Évolution
Le solaire plus accessible aux Cuma

P. Olivieri
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Depuis novembre 2022, les Cuma peuvent investir en propre dans un bâtiment de stockage de matériel avec centrale photovoltaïque sans passer par une SAS.

Le solaire plus accessible aux Cuma
De gauche à droite, Camille Talon (Gac EN), Jean-Louis Miallet, Pierre Modenel, Christophe Rouches, Stéphane Cusset, Jean-Benoît Bonal et Gisèle Gonthier (FDCuma) sur le site du futur bâtiment.

Soixante-dix adhérents et quasiment autant de matériels (52 recensés cette année) : créée en 1980, la Cuma du Puy de Banes, dans le Cantal, qui rayonne sur Pailherols et ses environs, à l’Est d’Aurillac, a vu au fil des ans son parc s’enrichir au point de ne plus pouvoir héberger chez ses membres tous les outils de travail du sol, épandeurs, bétaillères, plateaux-fourrages, round-ballers, pelleteuse, rouleau semeur, broyeur, gyrobroyeur et autre épareuse, dont certains modèles ont été achetés en double, voire triple, pour répondre à la demande des adhérents de cette Cuma dynamique qui ne connaît pas la crise du renouvellement ni des vocations… mais celle du logement. Ces derniers temps, avec l’accroissement de la taille des matériels, il a fallu se résoudre à en laisser certains dehors…

Plus besoin de SAS

Un bâtiment de stockage : bien sûr, l’idée circulait depuis une paire d’années dans les discussions de la Cuma, « mais on était freiné par le coût et donc le financement, et on avait aussi du mal à trouver le terrain, sachant que ça passait forcément par un projet avec du photovoltaïque sur le toit », relate Pierre Modenel, président de la Cuma, qui a vu en 2022 les planètes s’aligner favorablement. D’abord avec la décision de l’État de prendre à sa charge 60 % du raccordement des centrales photovoltaïques au réseau EDF, décision concomitante avec une remontée du tarif de rachat du kilowatt heure, soumis à une baisse sévère depuis 2020 (1). Troisième élément à avoir emporté définitivement la décision des cumistes du Puy de Banes : une évolution juridique des statuts des Cuma leur permettant de mettre en place et gérer sur leurs biens immobiliers des installations destinées à la production d’énergie, photovoltaïque compris. « Jusqu’à présent, les Cuma désireuses de se doter d’un bâtiment avec toiture couverte en panneaux photovoltaïques avaient trois options, explique Gisèle Gonthier, animatrice à la FDCuma : passer par un tiers investisseur qui loue le bâtiment à la Cuma pour abriter son matériel, cette dernière en devenant propriétaire à la fin du bail ; investir elle-même dans le bâtiment avec deux possibilités : louer la toiture à un tiers investisseur pour le volet photovoltaïque ; ou bien la gérer elle-même en créant une société (SAS) dédiée, un montage complexe. Intérêt de s’affranchir de cette constitution de SAS : au bout de 15 ans, durée moyenne d’amortissement de la centrale, les fruits de la vente d’électricité pourront être réinvestis dans la Cuma».

Des revenus dans 15 ans

Accompagnés par la FDCuma dans le cadre d’un Dina (2), Pierre Modenel, épaulé par Jean-Louis Miallet, son vice-président, et son équipe, ont pu bâtir et affiner leur projet : un terrain de 3 000 m2 situé sur des biens communaux à Brommet, répondant aux prérequis de la Cuma (terrain plat, en bordure de route, avec des abords déjà aménagés…), est en cours d’acquisition pour la modeste somme de 3 000 €. « La mairie a joué le jeu, le maire est un agriculteur et il est content que le bâtiment se fasse sur sa commune », souligne Jean-Louis Miallet. Le bâtiment, dont les plans ont été conçus par la Sica Habitat rural, s’étendra sur 1 480 m2 (63 m de long sur 24 de large) avec un budget de 220 000 € HT, qui devrait prétendre à 105 000 € de subvention du PDR Cuma. Il supportera une installation d’environ 1 500 m2 de panneaux photovoltaïques d’une puissance de 320 kWh dont le coût devrait avoisiner les 200 000 € HT. Avec un revenu annuel issu de l’énergie photovoltaïque de 14 000 €, et un emprunt sur 15 ou 18 ans à 4,15 % (soit une annuité de l’ordre de 12 500 €), « il devrait nous rester autour de 1 500 et 2 000 € par an », qui pourront être réinvestis dans la Cuma, tout comme les 14 000 € annuels une fois l’emprunt intégralement remboursé. « Les jeunes qui sont là aujourd’hui pourront faire évoluer le bâtiment s’ils le souhaitent, l’agrandir, y adosser un atelier, une salle de réunion », fait valoir Jean-Louis Miallet. Pour l’heure, la Cuma est dans l’attente du devis de raccordement d’Enedis (bâtiment à 400 m du transformateur) qui pourrait approcher les 22 000 €. « On devrait être fixé dans l’été, sachant qu’on est dans l’idée d’attaquer les travaux de construction au printemps prochain, l’objectif étant que le délai soit le plus court possible entre la construction et le raccordement pour ne pas avoir trop de trésorerie à avancer », explique Pierre Modenel. Comme la Cuma du Puy de Banes, quatre autres coopératives se sont lancées en 2023 dans le Cantal dans un projet bâtiment avec photovoltaïque : Cuma de la Soulane (Saint-Illide), Cuma des Trois granges (Apchon), Cuma du Puy de Pagros (Andelat) et Cuma Haute de Cère (Thiézac).

Notes : (1) 0,60 €/kWh en 2010 pour les installations de plus de 100 kW, 0,12 € aujourd’hui.
(2) Dispositif national d’accompagnement des projets et initiatives : trois jours d’accompagnement stratégique par un conseiller Cuma pris en charge par l’État.