Destruction des couverts végétaux
Les méthodes possibles

Chloé Monget et Cédric Zambotto, Yoann Marin (CA 58)
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Que ce soit pour s'adapter à la réglementation ou par choix agronomique, les raisons du passage à une destruction mécanique des couverts végétaux sont diverses, comme les techniques à utiliser.

Les méthodes possibles
Différentes techniques existent pour détruire un couvert, et le choix se détermine entre : la date d'implantation du couvert, le type de sol ou encore le coût de la semence.

Depuis la directive nitrate adoptée en 1991 (91/676/CEE (1)), l’utilisation des couverts s’est déployée. En effet, au fil des plans d’actions certains points sont devenus obligatoires, comme la mise en place de couverture en intercultures longues, le maintien des repousses de colza ou encore la non-destruction chimique des couverts pour les parcelles labourées depuis moins de 3 ans pour les cultures intermédiaires pièges à nitrates (Cipan) en zone vulnérable (à l’image de ceux de la Nièvre pour le Bassin Loire-Bretagne et Seine-Normandie (2)). Plus récemment, avec les restrictions sur l’usage et les doses de glyphosate, mais aussi de par l’intérêt croissant des agriculteurs pour les atouts agronomiques des couverts, se pose forcément la question de trouver une destruction alternative à la chimie. Yoann Marin, conseiller productions végétales à la Chambre d’agriculture de la Nièvre et animateur du groupe Dephy, complète : « Ces pratiques ont aussi pris de l’ampleur car de plus en plus d’agriculteurs en agriculture biologique implantent des couverts. Pour toutes ces raisons, il est important d’évaluer les avantages, les inconvénients et l’efficacité des méthodes alternatives aux herbicides avant de se lancer ».

Différentes techniques

Pour rappel, la technique de destruction la plus adaptée sera déterminée par : l’espèce à détruire, le type de sol et la date de semis. De plus, comme pour bien d’autres éléments, une technique utilisée dans une exploitation ne sera pas forcément adaptée pour une autre et pourra varier d’une année sur l’autre. En effet, le choix d’une méthode dépendra aussi du système que l’exploitant souhaite mettre en place : labour, techniques culturales simplifiées, semis direct, etc. Cédric Zambotto, responsable de l’équipe productions végétales de la Chambre d’agriculture de la Nièvre, précise par exemple : « L’orientation vers des rouleaux types Rolofaca ou Maxicut, pourra trouver de l’intérêt pour permettre une dégradation du couvert pendant l’hiver sans bouleverser le sol et en laissant une petite couverture. Des agriculteurs utilisent même, en cas de couverts développés, des modèles attelés devant le tracteur au moment du semis des céréales d’automne pour faciliter le semis en direct, entamer la dégradation du couvert ou permettre à un éventuel traitement herbicide de mieux atteindre les adventices. Ce n’est néanmoins pas systématique et le passage du semoir peut suffire à coucher le couvert selon son développement ou la gestion herbicide choisie ». Le coût à l’hectare est très variable et se détermine en fonction du coût des semences (semences achetées VS semences produites), l’amortissement matériel (ou matériel présent sur l’exploitation), les conditions de passage (humidité, type de sol, etc.), le prix du GNR ou encore le nombre de passages. Il est donc indispensable de se renseigner sur tous ces éléments avant de choisir une méthode.

 

Le broyage

Ne touchant pas le sol, le broyage est une méthode possible pour détruire ses couverts, mais il faudra tout de même prendre garde à la portance qui peut avoir un impact sur la compaction du sol après passage. Avec cette technique, les résidus seront totalement laissés en surface et serviront à protéger le sol ainsi qu’à engendrer un léger effet mulch (réduction de l’évaporation et de la température du sol).


• Le petit conseil : à éviter pour les graminées qui peuvent repartir après la coupe.

• Les outils : Pour le broyage, deux possibilités existent : la première avec axes verticaux et la seconde avec des axes horizontaux. Respectivement, ils permettent un débit de chantier plus important et un broyage plus fin. Un travail du sol pourra permettre d’affiner la disparition du couvert. Cédric Zambotto souligne : « Le broyage peut être utilisé en vue d’un futur travail du sol, soit pour réduire la biomasse et permettre le passage du futur outil, soit pour faire dégrader une bonne partie d’un couvert qui aurait tendance à se lignifier pendant l’hiver (ex : crucifères, phacélie, etc.) tout en laissant une petite couverture du sol en attendant une reprise en sortie d’hiver (sols fragiles notamment) ».


Le roulage

Comme pour le broyage, l’outil ne touche que très peu le sol, mais, il faudra effectuer le passage durant une période de gel afin de blesser la plante en question afin d’éviter qu’elle ne reparte. De ce fait, c’est la date d’implantation qui déterminera le passage du roulage et donc la réussite de cette technique. Il faudra préférer des espèces montantes à tiges creuses, sensibles au gel, qui seront plus aisées à détruire (comme le tournesol, la féverole ou encore la moutarde). La plante, laissée en surface, protégera le sol contre les variations de températures et précipitations, mais viendra aussi éviter un certain salissement de la parcelle. Le couvert va s’incorporer progressivement dans le sol. Cette technique permet également d’atténuer la prolifération de certaines espèces hautes, tout en préservant celles au ras du sol comme le trèfle.


