Accès au contenu
Bien dans ses bottes

« Cette formation m'a ouvert les yeux »

La formation « Bien dans ses bottes », organisée par la FDSEA de l'Yonne, réouvre ses portes le 24 novembre prochain. Deux anciens stagiaires ont souhaité témoigner sur leurs expériences.

Par Charlotte Sauvignac
Bien dans ses bottes
FDSEA 89
La formation "Bien dans ses bottes" débute le 24 novembre prochain.

Pour Mickaël, cette expérience date de l'an passé, et a été « révélatrice ». Même si, « au début, je n'étais pas partisan, pour la simple et bonne raison, que je n'ai pas intégré le monde agricole directement. J'ai commencé par être commercial dans le domaine agricole », confie-t-il. Petit-fils et fils d'agriculteur, Mickaël confie avoir « toujours eu l'agriculture en moi ». Grâce à son activité en tant que salarié, dès la sortie d'études, « j'ai toujours eu le sentiment que j'étais différent, que j'avais une facilité à m'ouvrir aux autres » et « ça m'a forgé au monde extérieur, à sortir du monde agricole et surtout de l'exploitation familiale ». En reprenant une exploitation agricole voisine à celle de son père, en 2021, Mickaël a d'ailleurs souhaité « se différencier », en « prenant son indépendance », car « nous n'avions pas les mêmes idées avec mon père et je préférais être maître de mes décisions », se souvient-il. En 2022, « j'ouvre également une entreprise de prestation de services agricole et BTP ». Pour cet agriculteur, tout s'accélère en 2024 lorsque son père part à la retraite et « reprend l'exploitation familiale ». À ce moment-là, « tout allait bien » mais en discutant avec un ancien stagiaire de la formation, Fabrice, l'idée a germé dans sa tête. L'élément déclencheur a été « lorsque ma conjointe a souhaité que l'on se sépare » annonce-t-il et ajoute que, « je me suis dit, allez, je me lance ». En partant à l'aventure, Mickaël « ne s'attendait à rien » mais « l'enchaînement de plusieurs choses, que ce soit dans le cadre professionnel ou personnel, a fait que j'ai franchi le pas. Même si je suis convaincu que c'est l'aspect personnel qui a été l'élément déclencheur ». Lorsqu'il a fait ses premiers pas au sein de la formation, l'agriculteur a retrouvé de nombreux visages familiers, et cela « a été un peu stressant, car souvent on veut préserver notre environnement professionnel, cela fait partie de notre intimité. On ne connaît pas l'état d'esprit des autres stagiaires et au début j'avoue que cela m'a un peu retenu », confesse-t-il. Pourtant, « lorsque le premier stagiaire a ouvert la bouche, cela a été renversant, bouleversant, dois-je même dire », témoigne-t-il, avant d'ajouter que « ce témoignage a cassé les codes et les préjugés, il n'existait plus aucune barrière entre chaque participant. Le stagiaire a emmené les autres dans la délivrance ou même, devrais-je dire, dans la libération de la parole ».

