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Afdi

«à 1000 lieues de notre quotidien»

Deux Côte-d’oriens membres d’Afdi BFC évoquent un voyage à Madagascar.
Par Ma signature
Afdi accompagne les organisations paysannes des pays en développement. Cette association de solidarité est présente en Bourgogne Franche-Comté et entretient des partenariats au Cameroun, au Sénégal et surtout Madagascar.
Une dizaine de Côte-d’Oriens sont impliqués dans la démarche qui invite parfois à la découverte de ces différents pays. Le dernier voyage d’étude s’est déroulé en territoire malgache en compagnie, notamment, de Sylvie Lemaire, conseillère énergie à la Chambre d’agriculture et de Gérard Paillet, agriculteur retraité à Fenay. Ces derniers partagent ici leur riche expérience.

Une exploitation de 0,5 ha
«Nous étions à 1 000 lieues de notre quotidien», confie Sylvie Lemaire, qui décrit une agriculture très différente de celle de la Côte-d’Or : «le choc est rude. Nous avons été hébergés dans un village sans eau courante, ni sanitaires, ni électricité. La famille qui nous a reçus est composée de quatre jeunes garçons orphelins qui vivent sur une exploitation agricole de 0,5 ha. Sur cette surface, en grande partie immergée, ils cultivent du riz, des patates douces, du manioc, des haricots. La seule richesse de la famille est un zébu, parqué devant la maison. Grâce à VFTM, partenaire de l’Afdi, ils peuvent valoriser le riz et les haricots en production de semences. Seul le plus jeune des garçons va à l’école, quand la famille a assez de riz pour la payer». Les paysans rencontrés dans ce village ont tous interrogé le petit groupe français sur leur modèle agricole, visiblement très envié : «ils se demandent comment agrandir leurs surfaces, comment abandonner les cultures associées pour des cultures uniques. Ceux qui ont un peu plus de revenus utilisent les engrais chimiques. Le chef du village nous a dit vouloir monter un poulailler de plusieurs centaines de poulets, avec des panneaux solaires pour les éclairer la nuit et pour qu’ils grossissent plus vite. Nous sommes partis en étant conscients qu’il est inutile d’envisager de proposer là-bas un développement agricole qui soit calqué sur le nôtre. Mais nous pensions qu’une fois sur place, nous aurions peut-être une idée plus claire de ce qui peut être fait. Au final, après avoir rencontré tous ces paysans, pratiquant des types d’agriculture bien différentes, on sait juste qu’il faut éviter de reproduire les erreurs de l’agriculture productiviste mise en place chez nous».

Développement de l’agrobusiness
Un modèle d’agrobusiness se développe au sud du pays, comme l’explique la salariée de la Chambre d’agriculture : «nous trouvons des structures de plusieurs milliers d’hectares avec des cultures de maïs et des productions de géraniums, le tout à grand renfort d’intrants, sans exclure les OGM. Des sociétés étrangères au pays jouent le rôle de gestionnaires, elles équipent les villages en panneaux solaires et écoles, favorisant ainsi l’acceptabilité de ces projets». Selon Sylvie Lemaire, «un autre modèle est à inventer : certainement plus résilient que le modèle traditionnel malgache, mais sans créer une situation de dépendance aux intrants et à leurs fournisseurs, le tout dans une solidarité nécessaire entre nord et sud. Ce pays à la population très jeune va vite devoir trouver des solutions pour faire face à l’insécurité alimentaire, résultant à la fois de la jeunesse de la population et des conséquences concrètes du réchauffement climatique».

«Les choses avancent»

Gérard Paillet avait déjà effectué un premier séjour à Madagascar il y a près de 20 ans et a pu comparer l’évolution de l’agriculture locale : «Il y a davantage de zones cultivées en riz et une forte évolution des techniques culturales. Malgré cette intensification, la production de riz est encore insuffisante face à l’évolution de la population. La rencontre avec les organisations paysannes partenaires d’Afdi et le séjour chez l’habitant nous ont montré que malgré toutes leurs difficultés et leur extrême pauvreté, ils font des efforts et s’organisent. En 20 ans, les leaders ont réussi à se former, prendre des responsabilités, construire et faire vivre des organisations professionnelles alors qu’il n’existait pratiquement rien au début des années 2 000. La montée en puissance de structures économiques et syndicales les amène à une participation dans les ministères pour débattre de la mise en place des projets de développement».