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Fédération départementale charolaise

Ça commence à faire beaucoup

La Fédération charolaise de Côte d’Or, réunie la semaine dernière en assemblée générale, a dressé un constat très préoccupant de l’élevage allaitant. Les contraintes de la FCO n’arrangent rien.
Par Aurélien Genest
Ça commence à faire beaucoup
Les participants, juste avant la réunion.
Court, le rapport moral de Thierry Lechenault. A la lecture de celui-ci, en ce mardi 22 septembre salle Paturin au pôle agricole de Créancey, le président de la Fédération charolaise de Côte d’Or se montrait particulièrement agacé : «Je n’ai pas écrit beaucoup car peu de choses ont changé depuis un an. Rien n’évolue, rien ne change. Je suis lassé de répéter tous les ans la même chose» disait-il d’un air quelque peu dépité. Les éleveurs participant à la réunion ne semblaient pas être en mesure de redonner du «peps» à ce rendez-vous annuel de la Fédération. «Le contexte est très, très mauvais» confiait l’un d’eux en début d’assemblée. «Cette conjoncture nous fait mal, les cours de la viande ne sont pas au rendez-vous malgré les manifestations et les accords passés. Les charges, que ce soit le gazole, les engrais, les semences, les impôts fonciers sur le non-bâti ou encore les fermages ne diminuent pas et augmentent même dans certains cas» s’inquiète le président, pour qui «l’élevage allaitant est clairement en grand danger» : «certains ne passeront pas le cap de la fin de l’année avec ces difficultés et la très mauvaise année climatique que nous avons eue».

Problèmes de prix
Thierry Lechenault redoute l’arrêt de plusieurs éleveurs: «ils pourraient être dans l’obligation de jeter l’éponge, c’est bien le risque, et que dire des conditions d’installation des jeunes ? Je m’en désole, nous n’avons aucune vision à court et moyen terme. Quand j’avais effectué mon stage  préparatoire à l’installation, nous étions presque une centaine. Je voudrais bien savoir combien ils sont aujourd’hui». Un ras-le-bol général se faisait ressentir dans la salle de réunion. Mais que faire pour que la situation aille un peu mieux ? «La solution ? Il faudrait que les prix à la production remontent et que les charges baissent. Le prix est bien le problème, et dans tous les domaines. Regardez les dernières moissons : certains rendements en cultures d’hiver ont beau être corrects, les prix ne suffisent pas pour gagner de l’argent. Pour le maïs ensilage, nous avons fait moitié moins en quantité. En qualité, c’est catastrophique aussi. Il va falloir complémenter. Ceux qui comptaient là-dessus pour engraisser leurs animaux vont avoir de très gros problèmes...» poursuit Thierry Lechenault. Les promesses des Politiques ne semblent pas apaiser le président : «quand j’entends parler des pistes de la restauration hors domicile ou la voie scolaire pour écouler notre production, je dis que cela aurait du être mis en place depuis bien longtemps. Et des problèmes persistent à ce sujet : le président du conseil d’administration d’un hôpital me dit toujours qu’aucune origine de la viande n’est mentionnée sur les appels d’offres qu’il reçoit, la faute à une réglementation européenne....Vu qu’ils prennent le moins cher, les produits d’importation passent à chaque fois. Certes, il y a bien de temps en temps des opérations telles que le bœuf bourguignon ou d’autres mais ça, il en faudrait toute l’année pour que l’élevage aille mieux». Pour ne rien arranger, la fièvre catarrhale ovine avait ressurgi en France quelques jours avant cette assemblée, au plus grand désespoir de Thierry Lechenault : «nous n’avions certainement pas besoin de ça ! En plus, c’est une maladie commerciale plus qu’autre chose, elle ne fait pas mourir les bêtes mais a le mérite de faire marcher les laboratoires qui fabriquent les vaccins...».

FCO : la cerise sur le gâteau

Pascal Martens participait à cette assemblée. Le président du Groupement sanitaire de Côte d’Or revenait tout juste de Paris où se tenait une réunion autour de la FCO. Le Côte d’Orien affichait d’emblée son inquiétude : «C’est clairement le plus mauvais moment, là où les broutards sortent, là où il y a des concours... Cette FCO va mettre la pagaille momentanément. Un gros tiers de la Côte d’Or est aujourd’hui en zone impactée». Pascal Martens tentait toutefois de rassurer les éleveurs : «j’espère que la situation s’améliorera un peu d’ici une quinzaine de jours. Aujourd’hui, nous travaillons de façon à faciliter les échanges et les concours. Les discussions vont bon train avec les Italiens et les Turcs, sachant que pour ces derniers, pour l’instant, c’est fermé. Cette pression va forcément faire baisser le prix du broutard. Dès lors que l’on bouscule les circuits commerciaux, il y a baisse de prix». Interrogé sur la stratégie vaccinale, le président du GDS21 regrettait la détection d’un foyer de sérotype 8 : «ce n’est pas de chance, nous avions gardé des antigènes de sérotype 1 et 4 des années passées, mais pas ou peu de 8. Il va déjà falloir faire les antigènes avant de faire les vaccins. En toute logique, ces derniers ne devraient pas arriver avant janvier ou février. Cela aurait été du sérotype 1 et 4, nous aurions pu les avoir plus rapidement». Les doses disponibles à la date de cette assemblée étaient, fort logiquement, destinées aux animaux en partance pour les pays étrangers. «L’export en priorité» résume Pascal Martens, «nous allons essayer de gérer cette situation au mieux. Le but est de créer une cellule et de voir ce que les éleveurs envisagent de faire. Le vaccin doit aller en priorité vers l’animal qui quitte l’exploitation». A son retour de sa réunion parisienne, Pascal Martens assurait que le coût du vaccin et de l’acte vaccinal était «pour l’instant» intégralement pris en charge par l’État, encore une fois pour les animaux destinés à l’export : «les tractations vont bon train... Cela va être du coup par coup. Avec cette FCO, à mon avis, nous sommes partis pour des vaccinations qui vont durer pendant au moins trois ans». Pascal Martens rappelait l’urgence de faire partir les bovins : «les éleveurs n’ont pas besoin de garder leurs animaux vu le contexte et le manque de fourrages. Or, vaccination aujourd’hui veut dire rappel dans trois semaines. Il faudra encore attendre 10 jours minimum pour que les anticorps se fassent. Aujourd’hui, un animal qui est en position de vente est au minimum cinq semaines dans l’exploitation. D’autres problèmes vont se poser si la Turquie ouvre de nouveau ses portes : dès lors que les animaux feront plus de 300 kg, ils se feront recaler, et il y a des chances qu’ils arrivent à ce poids vu qu’ils resteront plus longtemps dans l’exploitation.... La situation est vraiment compliquée et nous devons trouver des solutions avec les Politiques car même les gens qui sont en zone blanche ont du mal à faire partir leurs broutards aujourd’hui puisque la France a perdu son statut indemne.... Il faut absolument que l’on aille à Bruxelles assouplir les textes, sinon, l’élevage va y rester».