« Nous voudrions enfin arrêter de travailler complètement »
La ferme du port Aubry à Cosne-sur-Loire est en place depuis des décennies avec aux commandes : Clément Melet comme gérant Bernard Robin est à la retraite depuis le mois de novembre 2021, Emmanuel et Marguerite Melet sont en retraite mais travaillent toujours comme salariés pour assurés une hypothétique transmission. Pour ces derniers, installés depuis 1976, trouver un repreneur relève du parcours du combattant.

« Nous sommes en retraite. Mais, dans la vie réelle, pas complètement » souligne Emmanuel Melet (66 ans), désormais salarié de la Ferme du port Aubry mais toujours propriétaire, avec sa femme Marguerite (63 ans) qui précise : « Cela fait 5 ans que nous pensons à transmettre, mais pour le moment nous n’avons pas de repreneur ». Bernard Robin (63 ans) beau-frère d’Emmanuel, et auparavant responsable des céréales vient de céder cette dernière partie à Clément Melet.
Des visites non concluantes
« Nous avons fait visiter l’exploitation à diverses personnes… Mais, à chaque fois cela ne va pas, car ils ne prennent en compte qu’un seul pan de l’entreprise, Ici, c’est un ensemble qu’il faut prendre en compte » détaillent Clément, Emmanuel et Marguerite. En sus des 70 ha de prairie à récolter pour nourrir les chèvres, « nous faisons tout de A à Z : nous pansons les 500 chèvres, nous faisons la traite matin et soir (tous les jours de l’année), nous réalisons le fromage, nous le vendons à la ferme et chez des grossistes… nous organisons des événements et accueillons le public… Clément, le gérant, doit aussi gérer une dizaine de collaborateurs – dont 7 permanents. Tout est complémentaire entre les prairies proches des bâtiments pour les animaux, la fromagerie attenante à la chèvrerie, la boutique qui propose aussi l’ensemble des produits locaux de la région et surtout la ville de Cosne où les gens peuvent même venir à pied du centre-ville. Tout cela en pleine appellation du Crottin de Chavignol. La ferme du Port Aubry est un peu la ferme de la ville de Cosne sur Loire où chacun des habitants peut retrouver son histoire depuis les années quarante, à l’arrivée du grand-père Ernest et de la grand-mère Odette d’Emmanuel, lorsqu’ils vendaient le lait de leurs vaches aux habitants de Cosne. Cette complémentarité permet à la ferme de tirer un revenu correct pour ses propriétaires et les 10 salariés qui y travaillent tout en permettant à tous de prendre week-end et congés en suivant une organisation minutieuse ».
Les traits du prochain
Du fait de cette structure particulière, Emmanuel et Marguerite ont une idée en tête : « Nous ne voulons pas mettre le repreneur en difficulté si nous savons qu’il ne correspondra pas. Par cela, nous pensons aussi aux collaborateurs pouvant perdre leur emploi si la reprise se fait mal. Nous ne voulons pas que l’entreprise disparaisse que ce soit pour eux, pour nos clients et pour nos fournisseurs nombreux localement ». Ils ont déjà une esquisse de qui pourrait prendre la suite : « Il y a trois profils possibles comme celui du chef d’entreprise sachant gérer une équipe et des moyens pour faire fonctionner le tout afin de tirer des bénéfices. Ce peut aussi être un couple se répartissant les tâches, à l’image de ce que nous avons fait durant toutes ces années. Enfin, cela peut être l’association de plusieurs agriculteurs. Dans tous les cas, il faut être polyvalent ».
Incompréhension et aide
« On ne comprend pas pourquoi personne ne veut ou peut reprendre. Sans doute la ferme du Port Aubry est hors des recherches des futurs agriculteurs potentiels. E t loin ou méconnus de personnes qui veulent réorienter leurs vies. On finit par perdre espoir… Mais on continue à travailler quand même. D’ailleurs, si le repreneur le souhaite, nous pouvons (en étant salarié quelques heures) l’accompagner dans les premiers temps pour les périodes les plus délicates. Nous mettons aussi le gîte situé sur la ferme dans la reprise, afin que l’acheteur puisse habiter sur place. Nous essayons de tout faire pour faciliter l’installation ». Afin que les acheteurs aient une vision d’ensemble de l’entreprise, Bernard, Emmanuel et Marguerite ont obtenu l’aide de la Chambre d’Agriculture de la Nièvre : « Christophe Bossaron, conseiller transmission, a réalisé un diagnostic, qui est une présentation détaillée avec des références sur 15 à 20 ans, avec les bons et les mauvais côtés. Il est important que les personnes intéressées sachent tout. Nous ne désirons qu’une seule chose : que la ferme continue à vivre et prospérer ». Les associés du Port Aubry trouvent d’ailleurs que le dossier établi par Christophe Bossaron (03 86 93 40 47 ; mail : christophe.bossaron@nievre.chambagri.fr) est particulièrement clair et donne une très bonne vision de l’entreprise aussi bien pour son état matériel que pour une vision de la reprenabilité.
La ferme du Port Aubry c'est...

400 000 euros de chiffre d’affaires pour la boutique et plus de 800 000 euros de chiffre d’affaires pour les chèvres
70 000 visiteurs par an
20 000 tickets de caisse par an fait à la ferme
500 chèvres
Un cadre de vie facilité avec un accès aux écoles, services et commerces divers, à moins de 2 km de Cosne-sur-Loire et de l’accès à l’autoroute.
Bons baisers de Port Aubry

« Ce sont les grands-parents d’Emmanuel qui ont habité en premier dans la maison. Ils sont arrivés dans les années quarante pour aider à défendre le pont pendant la Guerre. Ils ont repris cette ferme en produisant du lait de vache. Nous l’avons repris lorsqu’ils sont partis à la retraite en 1976 » raconte Emmanuel. Marguerite poursuit : « Comme nous n’avions pas beaucoup de moyens, nous avons acheté la ferme, petits bouts par petits bouts. La première année, en 1976, nous avons subi la grande sécheresse, c’est à partir de là que nous avons décidé de nous lancer dans les chèvres au début des années quatre-vingt. Nous avons eu l’obligation et la force de nous adapter, et c’est quelque chose que nous avons toujours fait. Nous voulions ouvrir la ferme et c’est assez naturellement que nous avons commencé à faire des rencontres, des visites des journées Portes Ouvertes, spectacles ou encore des projections en plein air avec notre associé Bernard ». Emmanuel souligne : « On est très fier de la ferme. Elle fait vivre plus de 10 familles et nous ne voudrions pas la voir dépérir mais il va falloir que nous cédions nos parts à un moment ». Avec ce sentiment de vouloir tourner une page de leur vie, les deux époux désirent « enfin arrêter de travailler ». Ainsi Marguerite rêverait de pouvoir marcher dans les Alpes, et Emmanuel repartir faire de la plongée et ils aspirent aussi partir voir leurs 5 enfants, 9 petits-enfants et même leurs 2 arrière-petites-filles.