Le poids familial

De son côté, Fabrice, a suivi la formation en 2016, et se souvient encore de l'instigatrice de la première session, Marianne Ranque, « qui avait entendu parler d'une formation sur le développement personnel agricole, notamment d'un nom, celui de Jean-François Mathieu qui exerçait dans le Cantal », se remémore-t-il. Et c'est lors de ce coup de fil que « Marianne m'a inscrit à la formation. Elle m'avait dit que si j'avais appelé, c'est qu'il y avait une raison, et avait donc noté mon nom sur la liste de stagiaires », explique-t-il, souriant. Tout comme Mickaël, Fabrice a repris l'exploitation familiale en grandes cultures. À une différence près. « J'ai travaillé avec mes parents, en sortie d'études. En parallèle des céréales, nous avons eu une production de canards pendant une vingtaine d'années. Et pour tout dire, je n'aimais pas les canards, alors conseiller les clients sur un produit que je ne cuisine pas au quotidien, c'était vraiment quelque chose de pas évident », confie-t-il. Il se souvient encore « de la période intensive dans laquelle on se trouvait ». En 2008, lorsque ses parents partent à la retraite et que l'élevage de canards prend fin, Fabrice ressent « un vide au niveau du travail. Il fallait de l'activité, sinon ça n'allait pas », confie-t-il. Enfin, « ça m'allait bien de me poser un petit peu, de calmer la cadence, même si, il ne faut pas trop non plus, parce que j'avais la peur de ne plus bien faire du coup, et cela faisait partie des sentiments sous-jacents », analyse l'agriculteur. À cela s'ajoute la vie de famille. Lorsque « ma femme et mes enfants partaient en vacances et que je me retrouvais seul pendant les moissons, j'étais hyperconcentré sur le travail. Il faut également dire que je n'étais pas très agréable, car j'étais stressé, par rapport aux conditions climatiques et au timing pour récolter les cultures », se souvient-il. En faisant partie des premiers stagiaires à suivre la formation « Bien dans ses bottes », Fabrice, se retrouve face à l'inconnu. « Jean-François Mathieu, lui, était vraiment dans l'émotion. Moi, ça m'a interpellé tout de suite », confie-t-il.

Se lancer dans l'aventure

De fil en aiguille, Mickaël confie que « les formateurs nous ont mis en confiance », et que cela a permis de comprendre que « nous avons tous une histoire qui nous est propre. Le point de départ, reste l'aspect professionnel, mais on se rend vite compte que c'est l'aspect personnel qui rentre le plus en ligne de compte ». Pour lui, « la grosse similitude de nos histoires reste le fait qu'il existe un problème entre les générations ». En ce qui le concerne, c'est la relation avec son père qui l'affectait. « Au moment de la récolte, nous avions quelques altercations sur le plan professionnel, ce qui m'affectait sur le plan personnel. J'en avais marre de ne pas être considéré comme une personne responsable », avoue-t-il. En travaillant avec Jean-Luc Marx et Sandrine Eidelstein, « nous avons appris à voir les choses différemment et à détenir les outils pour pouvoir me faire comprendre dans ma façon de voir les choses », explique-t-il. Fabrice, lui, confie que « Jean-François était dans une autre posture. Il m'a tellement apporté. Pour quelqu'un comme moi, qui n'a pas énormément confiance en lui, je me suis vraiment accroché à lui ». Ce qui a permis à Fabrice de sentir les effets et « de poser un cadre ». Comme Mickaël, la relation avec son père jouait un rôle important dans son quotidien. « Nous avions des objectifs à atteindre lors de la formation. Et l'un d'eux était de prendre mes parents dans les bras », confie-t-il. Il se souvient encore du bien que ça a pu lui faire, car « j'avais un besoin à ce niveau-là. C'est quelque chose qui m'a vraiment soulagé. J'ai également proposé à mes parents d'instaurer une règle : se faire la bise tous les matins, lorsque nous nous voyons », témoigne-t-il. Faire évoluer sa relation avec son père c'est ce qui a permis d'améliorer la situation. Même ses enfants ont pris les choses en main et cela a permis de « créer un changement, tranquillement, pour que ce soit en accord avec mon état d'esprit », explique-t-il. En plus d'une relation conflictuelle avec son père, Mickaël, lui, a subi « un traumatisme », c'est-à-dire « la séparation avec mon ex-conjointe, car je n'en étais pas le décisionnaire. Il y a eu la culpabilité qui est entrée en ligne de compte. L'aspect personnel a eu un énorme impact. J'ai beaucoup travaillé sur mes attitudes, ma façon de parler, car cela a joué sur la relation avec mon ex-conjointe, sur la relation avec mon fils, ainsi que sur celle avec mes parents », confie-t-il. Mickaël a donc pris la décision quasi immédiate d'assister à des séances chez un psychologue, « pour la toute première fois de ma vie », en parallèle de la formation. « Je ne me sentais pas en accord avec moi-même ainsi qu'avec mes valeurs, je voulais être la meilleure version de moi-même. Il est important de savoir se remettre en cause pour avoir la meilleure appréciation d'une situation », confie-t-il.

