Portrait
Des vignes au camion de pompier

Christopher Levé
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Vigneronne dans la vie de tous les jours, Delphine Dupont délaisse parfois les bottes et le sécateur pour revêtir l'uniforme bleu et rouge, des pompiers volontaires. Une fonction qu'elle occupe depuis 12 ans, à la caserne de Vézelay. Rencontre.

Pompier
Delphine Dupont, femme pompier volontaire et viticultrice à Saint-Père (photo : Caserne des pompiers de Vézelay).

Il n’y a pas que pour la journée internationale des droits des femmes qu’il est important de mettre les femmes à l’honneur. À Saint-Père, Delphine Dupont a la particularité de conjuguer son métier de vigneronne avec une activité de femme pompier volontaire.
Installée depuis 2009, Delphine Dupont, 43 ans, est la gérante du domaine Dupont Yves et Delphine. « Ma famille fait du vin depuis plusieurs générations, mais aussi des cultures. Moi, j’ai fait des études viticoles, j’ai un peu travaillé sur Chablis et en Côte-d’Or, avant de revenir au domaine familial dans le but de développer toute la partie viticole. Petit à petit, la partie agricole a été réduite. Elle est aujourd’hui infime, il nous reste seulement quelques parcelles en luzerne, pour un collègue agriculteur ».
Sa volonté était aussi de développer la commercialisation et l’œnotourisme, au sein du domaine. « On a fait un caveau dans une ancienne étable du XIXe siècle à l’entrée du domaine où j’essaie de développer la partie dégustation de vin en groupe. Cette année, on va peut-être mettre en place des dégustations directement au cœur des vignes », de quoi profiter pleinement du cadre idyllique du Vézelien.

Savoir se rendre disponible

Et depuis 12 ans, Delphine Dupont est femme pompier volontaire à la caserne de Vézelay, au grade actuel de Caporal-chef. « Comment j’en suis venue à devenir femme pompier volontaire ? Un jour j’ai reçu une proposition du chef de centre de Vézelay, le Lieutenant Culliere, qui est menuisier et qui avait fait des travaux au domaine. Il m’a invité à venir voir comment cela se passait à la caserne. Cela m’a beaucoup plu et tout cela s’est enchaîné très vite », raconte-t-elle.
Pour devenir sapeur-pompier volontaire, il est nécessaire de suivre des formations au préalable. « On voit la partie secourisme, la partie incendie… Toutes les formes d’intervention sur lesquelles peuvent intervenir les pompiers », précise Delphine Dupont.
Pour elle, cette activité est « un complément de vie dans lequel j’ai réussi à trouver un équilibre. Comment j’arrive à conjuguer cela avec mon métier ? Comme je peux », rit-elle. « À la caserne, on a des roulements pour les astreintes, qui durent une semaine, toutes les nuits, week-ends compris. Lorsque je suis d’astreinte, je m’arrange pour être disponible, ne pas être trop loin en cas d’appel pour une intervention. Mes parents m’aident les week-ends, sur la partie œnotourisme, si jamais je dois m’absenter. Cela arrive de temps en temps, je m’arrange toujours pour que quelqu’un puisse venir me remplacer au domaine ». Car lorsque le bip retenti, « il faut pouvoir stopper immédiatement ce qu’on est en train de faire et partir ».
En tant que vigneronne, Delphine Dupont doit toutefois faire « une pause » dans ses disponibilités durant quelques périodes cruciales de son métier dans l’année, comme pendant les vendanges. « À la caserne, on essaye toujours de s’arranger entre nous, de se remplacer les uns, les autres, lorsqu’il y a des impératifs professionnels. On est tous des pompiers volontaires, alors on comprend tous les obligations de chacun. On a tous des métiers avec des contraintes propres à chacun ».

Un plus pour sa vie quotidienne

Delphine Dupont voit cette activité comme un vrai plus, dans sa vie quotidienne. « Cela me permet de prendre du recul sur beaucoup de choses du quotidien, de ne pas prendre les choses inutiles à cœur. Je relativise sur plein de choses depuis que je fais cette activité », assure-t-elle. « Il faut aussi être prête à tout, à tout voir. Mentalement, il faut être armé, capable d’encaisser les pires scénarios ».
Il est nécessaire d’être également prêt physiquement. « C’est important de s’entretenir un minimum au quotidien. En tant que vigneronne, je fais un métier physique, donc j’ai un avantage là-dessus », sourit-elle, « même si je ne me suis jamais posé la question de savoir si mon métier était un atout ou non, d’un point de vue physique, pour être femme pompier volontaire. Je pense que j’ai une meilleure résistance aux conditions climatiques, étant habituée à travailler dehors sous tous les temps », conclut-elle en souriant.