Les perturbations multiples de l’économie survenues ces trois dernières années pousse l’assureur à repenser son développement économique, entre retour de l’inflation et réforme de l’assurance récolte.

Bilan d'activité Groupama
De gauche à droite : Didier Guillaume, directeur général de Groupama Grand-Est, François Schmitt, son président et Francis Bournigal, directeur-général adjoint et directeur financier.

Il y a encore trois ans, si on avait dit aux dirigeants actuels de Groupama Grand-Est (1) dans quel contexte ils allaient devoir piloter aujourd’hui cette entité mutualiste forte de 1 540 salariés, ils ne l’auraient sans doute pas cru. Et pourtant, là comme dans bien d’autres domaines, les cartes se rebattent, entre redémarrage économique d’après-pandémie et grandes incertitudes liées à la situation internationale. À présent, comme le résume François Schmitt, président du conseil d’administration de l’assureur « il faut réapprendre ». Réapprendre à travailler et prévoir alors que l’inflation fait son grand retour. Apprendre à faire avec le changement climatique qui est tout sauf une vue de l’esprit. Intégrer une approche très élargie de la prise en compte du risque climatique sur les récoltes agricoles… Alors que l’assemblée générale de Groupama Grand-Est allait se tenir, le 13 mai à Dijon, l’heure n’était vraiment pas au « C’était mieux avant », mais surtout à la manière d’aborder les années qui viennent.

Vigilance sur les fondamentaux

« Depuis trois ans, nos certitudes ont été remises en cause par les évènements » poursuit François Schmitt. « Pour 2022 et les années qui suivent, renchérit Didier Guillaume, le directeur général de l’entité, le défi va être de conserver un bon rapport qualité prix dans un environnement économique compliqué. Cela se fera en restant vigilant sur nos fondamentaux : gros travail sur la prévention et maîtrise des coûts… » Et cela à périmètre de service égal puisqu’il n’est pas question de remettre en cause l’une des forces de Groupama Grand-Est : sa présence sur le territoire, au travers de ses 175 agences. En 2020, du fait de la crise sanitaire, l’assureur avait fait des « gains techniques » : mathématiquement, la diminution des déplacements en voiture en raison du confinement avait réduit la sinistralité et donc le versement d’indemnisations. Néanmoins, Didier Guillaume rappelle que, très tôt dans ce contexte particulier, l’entreprise avait affirmé ne pas vouloir faire de gains sur le Covid. « Cela s’est traduit par la redistribution à nos clients de 18 millions d’euros, dont 6 millions rien que pour les assurances de véhicules, sous forme de remises commerciales. Concrètement, c’était une remise de 25 euros par contrat ». Une partie des fonds redistribués a aussi servi à la contribution au plan de soutien à l’économie du gouvernement.

Question centrale des risques climatiques

En 2021, le chiffre d’affaires de Groupama Grand-Est sur les assurances Incendies, accidents et risques divers (IARD) s’est monté à un peu plus de 645 millions d’euros, en progression de 3,1 %. Le résultat net social, à 14,1 millions d’euros, est en baisse par rapport à 2020, notamment en raison d’un niveau d’indemnisation logiquement en hausse par rapport à 2020, du fait du retour à une activité plus normale, une fois le gros de la pandémie passé. On peut noter une hausse des sinistres en matière de santé, liée à la mise en place du reste à charge zéro. Le chiffre d’affaires sur les produits d’assurance-vie approche 137 millions d’euros. La question des risques climatiques fait partie des enjeux centraux pour l’avenir des métiers de l’assurance. Elle concerne les risques pesant sur les productions agricoles (voir encadré) mais aussi ceux concernant les biens immobiliers ou les véhicules, dans le cas de tempêtes violentes et dévastatrices. Les dirigeants de Groupama Grand-Est constatent l’aggravation inéluctable de ce risque, à mettre en lien avec l’augmentation des prix de certains matériaux de construction. L’inflation à l’œuvre aura aussi un impact à l’avenir, sur les conditions d’indemnisation. C’est dans ce contexte que l’assureur se fixe un objectif commercial ambitieux : atteindre les 400 000 sociétaires sur sa zone à la fin 2023. Fin 2021, 2 800 de plus avaient choisi Groupama Grand-Est.