Un avant… et un après

Depuis 2016, Fabrice croque la vie à pleines dents. « C'est super important de se rendre compte qu'on n'est pas seul », confie-t-il avant d'ajouter que la « force du collectif » a joué énormément dans le tournant de cette aventure. « Il faut essayer d'avoir une perception particulière du bonheur, et souvent ça se traduit par les petites choses du quotidien ». Être bien dans ses bottes, « c'est lorsque l'on a l'impression d'aller bien, mais qu'on pourrait aller mieux », avoue-t-il. Depuis, il exprime le fait que « cela permet de donner une autre vision des choses, de prendre du recul, pour être encore mieux ». De son côté, sa famille et ses enfants expriment quotidiennement « le fait qu'il y ait eu un avant et un après ». Pour donner un point de détail, « avant la formation, quand je rentrais et que je voyais que les chaussures des enfants n'étaient pas rangées, je me mettais en pétard. Parce que, par principe, il fallait que tout soit bien rangé », confie-t-il. Et « au bout de deux jours de formations, les chaussures, soit je les rangeais moi-même soit je ne disais rien. Et puis au bout d'un moment, il y avait tellement de chaussures qu'on ne pouvait plus passer, donc quelqu'un s'occupait de ranger », sourit-il. « C'est bête, mais le fait de ne pas se mettre en colère, de laisser passer, ou de communiquer, apporte un effet complètement différent ». Prendre du recul, c'est aussi « redéfinir où sont ses priorités, et c'est celles-ci qui sont les plus importantes », confie Fabrice, en souriant. Après avoir défini un cadre, Fabrice s'attelle à « faire des piqûres de rappel de cette formation, car ce n'est pas une fin en soi, et on est vite réabsorbés par cette jungle ambiante ». Tout comme Fabrice, Mickaël, continue de faire des formations complémentaires. « Je me suis révélé, aujourd'hui, dans le développement personnel » et « j'ai envie d'avancer, d'évoluer, de considérer l'humain au centre de tout, et donc, de travailler pour soi ». Après des moissons réussies, Mickaël a le sourire. « Aujourd'hui, mon fils me dit que j'ai évolué, qu'il le ressent dans notre relation, et ça me fait du bien. J'ai inculqué à mon fils, des étapes clés que l'on a appris à la formation, comme les trois kiffes du jour, pour lui permettre de toujours voir les choses du bon œil. En ce qui concerne mes parents, ils ne me le disent pas, mais les outils me permettent de mieux appréhender le travail. Ce sont les proches qui s'en sont rendu compte, et c'est le plus important », déclare-t-il. Pour Mickaël et Fabrice, ce sont les relations familiales qui ont été la raison principale de leurs venues. Pour autant, au vu des charges actuelles que subie la profession agricole, quel que soit le secteur d'activité, la formation « Bien dans ses bottes », « peut également permettre d'aider à vivre ces situations plus sereinement », conclut Fabrice.

En savoir plus sur la formation

La formation se déroulera à Auxerre sur une durée totale de six journées, réparties en trois sessions de deux jours aux dates suivantes :

  • 24 et 25 novembre 2025
  • 13 et 14 janvier 2026
  • 10 et 11 février 2026

Au cours des six jours, les stagiaires seront formés entre 9h-17h. Cette formation est financée par VIVÉA pour les ressortissants à jour de leur cotisation ou disposant d’un échéancier, ce qui la rend gratuite pour ces participants. Pour les non-ressortissants Vivéa, le coût de participation est de 1 260 €. Les sessions seront animées par Jean-Luc Marx et Sandrine Eidelstein. Enfin, une prise en charge du service de remplacement par la MSA est également possible. Pour s'inscrire : vous pouvez prendre contact avec Léandre Vocoret, animateur à la FDSEA 89 au 06 35 81 34 15 ou par mail : leandre.vocoret@fdsea89.fr.
A noter que : cette formation est à destination de tous les agriculteurs, qu'ils soient adhérents de la FDSEA ou non.