Accès au contenu
Filière élevage

Apprendre à libérer la parole

Le sujet du bien être animal en élevage prend aujourd’hui une place prépondérante dans les débats sociétaux et les éleveurs sont souvent amenés à prendre la parole pour expliquer ou défendre leurs pratiques. Tout l’objet de la formation qui vient de se tenir à Avallon, sous l’égide de la FDSEA de l’Yonne, en partenariat avec Interbev Bourgogne et la FRSEA.
Par Dominique Bernerd
Apprendre à libérer la parole
Pas facile de se présenter en une minute, sous l’œil de la caméra.
«Bonjour, je m’appelle Arnaud, installé sur l’exploitation familiale depuis 20 ans, où j’élève des bovins et des ovins. Le quotidien de l’éleveur, c’est de s’occuper de ses animaux pour qu’ils nous le rendent bien. L’intérêt économique passe par l’intérêt pour l’animal et on fait en sorte de s’en occuper au mieux». Pas facile de passer en premier quand on se lance dans le redoutable exercice de se présenter en moins d’une minute, face à la caméra… Ils sont une douzaine d’éleveurs, de l’Yonne, mais aussi des départements limitrophes, à participer à la formation. Objectif  : savoir utiliser le bon vocabulaire, pour mieux expliquer son métier quand il est nécessaire de se défendre, ou de prendre la parole, pour s’exprimer sur le Bien-être Animal. Bien plus qu’un simple argumentaire, c’est une partie de l’histoire de chacun qui peut être ainsi véhiculée au travers du discours, explique Isabelle Tisserand, du Comité Régional Interbev de Bourgogne  : «vous n’avez pas vraiment conscience de toutes ces choses positives que vous faites déjà chaque jour et qui répondent aux attentes des consommateurs. L’objectif de cette session est bien de vous rappeler ces pratiques vertueuses qui font votre quotidien et la manière d’en parler pour que ce soit compréhensible par le plus grand nombre : journalistes, consommateurs, voisins, etc». Pour y parvenir, de nombreux ateliers avec exercices pratiques tout au long de la journée et des formateurs pour apprendre à gérer différentes mises en situation  : simulation de plateaux tv, interviews, etc.

Témoignages successifs
Comment se préparer à répondre aux médias, quand ce n’est pas son activité première, tout en adoptant un discours affirmatif et courtois ? En partageant des anecdotes, des chiffres ou des exemples… Autant d’éléments pour mieux se raccrocher à son territoire et être en phase avec l’imaginaire de celui qui vous écoute. Pour Valérie Maistre, l’une des deux animatrices de la journée, «ce serait un comble qu’un éleveur ne puisse parler de bien-être animal. Qui mieux que vous peut savoir de quoi il s’agit   ? L’agriculture fait partie du terroir français il est important de le rappeler. Oui, vous entretenez le paysage  ! Oui, sans l’élevage, les paysages ne seraient pas les mêmes aujourd’hui, d’où l’importance de présenter dans ses propos sa région, elle fait partie de votre humanité et votre identité». Les témoignages sous l’œil de la caméra se succèdent, avec un débriefing immédiat, commenté par tous, pour en apprécier la pertinence ou les faiblesses. C’est au tour de Régis, éleveur nivernais, de se lancer à l’eau  : «Mes vaches, je les connais toutes, même si c’est par un simple numéro. Chacune est différente et c’est plutôt agréable de savoir qu’elles me reconnaissent. Le bien-être animal ? Les animaux y ont droit, mais l’éleveur aussi. Et mon bien être à moi, je l’ai chaque matin en chaussant les bottes, en voyant le lièvre décoller sous mes pas ou mes vaches dans la brume». Un décor bucolique peint avec des mots simples qui ne font pas oublier la réalité économique  : «un beau métier mais difficile d’en vivre. Si demain on veut conserver cette belle Bourgogne, l’élevage doit être aidé».

Des atouts nombreux et méconnus
Pas facile en un temps limité, de se présenter, raconter sa région, son métier et expliquer pourquoi le bien-être et la protection animale font partie intégrante du métier d’éleveur. D’où la nécessité de prioriser les messages principaux que l’on souhaite faire passer dans son discours et de simplifier son vocabulaire : parler d’étable au lieu de stabulation, de jeune bovin élevé par sa mère plutôt que de broutard, ou d’élevage en bâtiment à la place du mot hors sol… Plus la parole est concise, mieux elle sera perçue. Les atouts de la filière élevage sont nombreux mais souvent méconnus et faussés par la perception que peut en avoir la société au travers d’images certes condamnables, mais bien loin de représenter la majorité des actes du quotidien. Autre séquence phare de la journée : trois débats filmés, simulant un plateau TV, avec autour du journaliste animateur, plusieurs éleveurs et un contradicteur. Chaque plateau étant introduit par un petit film à charge, volontairement provocateur, à l’image du premier exemple : un veau arraché à sa mère quelques heures après sa naissance ! Pas facile là non plus, de rester dans une posture de dialogue face à la caméra et à son interlocuteur, même si, rappelle l’animatrice, «l’avis de l’autre a le droit d’exister. De toute façon, ce n’est pas lui que vous convaincrez, mais bien les téléspectateurs!»
Pour les éleveurs n’ayant pu se libérer pour participer à la formation du 20 octobre, la FRSEA Bourgogne Franche-Comté organise une seconde session au contenu identique, vendredi 24 novembre à Beaune.
Renseignements et inscriptions : Marianne Ranque au 03 86 49 48 24