Un nouveau pastoralisme
Un berger itinérant, entre Bourgogne et Beaujolais

Johan Nusbaumer, est né et a grandi à Genève. D’origine jurassienne, il a travaillé dans l’ingénierie civile avant de se tourner vers son métier actuel : berger itinérant. Accompagné d’une roulotte construite en Saône-et-Loire, il nous raconte le parcours qu’il suit depuis 2014, d’abord sous une tente puis avec sa cabane mobile.

Un berger itinérant, entre Bourgogne et Beaujolais
Johan Nusbaumer et sa roulotte-tiny qui l'accompagne dans ses transhumances.

Avant sa reconversion, Johan Nusbaumer était dessinateur dans le génie civil du bâtiment à Genève et Besançon. C’est l’envie de retourner aux choses essentielles qui lui donne la motivation de quitter son mode de vie d’alors. L’agriculture résonnait en lui. « Mon père m’a toujours sensibilisé à avoir des animaux et à faire des camps dans les bois », se souvient-il, « j’avais envie d’un métier qui a un sens en lui-même ». Les brebis arrivent par hasard : après sa démission, Johan fait du woofing (il offre sa force de travail au sein d’une ferme en échange du gîte et du couvert) et des stages sur des exploitations. Il passe du temps dans le Jura avec un troupeau de brebis transhumant qu’il suit pendant un hiver à la belle étoile sous la tente, « ça m’a donné l’amour des brebis ». Il s’investit dans ce domaine en tant que stagiaire puis salarié dans une ferme avec un troupeau de 1 800 mères.

De la tente à la roulotte-tiny

En 2014, Johan s’installe dans le Beaujolais grâce à des relations familiales du coin. Avec seulement ses 100 mères comme propriété, il était totalement en itinérance avec son troupeau, sa tente, ses chiens et son matériel. Il pâturait sur une zone protégée, gérée par le Conservatoire d’espaces naturels (CEN) Rhône-Alpes et un autre organisme : les landes sommitales du Beaujolais. De ce fait, des visites, contrôles, aménagements prenaient place avec les gestionnaires du site. Lors d’une visite officielle, il y a environ cinq ans, les acteurs ont décidé de lui garantir un logement décent. Pour cela, au départ, il a eu l’idée d’une cabane de berger fixe. Cependant, étant sur une réserve naturelle, il était compliqué d’avoir une autorisation pour ce genre de construction dans ce milieu protégé. Est donc venue l’idée d’un habitat mobile, qui, en plus, correspond à l’esprit du troupeau. Plusieurs échanges ont eu lieu avec les acteurs et Johan sur ses besoins et ceux des animaux ainsi que sur l’aménagement pour permettre à la roulotte d’être mobile. Ne touchant pas le sol, une fois qu’elle est déplacée, la nature reste protégée et inchangée. En Saône-et-Loire, le fabricant de roulottes Manu Chavance, installé à La Vineuse-sur-Frégande, près de Cluny, s’est occupé de la construction : le terme « tiny house », à l’époque n’était pas répandu comme aujourd’hui. Ce fut donc une construction ayant l’aspect d’une roulotte mais posée sur un châssis de tiny, la rendant plus maniable. Pour Johan, cette habitation, c’est « le Graal. C’est confortable comme une maison, aménagé et fonctionnel, et le matériel utilisé est sain ».

Quelle utilisation avec le troupeau ?

À l’aide de son tracteur, Johan emporte son habitation sur le secteur à pâturer. Il installe ses affaires et fait ensuite suivre le troupeau, parfois, c’est le chemin inverse qu’il fait. Aujourd’hui, sa situation a bien changé par rapport à ses débuts d’itinérant. Il a commencé son installation avec très peu de moyens, mais maintenant il loue une maison dans le Beaujolais, avec sa roulotte sur le terrain. Avoir un point fixe est plus facile à concilier avec une vie de famille et du matériel de plus en plus important. Sa roulotte le suit lorsqu’il va sur les sommitales ou lorsqu’il va pâturer sur un endroit trop éloigné de chez lui. À présent, de mi-juin à mi-octobre, Johan pâture en Savoie où il dispose cette fois-ci une cabane de berger fixe. De mi-octobre à mi-novembre, il est sur les hauteurs et redescend dans les alentours de Beaujeu, entre Mâcon et Villefranche-sur-Saône, pour l’agnelage. Ses bêtes pâturent dans les prés, vignes, zones abandonnées jusqu’à fin février. Et puis, dès début mars, il remonte sur les crêtes jusqu’à la montagne savoyarde.