Élevage allaitant
Clap de fin à Méré
Ils sont de plus en plus nombreux à arrêter l’élevage, conséquence de cours toujours au plus bas. A l’image de Walter Huré et Gilles Robillard, exploitants à Méré
Bien ancré sur les hauteurs de Méré, le bâtiment domine la plaine qui se dessine au loin, entre plateaux de Bourgogne et Champagne humide. Seuls quelques meuglements échappés de la stabule perturbent la campagne endormie en cette fin d’après-midi. Un son familier, qui dans quelques mois aura disparu. Associés en polyculture élevage depuis une dizaine d’années, Walter Huré et Gilles Robillard, ont décidé d’arrêter l’atelier vaches allaitantes. Une décision lourde de signification, mais rendue indispensable par une situation économique intenable : «quand notre centre de gestion nous a rendu ses conclusions en janvier dernier, ça a été un peu la douche froide ! On ne pensait pas gagner énormément, mais de là à perdre vingt mille euro…»
Ici, dans ce petit village d’à peine 200 habitants, l’élevage ne relève pas que de la tradition familiale, rappelle Walter : «à une époque, tous les paysans avaient des animaux. En Champagne humide, peu de drainage alors les terres étaient mises en herbe et ça permettait de survivre. A Méré, tout le monde faisait du lait, ils étaient encore deux jusqu’à la fin des années 80…» Ne restera demain pour témoigner de ce passé révolu, qu’un élevage équin, installé au cœur de la commune.
Un système avec trois ateliers
A l’arrivée de Gilles, en 2007, l’exploitation comptait à peine plus d’une vingtaine de vêlages par an : «si je me suis installé, c’est grâce aux vaches. On est montés jusqu’à une quarantaine de vêlages, après avoir construit ce bâtiment, de manière à créer un véritable atelier de vaches allaitantes. A l’automne dernier, on y croyait encore et on l’a même agrandi pour y loger quelques animaux supplémentaires et continuer à faire un peu de génétique…» Avec pour seule ambition, souligne Walter : «d’avoir des vaches qui donnent du lait, ont un peu de carcasse et qui soient gentilles…» L’activité économique de l’exploitation reposait jusqu’alors sur trois ateliers : céréales, élevage allaitant, plus quelques ha de vignes. Avec un salarié, embauché pour s’occuper plus particulièrement des animaux : «ne manque aujourd’hui que l’argent pour le payer…» Un système vertueux, qui permettait de rallonger les rotations et ramener un peu de fumier sur les terres argileuses, tout en conservant des parcelles en herbe : «ici, on est en zone bassin de captage, alors partout où on peut éviter de mettre de l’engrais ou des pesticides, on le fait. On n’est pas obtus non plus, l’eau, on la boit aussi !» Mais un système aujourd’hui fragilisé : «au lieu de diversification, on est en train de personnaliser à outrance des exploitations mixtes comme la notre» Pas seulement la conséquence d’un marasme économique et d’une filière en crise, explique Walter : «c’est lié aussi à cette réglementation qui nous plombe. Trois ateliers, ça signifie trois réglementations différentes à gérer et on ne peut pas être partout…»
«T’as beau être grand et costaud…»
Leur salarié recherche déjà un autre travail et une quinzaine de vaches et autant de veaux sont déjà partis. Les animaux restants seront tous, ou dispatchés dans d’autres élevages, ou envoyés à l’abattoir et dans moins d’un an, tout sera fini. Moralement c’est dur, avoue Walter Huré : «t’as beau être grand et costaud, quand tu les fais monter dans le camion, t’as quand même un petit pincement au cœur. Et quand tu remplis les cartes vertes, tu te dis, «c’est bizarre, y’a des trucs qui tombent dessus…» Ça s’appelle des larmes, une pluie salée ! Et pourtant, on y était préparés»
Gilles Robillard se souvient de ce soir d’hiver, où il a attendu que toute la famille soit réunie autour de la table du dîner pour annoncer qu’ils allaient se séparer des animaux : «pas simple non plus à vivre, je peux même dire que cela a été un peu «costaud» !» Trois enfants, déjà tous passionnés par le métier, mais qui auront peut-être un jour un choix à faire pour leur avenir. Pour l’heure, Baptiste, du haut de ses douze ans, rouvre d’un geste assuré la barrière cornadis. Un claquement sec dont l’écho ne sera plus bientôt que souvenir…
Ici, dans ce petit village d’à peine 200 habitants, l’élevage ne relève pas que de la tradition familiale, rappelle Walter : «à une époque, tous les paysans avaient des animaux. En Champagne humide, peu de drainage alors les terres étaient mises en herbe et ça permettait de survivre. A Méré, tout le monde faisait du lait, ils étaient encore deux jusqu’à la fin des années 80…» Ne restera demain pour témoigner de ce passé révolu, qu’un élevage équin, installé au cœur de la commune.
