Le délégué cantonal FDSEA de Montbard livre son point de vue sur le difficile contexte sanitaire, entre FCO et MHE.
C'est un Jean-Luc Gerbron inquiet et quelque peu « excédé » que nous avons rencontré vendredi dernier sur sa ferme à Crépand, à deux pas de Montbard. Le responsable syndical observe une pression « palpable » sur le terrain, « un peu chez tout le monde », y compris dans le para-agricole, en lien avec l'actualité sanitaire : « Les PCR et les vaccins à répétition nous coûtent de l'argent et pompent notre énergie. Aussi et surtout, nous ne savons pas où nous allons. Les trésoreries sont impactées, les rentrées d'argent sont retardées, tout comme le règlement des factures… Cela survient lors d'une année peu favorable, fatigante, avec une météo pourrie qui a compliqué tous nos travaux ».
« Cher » tampon
Jean-Luc Gerbron regrette un manque d'anticipation dans la stratégie des vaccins et le peu de « confiance » accordée aux éleveurs : « l'arrivée de FCO-3 est programmée depuis près d'un an, nous savions qu'elle allait passer chez nous, il aurait préférable d'agir un peu plus en amont et moins en catastrophe… Idem pour la MHE, dont la zone régulée concerne désormais l'est de la Côte-d'Or, y compris ici, à Crépand. Aussi, il est dommage que les éleveurs ne puissent pas vacciner eux-mêmes leurs animaux destinés à l'export. En effet, il faut un tampon du vétérinaire pour officialiser tout ça. Pour moi, cela ne sert à rien, car nous savons pertinemment que la FCO est partout. Vacciner, oui, mais il faudrait le faire plus intelligemment à mon avis ».
Ça fait des sous
L'éleveur bovin énumère les « faits » de l'année : « nous étions déjà obligés de faire vacciner contre la FCO-4 et la FCO-8. Cet été, il a fallu faire un vaccin en catastrophe, comme je le disais précédemment, pour les animaux destinés à l'export. Le temps que tout se mette en place, nous avons perdu presque un mois. Des broutards étaient pourtant bons à partir. Il a fallu faire des PCR et dépenser environ 30 euros par bête pour espérer les vendre. Au final, notre zone était déjà contaminée et les positifs n'ont pas pu être exportés. Pour ma part, 100 % de mes derniers 15 broutards partis étaient positifs ! Ils ont été replacés dans un centre d'engraissement avec un prix qui n'était malheureusement plus le même… J'ai dû batailler pour ne perdre « que » 10 centimes/kg, les pertes chez certains éleveurs arrivent parfois à 40 centimes, c'est énorme. Si l'on ajoute le prix des PCR, soit environ 8 centimes pour un broutard de 400 kg, les désinsectisations et tout le travail et l'énergie déployés, la note devient salée. C'est frustrant, car les cours étaient porteurs ».
Et cet hiver ?
Le Côte-d'orien poursuit : « le vaccin contre la FCO-3 est ensuite arrivé, et il faut donc revacciner ! Tout ça après le 4 et la 8… Nous avons reperdu du temps avec les deux injections nécessaires. Depuis, nous sommes entrés en zone MHE régulée, et il va falloir refaire des PCR, encore 30 euros par bête ! On ne s'en sort jamais ! Le vaccin existe mais on ne nous les donne pas, il faut le payer, seule une zone déterminée a accès gratuitement à ce vaccin, car il est encore au stade expérimental paraît-il ». À un moment donné, « les trésoreries vont coincer », enchaîne Jean-Luc Gerbron, également soucieux pour l'avenir de son cheptel : « pour ma part, j'ai déjà eu deux avortements à cause de la FCO-3, l'inquiétude grandit quant à d'éventuels autres problèmes cet hiver lors des vêlages. Et qu'en sera-t-il des taureaux ? Des spermatogenèses seront probablement nécessaires à l'avenir… En ovins, la situation est très difficile avec des éleveurs qui ont une centaine de brebis vides et des béliers qui ne donnent rien. Le monde de l'élevage subit déjà une importante décapitalisation : celle-ci va encore s'accentuer avec ces évènements… Les interrogations sont nombreuses : face à cette problématique FCO, devons-nous encore soutenir les marchés pour l'exportation sachant que les crises sanitaires vont se multiplier ? Ou doit-on soutenir et développer l'engraissement en France qui, pour le coup, est beaucoup plus souple en termes de vaccins ? ».