Autonomie alimentaire
Démonstration de toastage de graine protéagineuses

Marc Labille
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Des éleveurs bressans ont fait venir la Cuma nivernaise Terr’Eau pour une démonstration de son toasteur de graines de protéagineux. L’occasion de découvrir ce procédé qui, dans une optique d’autonomie alimentaire, permet d’optimiser la valorisation des graines riches en protéines.

Démonstration de toastage de graine protéagineuses
Venu de Moulins-Engilbert, dans la Nièvre, Hervé Mouron a assuré lui-même la démonstration du toasteur de la Cuma qu’il préside.

La fédération Cuma Bourgogne-Franche-Comté a organisé récemment une démonstration de toastage de graines de protéagineux à Juif, en Saône-et-Loire, près de Louhans. L’idée a germé en 2020 lors d’une assemblée générale des Cuma où le thème de l’autonomie protéique avait été développé avec la présentation de la Cuma Terr’Eau de la Nièvre. Séduits par le principe d’une meilleure valorisation des protéines locales, les éleveurs bressans ont eu envie d’imiter leurs collègues nivernais. Avec le souhait d’être moins dépendant du soja sud américain et de produire eux-mêmes leurs protéines sur leurs exploitations, expliquait David Cornier, représentant de la fédération Cuma Bourgogne-Franche-Comté. « Un projet qui prend tout son sens dans une région productrice de soja, à l’heure de la flambée des cours des matières premières et alors que Danone impose 100 % de protéines françaises dans son cahier des charges », rappelait le responsable bressan.

Pour des graines riches en protéines

Le toastage consiste à chauffer les graines de protéagineux à 280 degrés (110 degrés à cœur). « Ce chauffage provoque un tannage des protéines ce qui améliore leur digestibilité chez les ruminants, limitant ainsi un gaspillage de leur azote soluble », expliquait Denis Chapuis de la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. Le toastage a aussi pour effet de détruire les facteurs anti-nutritionnels naturellement présents dans les graines de protéagineux. Un préalable indispensable pour les animaux de type monogastrique comme le porc ou les volailles. Enfin, le procédé assèche les graines, d’où la possibilité de les stocker jusqu’à au moins six mois malgré une teneur en matière grasse élevée. Entières, les graines toastées peuvent être broyées, laminées ou aplaties. « Si le toastage est ouvert aux graines de soja, féverole, pois, lupin, il est tout de même recommandé de le réserver à des protéagineux riches, étant donné le coût de la technique », prévient Denis Chapuis. Avec respectivement 35 et 25 % de teneur en matière azotée totale, ce sont le soja et la féverole qui sont les plus intéressants.

Un débit de 2 tonnes à l’heure

La Cuma Terr’Eau a vu le jour en 2001 avec une activité de compostage. En 2007, elle se diversifiait dans le déchiquetage en bois plaquettes. L’activité toastage a été lancée en 2019. La Cuma est équipée d’un toasteur qui a coûté un peu plus de 140 000 € TTC, subventionné à hauteur de 50 000 €. Autonome et transportée sur une remorque plateau tirée par un tracteur, la machine se compose d’un groupe électrogène, d’un brûleur au fioul qui fournit la chaleur au toasteur proprement dit. À l’intérieur, les graines sont soufflées par de l’air porté à 280 degrés. Le débit moyen du chantier est de 2 tonnes par heure. La Cuma fournit à l’adhérent la machine ainsi que son chauffeur. Sur place, l’agriculteur fournit les graines de protéagineux ainsi qu’une benne pour recevoir les graines toastées. Il existe deux modalités d’adhésion à la Cuma : en inter-Cuma ou avec prise de 200 € de parts sociales au premier chantier. Le tarif est ensuite de 110 € par heure de toastage. Née sous l’impulsion d’éleveurs allaitants désireux de rendre leurs exploitations plus autonomes vis-à-vis de l’alimentation, l’activité toastage concerne aujourd’hui une vingtaine d’utilisateurs dans la Nièvre et les départements limitrophes pour plus de 400 tonnes de graines toastées. « Toujours en hausse, le volume d’activité dépasse le seuil de rentabilité prévisionnel », confiaient les responsables de la Cuma Terr’Eau.

Président de la Cuma Terr’Eau, Hervé Mouron exploite 260 hectares dans la Nièvre, à Moulins-Engilbert, où il élève un troupeau de 180 vaches allaitantes et cultive une centaine d’hectares. Dans la quête d’autonomie et dans un secteur où se côtoient de l’élevage et des grandes cultures, « le but de notre Cuma est de créer une filière dans laquelle des céréaliers vendent des protéagineux aux éleveurs, en limitant les coûts de transport », explique-t-il. Dans son cas, les graines toastées sont destinées principalement aux broutards repoussés. « Un pois toasté équivaut à un concentré de type VL 30 (70 % d’orge – 30 % de soja). L’aliment que je produis moi-même me revient à environ 240 €/tonne alors qu’un concentré acheté me coûterait 350 € ! ». Avec son concentré fermier aux pois toastés, les broutards d’Hervé Mouron réalisent un GMQ moyen de 1,6 kg par jour pour 420 kg vifs. L’agriculteur produit lui-même une partie de ses graines protéagineuses avec 10 ha de pois et 7-8 ha de féveroles.