Filière
Journées techniques céréalières

Berty Robert
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Dans le cadre des Journées techniques des industries céréalières organisées à Dijon, une table ronde se tenait sur la thématique « Des semences au pain ». Elle démontrait l’importance du travail en bonne coordination qui doit s’imposer à chacun des maillons de cette chaîne.

Journées techniques céréalières
Les participants à la table-ronde (de gauche à droite) : Sophie Rousseau (RAGT), Louis Tortochot (boulangerie Du pain pour demain à Dijon), Arnaud Sorin (Foricher Les Moulins), et Jean-François Colomes (coopérative Val de Gascogne).

De la graine que l’on sème à la baguette que l’on vend, la multitude d’acteurs qui entrent en jeu devrait connaître le travail de chacun des maillons qui constituent cette chaîne. Ce n’est pourtant pas toujours le cas. Pour rendre la filière céréalière dédiée à la meunerie et à la boulangerie de plus en plus performante, il faut donc faire en sorte que chacun de ses rouages fonctionne en bonne intelligence avec les autres. C’était tout l’objet d’une table ronde organisée à Dijon le 13 octobre, dans le cadre des Journées techniques des industries céréalières (JTIC). Pour nourrir la discussion, quatre intervenants avaient été conviés pour démontrer le cheminement « De la semence au pain » comme le révélait l’intitulé de la table ronde.

Inscrire de nouvelles variétés réclame du temps

Au début, il y a donc la semence. Un vrai travail de fond et de recherche, comme le soulignait Sophie Rousseau, cheffe de marché régional Centre et Haute-Normandie et cheffe de produit Blé tendre au sein de la société RAGT : « nous inscrivons chaque année 200 variétés de toutes espèces (blés, maïs, protéagineux) et un quart des baguettes vendues en Europe sont réalisées à partir de variétés de blé RAGT ». L’entreprise a inscrit plus de 80 variétés de blé tendre depuis 2004. Un véritable travail « de romain » lorsqu’on sait que le délai nécessaire pour une sélection varie entre 10 et 12 ans « et tout ceci dans un contexte de lourdes contraintes réglementaires » soulignait Sophie Rousseau. Mais ce travail, il s’avère payant pour le reste de la filière : en vingt ans, les recherches de ce sélectionneur ont permis un gain de 2 points de résistance face à la fusariose ainsi que l’inscription d’une variété tolérante à la Jaunisse nanisante de l’orge (JNO). « Nous essayons d’être des facilitateurs pour les autres maillons de la filière », soulignait Sophie Rousseau. Aujourd’hui, 45 % de la surface céréalière française est réimplantée en semences certifiées. De quoi préparer le terrain au second étage de la fusée : les agriculteurs et leurs organismes collecteurs et stockeurs. « En tant qu’OS, précisait Jean-François Colomes, responsable filière Grandes cultures au sein de la coopérative Val de Gascogne, qui collecte 300 000 tonnes par an, dont 40 % de blé tendre, nous testons des variétés sur plusieurs critères et, depuis dix ans, nous avons beaucoup investi sur la génétique du blé tendre. En œuvrant sur le vivant, nous devons intégrer le fait que nos activités évoluent en permanence. Nous travaillons avec Arvalis et Actisem et nous sommes parvenus à proposer un panel de qualités qui correspond aux attentes des meuniers ».

« Cultiver l’art du compromis »

Ces meuniers, c’est Arnaud Sorin, directeur technique de l’entreprise Foricher Les Moulins (qui dispose notamment d’un moulin en Haute-Saône, Les Moulins Dormoy, près de Luxeuil) qui les représentait. L’entreprise met chaque année en œuvre 50 000 tonnes de céréales dont une grande partie en filière CRC. « Il y a pour nous la nécessité de fournir un produit régulier tout au long de l’année, tout en composant avec une grande variabilité des qualités. Nous produisons trois farines avec des référentiels Label rouge et une farine certifiée AB. La relation au sein de la filière doit être en amélioration permanente et nous devons cultiver l’art du compromis… ». L’entreprise accompagne les boulangers par le biais de formations et de conseils. Ultime maillon de la chaîne, ces boulangers sont-ils satisfaits de la matière qu’on leur fournit ? Pour l’artisan dijonnais Louis Tortotchot, fondateur de la boulangerie Du pain pour demain, et client de Foricher, la grande diversité des attentes exprimées par la clientèle conduit à proposer des produits différenciants : « Je constate une hausse des besoins en blé de force (riche en protéines et destiné à la fabrication de farines panifiables). Le défi, c’est que nous avons des clients de plus en plus exigeants, mais de moins en moins prêts à payer le vrai prix des choses. Ils n’imaginent pas la somme de travail et de compétences qu’il y a derrière une baguette… » La table ronde des JTIC en offrait une vision claire.