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Jeunes agriculteurs

Créer l’agriculture de demain

JA 21 tenait son assemblée générale vendredi dernier au MuséoParc d’Alésia.
Par AG
Créer l’agriculture de demain
Guillaume Moyot, secrétaire général des JA
Dans son discours d’introduction, Antoine Carré, président des Jeunes agriculteurs de Côte-d’Or, est tout d’abord revenu sur les élections à la Chambre d’agriculture. Avec près de 64 % des votes dans le collège des exploitants agricoles, la victoire de la liste FDSEA-JA-CAVB est aussi belle qu’incontestable. Toutefois, le président JA regrette que le taux de participation ne dépasse pas 44 % : «Cette tendance est constatée dans tous les départements. Il est vrai que la conjoncture agricole est compliquée depuis plusieurs années et n’aide pas forcément à la mobilisation. Mais il n’y a pas que cela. Il y a clairement une lassitude et un désintéressement des agriculteurs envers l’engagement professionnel et le syndicalisme». Antoine Carré l’a fortement ressenti durant la campagne terrain : «la communication interne à la profession n’est pas assez importante, les agriculteurs ne connaissent pas assez les rôles et les missions de chacun, ni les dossiers que porte le syndicalisme. Ces rencontres terrain méritent d’être renouvelées plus fréquemment pour inverser la tendance». Plusieurs jeunes Côte-d’oriens venaient de participer à l’université d’hiver des JA de Bourgogne Franche-Comté : ce rendez-vous était justement destiné à «repenser» le réseau syndical dans l’idée de remobiliser les troupes.

Chef d’entreprise avant tout
Les jeunes doivent avoir l’ambition de «créer l’agriculture de demain», insiste le président JA : «c’est une de nos missions de reprendre en main l’image de l’agriculture. Énergie, dynamisme, optimisme, innovations et solutions : autant de mots qui doivent caractériser les JA. Le temps d’une agriculture rétrograde est révolu. Être agriculteur aujourd’hui, c’est être chef d’entreprise, gestionnaire, avant-gardiste, entrepreneur». Pour permettre aux agriculteurs d’évoluer, de se développer et de trouver des solutions, «encore faut-il leur faire confiance», poursuit Antoine Carré : «nous sommes des personnes responsables, il serait temps de remettre en avant le modèle économique trop souvent mis à l’écart. Le syndicalisme prend toute son importance ici. Il ne s’agit pas du combat d’une personne, mais d’une multitude de combats à mener parallèlement. Il faut se détacher de cette vision binaire de l’agriculture : les bios contre les conventionnels, l’agriculture d’exportation contre la vente directe et j’en passe. Il y a de la place pour tous. Il est possible de concilier productivité, attentes environnementales et attentes sociétales».

Cap sur la com
Le président JA21 enchaîne sur l’agri-bashing : «nous assistons depuis peu à un acharnement médiatique, qui dénigre sans cesse nos pratiques. La désinformation de plus en plus fréquente devient insupportable dans nos cours de ferme et dans nos cabines de tracteurs. Nous avons décidé de reprendre la communication en main pour lutter contre cet agri-bashing qui pollue l’esprit du grand public. Nous avons besoin de moyens humains et financiers, à chacun d’agir et de communiquer sur ses propres pratiques». À la fin de son discours, Antoine Carré s’est adressé aux services de la DDT, demandant la possibilité de  récolter les jachères dès la fenaison, dans un contexte post-sécheresse particulièrement inquiétant.

À bons entendeurs

Guillaume Moyot, secrétaire général des JA n’a pas gardé sa langue dans sa poche lors de son intervention. Plusieurs messages ont été adressés aux représentants de l’État : «Le modèle français restera une valeur sûre à la condition que le gouvernement prenne les bonnes décisions. Avec le Mercosur, le soja OGM, l’huile de palme et j’en passe, il y a vraiment de quoi se poser des questions. Regarder devant est très bien, mais il faut aussi considérer les efforts déjà réalisés. Les agriculteurs prennent soin de l’environnement depuis des générations. N’oubliez pas, Messieurs les élus, quand nous nous engageons dans l’agriculture, c’est pour quarante ans, et non pour cinq ans comme lors d’une mandature présidentielle». Le secrétaire général alerte sur les enjeux majeurs du métier, à savoir la transmission et le foncier : «30 % des exploitants pourraient partir en retraite d’ici sept ans, c’est considérable. Nous devons veiller à ne pas laisser filer notre outil de travail aux mains d’investisseurs étrangers ou de promoteurs malveillants. Nous devons être constamment vigilants : la création d’un parc naturel ou d’une zone commerciale n’a pas toujours des retombées intéressantes pour notre tissu rural».

Besoin de signes forts
Guillaume Moyot insiste sur l’intérêt de s’engager pour défendre la profession : «nous sommes jeunes, c’est le moment de prendre des responsabilités. Main dans la main avec la Région et le Département, nous devons réussir à pérenniser l’agriculture sur nos territoires. Il faut dès à présent se pencher sur la prochaine Pac pour, enfin, faire reconnaître les zones intermédiaires. Beaucoup d’autres dossiers sont en jeu. La séparation de la vente et du conseil, elle, va coûter plus de 3 000 euros par exploitation, ce n’est pas du boulot ! Le prix de la viande augmente, c’est très bien, mais à qui va profiter la hausse ? Il est grand temps de mettre les pieds dans le plat, trop de monde profite de la situation. Avec leur savoir-faire et la qualité de leurs produits, les agriculteurs français sont en droit de vivre dignement de leur métier». Le secrétaire souligne l’importance d’être en phase avec les attentes sociétales : «c’est une priorité, tout comme la rentabilité de nos fermes. L’agriculture s’adapte comme elle l’a toujours fait, elle évolue avec les moyens qu’on lui donne, aussi faibles qu’ils soient par rapport à certains de nos collègues européens. Des signes forts doivent venir de nos politiques».