Chambre d'agriculture
Contexte géopolitique, gel, grippe aviaire, PAC 2023... Ce qu'il faut retenir de la session

Christopher Levé
-

Les élus de la Chambre d’agriculture de l’Yonne se sont réunis, le jeudi 19 mai, pour faire le tour de l’actualité agricole lors de la session de la Chambre. Et forcément, un point a été fait sur le contexte géopolitique alimenté par la guerre en Ukraine, et ses conséquences sur l’agriculture. Le gel de printemps, la grippe aviaire ou encore une nouvelle application pour la déclaration PAC 2023 ont fait partie des échanges.

Session Chambre
La session de la Chambre d'agriculture de l'Yonne a eu lieu le jeudi 19 mai, à Auxerre.

« Plus que jamais, les questions géopolitiques entrent dans les cours de ferme », lance Arnaud Delestre, président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne. Car si « le blé et les denrées agricoles sont au centre de la géopolitique » et que l’on « reparle de souveraineté pour les aliments comme pour d’autres produits stratégiques », c’est parce que le conflit engagé en Ukraine a des « répercussions sur les prix des céréales, de l’huile de tournesol, du gaz (engrais) et du pétrole. Jamais les cours ne furent si hauts en produits comme en charges et les flux aussi perturbés ».
Au niveau des matières premières et des intrants, « l’augmentation est générale. Elle est particulièrement marquée sur l’énergie et les engrais dont les engrais azotés directement issus du gaz ». Alors que le cours du gaz évoluait entre 20 et 30 €/MWh, il se trouve désormais 90 et 100 €/MWh.
La filière avicole est aussi impactée. « Le poulet se trouve lourdement frappé par les augmentations conjuguées du gaz, des céréales et autres éléments constitutifs de l’aliment », affirme Arnaud Delestre.

Du vin d’Alsace dans des bouteilles de Bourgogne ?

De même que la filière viticole. « Les flux commerciaux sont désorganisés et l’année à venir s’annonce déstabilisée également sur le plan des fournitures. Deux usines ukrainiennes de bouteilles ont explosé. La pénurie redoutée génère des achats d’anticipation. Avec cette situation de guerre, le vin d’Alsace pourrait être servi dans les bouteilles de Bourgogne, les vins rosés ne trouvent plus de verre blanc et les prix des fournitures s’envolent : carton, bouchon et capsule (composées d’aluminium issu de Russie et d’Ukraine) ». « Il y a une vraie problématique d’entretien et de réparation de matériels agricoles et viticoles », ajoute Jean-Baptiste Thibaut, vice-président de la Chambre. « Les délais s’allongent de plus en plus avec le manque de pièces et de main-d’œuvre. On est en train de régresser, on travaille comme il y a 20 ans », continue-t-il.
Pour faire face aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine, le gouvernement a annoncé le 16 mars dernier des mesures d’accompagnement dans le cadre d’un plan de résilience. « Concernant les entreprises agricoles, le plan comprend cinq mesures valorisables rapidement (remise sur le carburant, remboursement et acomptes TICPE ; augmentation du plafond des prêts garantis de l’État ; prise en charge de cotisations sociales ; aide aux structures consommatrices de gaz et d’électricité ; aide exceptionnelle aux éleveurs pour l’alimentation animale), des mesures de moyen terme à construire (ouverture de nouvelles négociations commerciales, production de davantage de protéines végétales et en particulier la valorisation des jachères…), des plans à plus long terme (plan souveraineté alimentaire, énergétique, agricole, azote…) », liste Arnaud Delestre.

Des dégâts variables face au gel

Comme l’année dernière, le département a été frappé par un épisode de gel les 3 et 4 avril. « Les minimas de ces deux nuits ont été plus bas qu’en 2021. Nous avons ainsi relevé dans notre réseau de stations météo jusqu’à -7°C », assure le président de la Chambre. « Dans les vergers, les dégâts sont très importants mais avec une plus grande variabilité entre les situations qu’en 2021. Les premières estimations font état de 40 à 100 % de dégâts ».
Dans les vignes, les dégâts sont là aussi variables, allant de 10 à 90 % de bourgeons gelés. « Cette diversité de situations s’expliquant par un léger retard de développement en comparaison de 2021. De plus, les conditions météorologiques du mois d’avril ont ensuite été relativement favorables et la végétation a redémarré rapidement ».
Néanmoins, les conséquences finales dans les vignes ne seront mesurables qu’à la fin de la floraison. Avec la sécheresse annoncée qui fait figue d’épée de Damoclès et qui pourrait « avoir un impact plus grave sur les rendements et les jeunes plants » que le gel.
La grippe aviaire était également au cœur des sujets évoqués lors de la session. Si l’Yonne n’est pas touchée directement, « elle n’en reste pas moins impactée par les conséquences d’un confinement pour les exploitations disposant d’élevage plein air (une cinquantaine est concernée dans le département) et par les problématiques d’approvisionnement en caneton et canard prêt à gaver, les élevages naisseurs étant pour beaucoup situés en Pays de la Loire (dans l’Yonne, une quinzaine de producteurs de canards sont présents) », indique Arnaud Delestre.
Enfin, le président de la Chambre a annoncé que les DDT (directions départementales des territoires) « sont en phase de test d’une application qui sera mise en place pour la déclaration PAC 2023 (le système de suivi des surfaces agricoles en temps réel : 3 STR). Par cet outil, l’administration informera chaque exploitant lorsqu’une erreur sera détectée et lui donnera l’opportunité de la corriger. Les erreurs pourront être rectifiées sans générer de pénalités financières à condition de respecter les délais impartis », conclut-il.