'a pas été favorable non plus. Toutes les parcelles exposées au vent ont été beaucoup plus touchées que les autres». «Les variétés, les dates de semis ont également une influence. Pour ma part, je sème un peu précocement car je suis en semis direct sous couvert. Ceux qui ont semé tard cette année s'en sortent peut-être un peu mieux»[i] ajoute Bernard Louet.

[INTER]Blé de printemps : une «expérience»[inter]
Bernard Louet a commencé de resemer la semaine dernière. Lundi soir, il avait terminé ses orges et son lin de printemps. Pour être en accord avec la MAE rotationnelle, du tournesol sera implanté sur des parcelles d'orge d'hiver avec précédent orge de printemps.
[I]«Je n'ai pas le droit de remettre de l'orge de printemps, alors il faut s'adapter. Du tournesol, ça fait quinze ans que j'avais arrêté. Concernant l'orge d'hiver, j'ai tout de même gardé une parcelle de 2 hectares, d'une part pour avoir des semences d'esterel, d'autre part pour voir ce que ça donnera»[i] confie Bernard Louet qui, en début de semaine, attendait de recevoir ses semences de blé de printemps : [I]«ce sera une première pour moi et pour d'autres agriculteurs. On ne sait pas du tout ce que cette culture donnera. Ce sera une expérience»[i].

[INTER]Quelles pertes?[inter]
Sans compter le travail supplémentaire, ces dégâts occasionnent des coûts supplémentaires et non des moindres. [I]«Il faut compter le semoir, le coût des semences... Tout compris, dans mon système, ça me coûte environ 150 euros par hectare»[i] signale Bernard Louet. Sachant que 126 hectares vont être ressemés, la [I]«facture»[i] s'élève donc à 18 900 euros.
La baisse de potentiel impliquée par les cultures de printemps inquiète encore plus Bernard Louet : [I]«le potentiel en a déjà pris un coup ! On fait des cultures d'hiver car on craint le sec. Il y a encore beaucoup d'interrogations quant aux résultats du printemps. La baisse de potentiel pourrait dépasser la vingtaine d'hectares en orge tout comme en blé»[i].

Ce que défend la FDSEA

Jacques de Loisy, président de la commission «Productions végétales» de la FDSEA, indique que la profession «attend des mesures et des assouplissements à hauteur de la situation, de la part de l'à‰tat». «En 2003, moins de 5 000 hectares avait été resemés. Là, on est parti pour dépasser largement 30 000 hectares, c'est du jamais vu depuis 1956» mentionne Jacques de Loisy, qui poursuit : «nous n'avons plus droit aux calamités. Certes, certains peuvent accéder à des mesures assurantielles couvrant éventuellement le re-semis, mais quoiqu'il en soit, le chiffre d'affaires sera sérieusement amputé. Avec des cultures de printemps, nous allons avoir des baisses de rendements, avec des qualités incertaines. Des charges ont déjà constatées sur les cultures d'automne. La marge nette sera nulle ou négative pour des exploitations qui ont déjà souffert de la sécheresse l'été dernier». Maintien de la MAE rotationnelle '€œOutre les problèmes économiques et agronomiques, l'€™impact du gel sur les cultures a également des conséquences pour les exploitations agricoles en matière de réglementation et plus spécifiquement sur le respect du cahier des charges MAE rotationnelle (MAER). En effet, la destruction d'€™une culture d'€™hiver et le re-semis d'€™une culture de printemps peut dans un certain nombre de cas, entraîner le retour de la même culture sur la parcelle deux années successives, l'€™absence de quatre cultures dans la rotation, ou encore avoir la culture majoritaire qui dépasse 50% de la sole avec pour conséquence le non respect des engagements. Une dérogation accident de culture existe dans le cahier des charges mais elle supprime malgré tout l'€™aide (32€/ha) pour la ou les surface(s) concernée(s) par le non respect du cahier des charges. La FDSEA souhaite assouplir cette dérogation et milite pour le maintien de la totalité des paiements. En effet le non respect du cahier des charges est indépendant de la volonté des producteurs, mais lié à un accident climatique exceptionnel. Dans cette optique, nous avons remonté le dossier côte d'€™orien au niveau national, et sommes intervenus auprès de Mr le Préfet ainsi qu'€™auprès de la DDT, pour défendre notre position'€. Anticiper les besoins en paille L'€™épisode de gel et le re-semis de cultures de printemps vont aussi impacter la production de paille sur le département, qui sera inférieure aux tonnages initialement prévus, avec pour risque une tension sur le marché de la paille. Pour éviter une flambée des prix, nous invitons tous les éleveurs à anticiper leurs besoins en paille en contractualisant dès à présent leurs achats.