 

Note de bas de page : (1) Groupama Grand-Est, dont le siège est à Strasbourg, couvre les départements de Côte-d’Or, de Haute-Saône, du Doubs, du Territoire de Belfort, du Jura, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, de la Haute-Marne, de la Meurthe-et-Moselle, de la Meuse, de la Moselle et des Vosges.

En chiffres

Groupama Grand-Est, c’est :

- 2 956 élus

- 1540 salariés

- Chiffre d’affaires IARD : 645,1 millions d’euros

- Une charge de sinistre de 419 millions d’euros, en hausse de 32,1 millions d’euros comparé à 2020

- Un objectif de 400 000 clients-sociétaires fin 2023

- Résultat net social 2021 : 14,1 millions d’euros

Changement de paradigme dans l'assurance-récolte

En 2021, la caisse régionale Groupama Grand-Est a été relativement épargnée concernant les dégâts sur des récoltes. Un constat qui peut surprendre alors que l’épisode de gel du printemps 2021 est resté dans les mémoires. Mais, à l’échelle de la zone Grand-Est, il est à relativiser. « Les dégâts ont très rarement dépassé la franchise » souligne François Schmitt. 40 millions d’euros ont été versés en indemnisations en lien avec des sinistres climatiques mais seule la moitié de cette somme concerne des récoltes agricoles. L’autre moitié était liée à des dégâts sur des habitations ou des véhicules, à la suite d’orages violents ou de tempêtes. Il n’en reste pas moins que pour l’assureur, la question de l’assurance multirisques climatique est aujourd’hui centrale. « Cette assurance est en place depuis 2005, rappelle François Schmitt, et jusqu’en 2011, la sinistralité dans ce domaine a été contenue. Mais, depuis 2012, on constate une dégradation et, depuis 2016, nous ne parvenons pas à rétablir les équilibres, en raison de nombreux épisodes de gel ou de sécheresse. La réforme qui s’annonce était donc indispensable, a fortiori aujourd’hui, alors que se pose de manière aiguë la question de l’autonomie alimentaire. Cette réforme, nous l’aurons réussie si nous augmentons la part des surfaces assurées de 30 %. Cela équivaudrait à un doublement des surfaces assurées en grandes cultures et en arboriculture ». Cette fameuse réforme doit entrer en vigueur au 1er janvier 2023. « Nous avons milité, poursuit le président de Groupama Grand-Est, pour qu’un pool d’assureurs soit créé et nous allons partager nos données au sein de ce pool. Nous sommes convaincus que c’est ensemble que l’on doit piloter cette réforme. Nous sommes conscients qu’en partageant nos données nous faisons entrer le loup dans la bergerie, mais nous y sommes prêts ». L’acte n’est pas anodin pour un assureur qui, jusqu’à présent, concentrait entre 55 et 60 % des surfaces assurées mais la situation réclame une réponse hors normes. « Cette réforme ne réussira, conclut François Schmitt, que si nous augmentons la diffusion de l’assurance-récolte. Mais la cotisation doit demeurer acceptable, il faudra donc que la solidarité nationale s’exprime pour accompagner les agriculteurs dans cette voie ».

Un renfort apprécié en matière d'expertise

Groupama Grand-Est fonde une grande partie de sa crédibilité sur la proximité et le réseau de ses élus. Dans ce cadre, le développement d’un réseau de sociétaires bénévoles qui sont sollicités pour établir des rapports dans le cas de sinistres est apprécié. Ils sont 250 à officier de la sorte sur les douze départements couverts par la caisse régionale (dont 26 en Côte-d’Or). C’est un ensemble qui intervient en complémentarité des inspecteurs salariés de l’entreprise et qui garantit une plus grande réactivité.