Parc national
C’était chaud à Chaumont
Le milieu agricole a été «très mal reçu» lors de l’assemblée générale du GIP des forêts de Champagne et Bourgogne.
Le Groupement d’intérêt public (GIP) du Parc national des forêts de Champagne Bourgogne a validé son dossier de prise en considération la semaine dernière. Le document sera donc transmis aux instances nationales. Les agriculteurs le redoutaient et s’étaient déplacés à Chaumont pour rappeler leurs craintes de voir leur métier impacté par des mesures restrictives. Rien n’y a fait. La déception est de mise, surtout que des incidents se sont déroulés en amont de la réunion. Les forces de l’ordre sont même intervenues en utilisant du gaz lacrymogène. Thierry Ronot (FDSEA) se dit «assommé et fou furieux» : «On nous a bâillonnés dans un coin, c’est inadmissible de charger des gens qui viennent voter. Ils continuent d’avancer sans tenir compte des avis des agriculteurs et du monde économique dans son ensemble. Bonjour la démocratie et la liberté d’expression ! Ils ont lâché 1000 mètres autour de chaque village 23 heures avant cette assemblée générale : c’est se foutre de la gueule du monde. Dans un mail qu’ils nous ont envoyé le lendemain, ils évoquent, je cite, un processus démocratique qui aurait toujours prévalu dans leurs travaux. Ils s’en disent garants et assurent de leur volonté de dialogues et de concertation.... Ils n’ont vraiment pas peur de signer des chose comme ça. La FDSEA, les JA et la Chambre d’agriculture vont faire remonter tout cela à nos grand élus». Pour Ghyslaine Verstraete (Chambre d’agriculture), on appelle cela une «ambiance corsée» : «c’est tout simplement déplorable. Nous n’avons pas pu entrer immédiatement et nous avons bénéficié de gaz lacrymogènes au même titre que les manifestants. Plusieurs personnes n’étaient pas bien du tout, je pense notamment au maire de Châtillon. C’est une triste expérience pour nombre d’entre nous. Je trouve lamentable cette façon de gérer les choses. J’avais demandé un signe fort de la part du GIP mais ce qu’ils ont fait la veille de l’assemblée n’en est pas un. Il n’y a aucune volonté d’avancer de leur part. Ce que j’ai vécu a titre personnel est très difficile. Et quand je lis leur mail remerciant les personnes d’avoir voté, je ne sais plus quoi penser». Le parc national des forêts de Champagne et Bourgogne doit être, en principe, créé en 2017. Sa charte définitive devrait être établie l’an prochain. Si des retombées économiques sont espérées pour les quelque 120 communes concernées, les agriculteurs et professionnels du bois craignent de forts impacts pour leurs métiers.
Rappels de la FDSEA
Le premier projet de Parc National initié en 2009 concernait un projet de parc constitué exclusivement de forêts domaniales sur une superficie d’environ 20 000 ha qui fédérait et faisait consensus auprès de l’ensemble des acteurs du territoire. Cette taille de projet était en cohérence avec les parcs que l’on trouve notamment en Allemagne et qui ont aujourd’hui fait leurs preuves. Malgré tout, en février 2014, le GIP a imposé un projet démesuré d’environ 75 000 ha qui engendre depuis menaces, insultes et divise les citoyens. Le GIP s’est félicité mi-décembre à l’issue de la consultation institutionnelle, d’obtenir une adhésion au projet à 75%. Une communication théâtrale et une manipulation des chiffres une nouvelle fois bien orchestrée. Car l’interprétation des résultats met aussi en évidence que seulement 38,4% des structures ont émis un «oui franc» sans recommandations et que surtout 50% des communes de Côte d’Or ont émis un avis défavorable. Durant la consultation institutionnelle, les structures consultées pouvaient émettre des recommandations afin de faire évoluer le projet. Le GIP s’étant même targué d’annoncer publiquement mi-décembre «Il va nous falloir également répondre aux recommandations exprimées» et «Les recommandations données par les structures consultées vont alimenter le travail futur». Lors du bureau du 18 décembre et du conseil d’administration du 13 janvier, le GIP a décidé de ne pas tenir compte des recommandations formulées, alors que ce sont 93 structures soit 37% qui souhaitaient faire évoluer le projet proposé. Un rapport du Conseil général de l’environnement et du Développement durable commandé par le Ministère de l’environnement datant de mai 2014, met en avant que sur les moyens financiers la situation apparaît difficile. En effet, la subvention annuelle aux Parc nationaux existants diminue depuis 2012. C’est pourquoi, la recherche d’autres sources de financement (mécénat, rémunération d’activités, autre contributions) doit être enclenchée. Les annonces aux communes de bénéficier de subventions de plusieurs milliers d’euros ne seraient-elles au final qu’un leurre de plus ? D’autant que le rapport précise «qu’il serait dommageable de distraire des moyens affectés aux Parc Nationaux existants pour créer ce nouveau parc» et que «des points importants restent à traiter dont la définition du périmètre du cœur de ce parc, en tenant compte d’une appréciation réaliste des moyens qui pourront lui être consacrés». Le GIP endort les citoyens en leur annonçant qu’ils vont eux-même écrire leurs futures règles pour la zone du cœur. Mais ces règles s’inscrivent dans un cadre national définissant la règlementation relative à la protection du milieu naturel, des travaux ou encore des activités. A titre d’exemple, dans les Cévennes ce sont 33 modalités d’application de la règlementation qui ont été définies, 30 dans les Pyrénées ou encore 32 dans les Calanques. Ce projet, liberticide, exorbitant et irrespectueux, va donc obligatoirement mettre à mal le concept de propriété privée. Ce sont 250 structures qui ont voté sur le sort de 59 communes qui seront concernées par la zone d’étude de cœur dans laquelle un régime transitoire règlementaire va s’appliquer dès 2015. Zone d’étude de laquelle découlera le futur cœur lui aussi obligatoirement règlementé. Et que dire du président et vice-présidents dont leurs communes respectives se trouvent en dehors ou en périphérie de la zone d’étude de cœur et qui a terme se retrouveront en dehors de toute zone règlementée. Quelle est donc la crédibilité d’un projet pour lequel les élus décident des règles qu’ils vont appliquer aux autres mais surtout pas à eux ?