Installation
Des choix à faire

Chloé Monget
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Quentin Hecht, 20 ans, va reprendre la ferme familiale à l’Abbaye (Nolay) en mars. Une transmission rendue possible par des choix parfois difficiles à faire.

Des choix à faire
Les bovins de Quentin sont des Charolais non inscrits, et pour les ovins, il va opter pour un mélange : Texel, Ile-de-France, Charmoise, et peut-être du Charollais.

« Je baigne dans ce milieu depuis tout petit. Dès que j’avais du temps libre, je le passais sur l’exploitation avec mon grand-père » détaille Quentin Hecht, prochainement installé à l’Abbaye sur la ferme familiale (105 ha production ovins et bovins viande), avant d’ajouter : « ce métier n’a jamais été une contrainte et, est depuis, devenu une véritable passion ». Mais, pour que son installation soit possible, certains points étaient indispensables.


Un vrai coup de pouce

En effet, Quentin indique : « ma grand-mère voulait absolument que la ferme reste dans les mains de la famille. Pour elle, il était logique de me la transmettre puisque j’y travaille depuis des années. Et, pour m’aider, elle a choisi une transmission à moindres frais pour moi (1) pour le cheptel présent (53 agnelages et 36 vêlages) et le matériel. Sans cela, je pense que mon installation n’aurait pas été possible financièrement et encore moins les divers investissements prévus. En effet, je vais racheter du cheptel pour passer à 300 - 350 agnelages et 45 vêlages. De ce fait, je vais avoir de l’investissement à faire dans les bâtiments, notamment la construction d’une stabulation et aussi la mise aux normes de celui existant. En parallèle je vais investir dans un tunnel, un tracteur et une benne, le tout d’occasion pour réduire un peu le coût ». En plus, Quentin a fait l’acquisition, via la Safer, de 24 ha de terres en plus non loin de l’Abbaye : « Il me fallait des prairies en plus pour que le projet soit complètement viable et je ne voulais pas des terres éloignées afin de pouvoir surveiller mes animaux plus facilement tout au long de l’année ; on ne devient pas éleveur s’il n’y a pas un attachement fort au bien-être animal ».

Lâcher prise

Outre le choix de cette transmission, un autre est entré en ligne de compte pour rendre l’installation de Quentin possible : « je voulais m’installer rapidement pour que ma grand-mère, qui approche des 80 ans, puisse partir à la retraite. Mais, à cause de cette volonté, j’ai dû arrêter mon BTS car je ne pouvais plus assurer à la fois mon travail à la ferme et les cours. Même si je ne regrette pas vraiment, j’aurais apprécié être salarié deux ou trois ans avant de me lancer afin de voir d’autres exploitations. Je pense que s’il y avait un conseil à donner à un jeune ça serait ça : faire ses armes dans autant de fermes que possible. Cela étant, je trouve que pour l’installation les formations proposées par la Chambre sont très utiles et permettent de découvrir des informations ou de faire une bonne piqûre de rappel sur certains points, notamment en comptabilité. C’est indispensable d’y participer, à mon sens ». Même s’il n’a pas eu l’occasion de tester le salariat, Quentin a tout de même une idée bien précise du système qu’il souhaite mettre en place.

Rémunération

Pour ses débouchés, il travaille déjà depuis quelques années avec un boucher d’un village voisin : « nous avons un contrat fixe pour 70 agneaux à l’année. C’est pour cette raison que les 300 à 350 agnelages seront répartis sur trois bandes (en novembre, en janvier et en mars) afin de pouvoir le fournir tout au long de l’année. Question logistique, je livre les agneaux à l’abattoir de Cosne, puis ce dernier s’occupe de la livraison et c’est le boucher qui prend en charge les frais d’abattage. Pour moi, ce système n’a que des avantages : assurer un revenu fixe à l’exploitation, faire le moins de kilomètres possibles avec les animaux, fournir un artisan local et offrir aux consommateurs une viande locale. J’aimerais d’ailleurs trouver un autre boucher pour avoir un autre contrat de ce type ; ce qui est nettement plus rassurant que les prix variables des marchés. Pour le reste des ovins, et aussi pour les bovins - vendus maigres (350 kg) ou en vaches rafraîchies - ils partent à la coopérative ou aux négociants ». Il ajoute : « Même si la conjoncture n’est pas forcément favorable pour les consommateurs, je suis persuadé qu’ils préfèrent mettre un peu plus d’argent dans un produit local car ils savent d’où il vient. Aujourd’hui, il y a une vraie demande sur la traçabilité des denrées, et je pense que cela est bénéfique pour la relation entre producteurs et clients. La transparence doit être totale afin que les échanges soient sains ». Il conclut : « Pour le moment, je n’ai pas d’autres projets en tête car je veux m’assurer que mes choix pérennisent l’exploitation. En somme, je reste prudent ».

(1) Les parties interrogées n’ont pas souhaité préciser le type de transaction.