Chronique juridique
Chronique juridique sur l'alcool au travail

Victoria Legal
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Selon l’Institut national de recherche et de sécurité, le risque d’accident du travail grave est multiplié par 2 chez les hommes consommant au moins 4 verres d’alcool par jour, et chez les femmes consommant au moins 2 verres par jour. 15 % des accidents du travail surviennent chez des personnes présentant un taux d’alcoolémie supérieur au taux légal. Comment l’employeur doit-il appréhender l’alcool au travail ?

Le Code du travail prévoit le principe suivant : « Aucune boisson alcoolisée n’est autorisée sur le lieu de travail » (Art. R4228-1). De la même manière, il dispose que l’employeur ne doit pas laisser entrer ou séjourner dans l’établissement des personnes en état d’ivresse (Art. R4228-2). Une tolérance est toutefois mise en place concernant certaines boissons alcoolisées. En effet, le vin, la bière, le cidre et le poiré sont autorisés sur le lieu de travail sauf dispositions contraires dans le règlement intérieur.

Les marges de manœuvre de l’employeur

Si l’introduction de certaines boissons alcoolisées dans l’entreprise est possible, l’employeur peut, pour des raisons de santé ou de sécurité, prévoir dans le règlement intérieur ou par note de service une limitation de leur consommation, voire une interdiction, ces mesures devant être proportionnées au but recherché. Une interdiction générale doit être exceptionnelle et ne peut être fondée que par l’existence d’une situation particulière de danger ou de risque. L’employeur peut également réaliser un contrôle d’alcoolémie sous certaines conditions. Il ne peut être admis que s’il est prévu par le règlement intérieur. Ainsi, la clause du règlement intérieur prévoyant la soumission à l’éthylotest se justifie si les modalités de ce contrôle en permettent la contestation et si, en raison de ses fonctions, l’état d’ébriété du salarié est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger. En effet, une obligation de sécurité incombe à l’employeur. Cela signifie qu’il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés. Ainsi, l’employeur doit prévoir les modalités selon lesquelles il peut restreindre la consommation de boissons et d’alcool. À défaut, il pourrait voir sa responsabilité civile et pénale engagée en cas d’accident du travail notamment pour faute inexcusable.

La sanction du salarié

Dans le cadre de la consommation d’alcool sur le lieu de travail, et de l’état d’ivresse d’un salarié, il est possible, pour l’employeur, et dans certains cas, de recourir au licenciement pour faute grave. En effet, la faute grave s’entend d’une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Ainsi, la faute grave a été retenue à l’encontre d’un salarié ayant consommé par deux fois de l’alcool jusqu’à l’ivresse, ce qui l’avait empêché d’effectuer correctement son travail. De la même manière, si le salarié consomme de l’alcool dans le cadre de sa vie personnelle et qu’il se trouve toujours sous l’emprise de cette consommation pendant l’exercice de ses fonctions, un licenciement pour faute reste possible dans les mêmes conditions que si l’alcool avait été consommé aux temps et lieu de travail. En matière de licenciement, la faute grave ne dispense pas l’employeur de respecter la procédure de licenciement (convocation, entretien, notification du licenciement). En revanche, elle prive le salarié du préavis et de l’indemnité de licenciement. Attention, avant toute prise de décision, il convient toujours pour l’employeur de vérifier l’adéquation de la sanction à la faute en fonction des circonstances (principe de proportionnalité de la sanction aux faits reprochés). N’hésitez pas à contacter un service juridique pour échanger sur la situation et apprécier l’ampleur des faits reprochés au salarié.