• Le petit conseil : efficace sur un couvert haut et développé. Une intervention sur gel ou sur des stades sensibles du couvert (floraison) améliorera aussi l’efficacité.

• Les outils : Privilégier un rouleau pouvant blesser le couvert ou un rouleau type rolofaca (spécialisé pour les destructions). Pour le rouleau lisse, Yoann Marin indique : « il faudra un gel vraiment efficace pour que cela contribue à la destruction ».


Le labour

Cette solution sera adaptée pour un couvert peu développé ou qui aurait gelé, tout en préparant le sol pour la culture suivante. En fonction du type de sol, la date de labour sera déterminante : précoce, le couvert aura un temps de croissance restreint, posant alors la question de l’intérêt de son implantation ; tardive, la destruction du couvert sera aléatoire, et pourra engendrer l’enfouissement de graines ou de ravageurs. Cédric Zambotto insiste : « Effectivement le type de sol est important… En général pour une dominante argileuse, un labour avant hiver est préféré pour faire travailler le gel et le dégel. Sur des sols limoneux, voire battants, on préfère souvent un labour de sortie d’hiver pour éviter une refermeture et une prise en masse l’hiver, voire de l’érosion. Cela peut être aussi conditionné par l’hydromorphie de la parcelle et de la date d’implantation de la culture de printemps qui suivra. Certaines parcelles hydromorphes ne permettent pas de reprendre le sol suffisamment tôt en sortie d’hiver, d’où un travail profond plutôt en début d’hiver avant que le sol ne soit trop engorgé ».

 

• Le petit conseil : Vérifier la structure de son sol avant de choisir cette technique. Yoann Marin ajoute : « Attention en cas de bonne biomasse à ne pas « enfermer » trop de matière en fond de sillon. Il vaut mieux privilégier un labour moins « esthétique », plus aéré ».

• Les outils : la charrue ou la charrue déchaumeuse (labour superficiel) sont possibles. La première sera préférable pour des sols très argileux et après broyage du couvert (pour le répartir plus facilement dans le sol).

 

Le déchaumage

À l’image du labour, cette technique permet de préparer le sol pour la culture suivante et donc de faire plus ou moins une pierre de coup. En effet, une certaine humidité du sol sera indispensable pour que cette technique soit plutôt efficace. Ensuite, Il est possible de voir réapparaître son couvert après destruction, entrant donc en concurrence avec la culture suivante.

• Le petit conseil : Envisager un plan B en cas d’hiver doux et pour les outils à dents, broyer le couvert avant afin d’éviter les bourrages.

• Les outils : le disque sera préféré pour une plus grande rapidité ou une machine à dents pour un nivellement plus fin du sol.

 


(1) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000705787

(2) https://www.nievre.gouv.fr/reglementation-en-vigueur-a1670.html#:~ : text = Cette % 20directive % 20de % 201991 % 20oblige, les % 20nitrates % 20d % 27origine % 20agricole).

Les alternatives
Glypho-Mulch, Eco-Mulch, fait partie des autres outils possibles pour la destruction mécanique des couverts.

Les alternatives

Outre les outils cités, d’autres existent comme la machine à bêcher ou rotobêche, le rotavator le Glypho-Mulch ou le mulcheur. Ceux-ci peuvent être utilisés aussi bien pour la destruction mécanique des couverts, le nivellement du sol, la destruction d’adventices ou encore la préparation du lit de semences.

Pour plus de renseignements : Cédric Zambotto (CA 58) au 06 77 15 59 81 ou Yoann Marin (CA58) au 06 08 62 85 30.

Le pâturage :
Agnelles en pâturage dans des repousses de colza en septembre, il y a quelques années, dans la Nièvre. Crédit photo : Christophe Rainon.

Le pâturage :

Économiquement avantageuse et agronomiquement intéressante, cette technique permet d’allier destruction du couvert, nourriture pour le troupeau et un apport d’azote minéral pour la parcelle. Pour preuve, Poscif a publié une étude sur le pâturage des couverts d’interculture par des brebis (étude réalisée en Île-de-France). Les résultats de ce suivi mettent en évidence divers avantages au retour des brebis dans les intercultures par rapport à un broyage, dont : un apport d’azote important, aucune perte de rendement sur la culture suivante, réduction de 60 % de la population de limaces, une diminution de la charge du travail (30 minutes/ha) et une économie de charges de mécanisation (30 euros/ha). Mais, pour introduire le pâturage comme moyen de destruction d’un couvert, le choix des dérobées est primordial et doit se baser sur l’appétence desdites espèces. Pour ces dernières, il faudra privilégier, par exemple, l’avoine rude (ou brésilienne), le colza fourrager, le seigle forestier ou encore le radis chinois. D’autres, moins appétentes, finiront tout de même par être consommées par les brebis à l’image de la féverole ou bien la phacélie. Enfin, d’autres sont à proscrire ou à éviter en grandes quantités comme les moutardes (teneur en glucosinolate importante donc potentiellement toxique), la gesse, la vesce velue (toxicité possible des graines) ou encore le sarrasin. Il faudra donc garder cela à l’esprit, en plus de la composition du sol, de la pluviométrie ou du coût de l’implantation pour choisir son interculture. