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Agriculture biologique

Dans le bon tempo

Le bio a le vent en poupe avec une demande et une production qui ne cessent de se développer. Pascal Guérin, président du Gab 21, aborde le sujet dans sa cour de ferme à Billy-lès-Chanceaux.
Par Aurélien Genest
Dans le bon tempo
Pascal Guérin s’est lancé dans l’agriculture biologique il y a vingt ans.
Sa conversion en agriculture biologique ne date pas d’hier : Pascal Guérin a franchi le cap il y a vingt ans, dès 1998. «Je ne trouvais plus ma place en agriculture conventionnelle», se rappelle l’exploitant aujourd’hui âgé de 54 ans, «si je prends en exemple la culture du colza, les interventions devenaient de plus en plus nombreuses mais au final, le rendement de la culture n’évoluait pas. Cela ne voulait plus rien dire». Déjà sensibilisé à l’impact des pratiques agricoles sur l’environnement, et plus particulièrement sur la présence de nitrates dans l’eau, Pascal Guérin est allé à la rencontre de plusieurs agriculteurs ayant réussi leur conversion : «il n’y en avait pas beaucoup à l’époque ! J’ai trouvé leur travail très intéressant. Je ne me destinais pas spécialement à ce type d’agriculture, mais j’ai été rapidement séduit par leurs démarches. Tout s’est très vite enchaîné pour moi après une formation suivie à la Chambre d’agriculture et une étude économique réalisée par des élèves ingénieurs de l’Enesad, aujourd’hui AgroSup Dijon».

Vingt-deux bêtes écoulées
Pascal Guérin travaille avec son épouse Sylvie au Gaec de la Seine. Le couple d’agriculteurs ne reviendrait «pour rien au monde» en arrière au vu des résultats et du fonctionnement de leur exploitation qui, en plus d’avoir opté pour l’agriculture biologique, valorise les productions par la transformation et la vente directe. Leur ferme compte 224 hectares : «pour moitié, cette surface est dédiée à l’herbe et à l’élevage avec 35 mères Limousines. Nous disposons d’un laboratoire de découpe à la ferme depuis 20 ans, nous vendons nous-mêmes notre production à l’exception de quelques vaches de réforme». Le Gaec de la Seine écoule une moyenne de 22 bêtes à l’année, soit environ un bovin tous les quinze jours. «Plusieurs types de colis sont disponibles, nous nous adaptons aux demandes. Des clients viennent chez nous, nous distribuons aussi notre viande dans plusieurs Amap et restaurants autour de Dijon», précise Pascal Guérin.

Fabrication et vente d’huiles
Le Gaec de la Seine cultive du colza, du tournesol, du blé, des lentilles, de l’engrain et de la luzerne (déshydratée à Baigneux-les-Juifs) sur l’autre partie de ses terres. Comme il est coutume en agriculture biologique, les rendements sont généralement deux fois moins importants qu’en agriculture conventionnelle, mais les prix de vente sont près de deux fois plus élevés, avec des niveaux de charges n’ayant «strictement rien à voir» avec les systèmes plus classiques. «Le rapport est parfois de un à trois, notamment pour le blé, qui dépasse difficilement 20 q/ha chez nous mais qui est vendu à 400 euros la tonne», illustre le producteur. L’exploitation de Billy-lès-Chanceaux travaille dans la même logique que ses bovins en valorisant sa production céréalière, à l’extérieur et en alimentation humaine. Un laboratoire de transformation a été rénové en novembre 2016 et permet de fabriquer de l’huile de colza et de tournesol. La production est en constante augmentation et approche désormais les 4 500 litres par an. «La grande majorité est vendue dans des magasins bio de Dijon», informe Pascal Guérin qui, par la même occasion, dispose de tourteaux produits chez lui pour engraisser ses animaux.

En plein boom

Le Groupement des agrobiologistes de Côte-d’Or (Gab21), réuni fin février à la Maison de l’agriculture, a fait le point sur les conversions de l’année écoulée. Celles-ci ont continué d’augmenter malgré les retards de paiement de l’aide à la conversion. «Nous aurions pu craindre une légère diminution dans les nouvelles arrivées, mais il n’en a rien été», se félicite Pascal Guérin, «nous sommes toujours sur la dynamique de 2015 et restons optimistes pour l’année en cours, même si les conversions ont tendance à quelque peu ralentir en viticulture». Un réel engouement est constaté chez les consommateurs, comme le souligne le président : «si je prends mon propre cas, je vendais deux fois moins de bovins il y a dix ans. L’agriculture biologique marche plutôt bien, la consommation et la production augmentent. Nous avons encore une certaine marge de manœuvre puisque la France continue encore d’importer». Pascal Guérin reste toutefois vigilant sur les soutiens de l’agriculture biologique : «ils prennent actuellement une mauvaise direction car l’aide au maintien est annoncée en diminution et est même menacée. Les efforts réalisés par les producteurs bio en matière d’environnement, de santé animale ou de tout autre sujet sensible doivent être pris en compte par notre gouvernement. Nous voulons que nos politiques s’emparent du sujet et l’aide au maintien soit remplacée par une autre reconnaissance».

Bienveillance sur les débouchés et développement de filières
L’assemblée du Gab21 a été l’occasion de rappeler différentes missions assurées par le Gab 21. Pascal Guérin cite deux exemples : «notre groupement accompagne ses adhérents et incite les agriculteurs à bien étudier les débouchés avant de produire. Nous avons beaucoup de productions de niches : il faut savoir que de petits marchés comme ceux des lentilles et de l’engrain peuvent être rapidement déstabilisés, nous veillons à ce que cela n’arrive pas. Une filière “sarrasin” est actuellement en construction dans le département. Le Gab a mis en relation une entreprise fabriquant des gâteaux sans gluten avec douze producteurs locaux. Des contrats de trois et cinq ans vont permettre de sécuriser la production au niveau du prix, de la quantité et de la qualité».