Énergie
Lettre ouverte au Prefet de BFC sur les risques de coupure d'énergie

Lionel Borey, président de Coop de France BFC, Christophe Chambon, président de la FRSEA BFC, Christian Decerle, président de la Chambre régionale d'agriculture BFC et Florent Point, président de JA BFC
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Les présidents de Coop de France BFC, de la FRSEA BFC, de la Chambre régionale d’agriculture et des JA BFC expriment un certain nombre de demandes précises face au risque de coupures énergétiques qui se profilent.

Lettre ouverte au Prefet de BFC sur les risques de coupure d'énergie
L'interruption de la fourniture d'énergie pourrait se révéler désastreuse pour un grand nombre d'activités agricoles. (Crédit Azman L.)

Monsieur le Préfet,

Pour plusieurs raisons stratégiques, la gestion des énergies, pour ces prochains mois, préoccupe le gouvernement et des instructions ont été transmises en ce sens aux Préfets. Le secteur agricole reste un secteur stratégique pour assurer notre souveraineté alimentaire. La gestion de l’énergie doit être prise en compte, pour la qualité sanitaire de nos produits et éviter des crises d’approvisionnement. Souhaitant ne pas créer d’inquiétudes inutiles et apporter des réponses précises aux difficultés rencontrées, il est important, pour notre secteur, de vous transmettre, nos différentes préoccupations et nos demandes, dans l’intérêt d’une bonne optimisation des besoins comme des ressources. À ce titre, nous pensons que, seule, une approche basée sur l’ensemble des énergies : GNR, fuel, gaz naturel, électricité avec les énergies renouvelables… sera réellement efficace car, s’il est possible pour certains processus de prévoir parfois une substitution de la ressource, pour d’autres, ce n’est guère envisageable à court terme. Généralement, nous travaillons sur des denrées périssables, parfois avec des durées de stockage très courtes (lait cru, viande, légumes, céréales à sécher…), qui ne peuvent pas souffrir d’une rupture d’alimentation en énergie. Par ailleurs, la dispersion des sites au niveau des exploitations, comme des lieux de collecte ou de transformation, complexifie une bonne estimation des besoins et des difficultés rencontrées. Au sujet du gaz, nous avons bien noté que le dispositif ne concernait, normalement, que les entreprises d’au moins 5 GWh / an. Nous souhaiterions avoir la confirmation que les entreprises consommant moins de 5 GWh / an sont bien exclues. Pour les quelques entreprises de notre secteur qui peuvent être concernées, nous souhaitons que soient considérées les entreprises d’aval (fromageries, entreprises agroalimentaires, organismes stockeurs, abattoirs…), comme des établissements d’intérêt général et, par conséquent, exemptées du dispositif de délestage. D’une part, il est important de recenser les entreprises en lien avec les filières agricoles pouvant créer une rupture d’approvisionnement. Pour ces dernières, il serait nécessaire de pouvoir bénéficier d’un ajustement, au cas par cas, pour limiter les conséquences de la réduction de consommation qui est demandée. D’autre part, nous sommes plus inquiets en ce qui concerne les coupures d’électricité, même avec préavis le soir précédent à 18 heures. Ces coupures peuvent s’avérer extrêmement délicates à gérer au moment de la traite ou de la fabrication, avec des conséquences économiques désastreuses. Au niveau du pétrole, des tensions existent, actuellement, dans certains secteurs, sur l’approvisionnement en GNR et en fuel. En pleine période de semis, les besoins sont importants et conditionnent la réussite des récoltes à venir. Aussi, des recommandations seraient à transmettre aux fournisseurs pour qu’ils facilitent l’approvisionnement de ces entreprises, via des commandes groupées ou des listes prioritaires. Enfin, il est important de renforcer l’autonomie énergétique des exploitations agricoles par des aides aux investissements, liées aux énergies renouvelables (panneaux photovoltaïques sur les toitures, méthaniseurs…), sans oublier l’adaptation nécessaire de la réglementation pour faciliter l’autoconsommation sur les exploitations. Par exemple :

Les unités de méthanisation en cogénération sont productrices d’énergie. Le paradoxe est qu’elles en consomment également beaucoup. Aujourd’hui, ces entreprises sont confrontées à la problématique de renouvellement des contrats d’énergie pour leur propre consommation dont les tarifs explosent. La demande serait d’utiliser une partie de l’énergie produite pour l’autoconsommation. Cela permettrait ainsi de stabiliser les charges liées à la consommation d’énergie ; ce qui est impossible, aujourd’hui, car la loi ne le permet pas. Pour un méthaniseur de 500 kWh, le coût de la consommation d’énergie est aujourd’hui de 65 000 € / an. Le fournisseur d’électricité propose, pour décembre 2022, dans le cadre du renouvellement d’un contrat, de passer à 280 000 € / an. Avec une telle augmentation, la méthanisation s’arrête ; la différence entre les deux n’étant pas couverte par le résultat. Dans l’exemple retenu, le moteur tourne aujourd’hui à 80 % de sa capacité. L’idée serait d’utiliser une partie des 20 % de la capacité restante pour de l’autoconsommation.

En conclusion, et au regard des risques mentionnés, ci-dessus, la profession agricole demande :

- une protection dans le cadre de mesures contraignantes de coupure, rationnement ou délestage ;

- un encadrement des prix des énergies, afin de revenir à un niveau supportable par les entreprises ;

- une simplification des démarches pour les projets avec des énergies renouvelables pour réduire le délai moyen d’instruction.