Un système avec trois ateliers
A l’arrivée de Gilles, en 2007, l’exploitation comptait à peine plus d’une vingtaine de vêlages par an : «si je me suis installé, c’est grâce aux vaches. On est montés jusqu’à une quarantaine de vêlages, après avoir construit ce bâtiment, de manière à créer un véritable atelier de vaches allaitantes. A l’automne dernier, on y croyait encore et on l’a même agrandi pour y loger quelques animaux supplémentaires et continuer à faire un peu de génétique…» Avec pour seule ambition, souligne Walter : «d’avoir des vaches qui donnent du lait, ont un peu de carcasse et qui soient gentilles…» L’activité économique de l’exploitation reposait jusqu’alors sur trois ateliers : céréales, élevage allaitant, plus quelques ha de vignes. Avec un salarié, embauché pour s’occuper plus particulièrement des animaux : «ne manque aujourd’hui que l’argent pour le payer…» Un système vertueux, qui permettait de rallonger les rotations et ramener un peu de fumier sur les terres argileuses, tout en conservant des parcelles en herbe : «ici, on est en zone bassin de captage, alors partout où on peut éviter de mettre de l’engrais ou des pesticides, on le fait. On n’est pas obtus non plus, l’eau, on la boit aussi !» Mais un système aujourd’hui fragilisé : «au lieu de diversification, on est en train de personnaliser à outrance des exploitations mixtes comme la notre» Pas seulement la conséquence d’un marasme économique et d’une filière en crise, explique Walter : «c’est lié aussi à cette réglementation qui nous plombe. Trois ateliers, ça signifie trois réglementations différentes à gérer et on ne peut pas être partout…»
«T’as beau être grand et costaud…»
Leur salarié recherche déjà un autre travail et une quinzaine de vaches et autant de veaux sont déjà partis. Les animaux restants seront tous, ou dispatchés dans d’autres élevages, ou envoyés à l’abattoir et dans moins d’un an, tout sera fini. Moralement c’est dur, avoue Walter Huré : «t’as beau être grand et costaud, quand tu les fais monter dans le camion, t’as quand même un petit pincement au cœur. Et quand tu remplis les cartes vertes, tu te dis, «c’est bizarre, y’a des trucs qui tombent dessus…» Ça s’appelle des larmes, une pluie salée ! Et pourtant, on y était préparés»
Gilles Robillard se souvient de ce soir d’hiver, où il a attendu que toute la famille soit réunie autour de la table du dîner pour annoncer qu’ils allaient se séparer des animaux : «pas simple non plus à vivre, je peux même dire que cela a été un peu «costaud» !» Trois enfants, déjà tous passionnés par le métier, mais qui auront peut-être un jour un choix à faire pour leur avenir. Pour l’heure, Baptiste, du haut de ses douze ans, rouvre d’un geste assuré la barrière cornadis. Un claquement sec dont l’écho ne sera plus bientôt que souvenir…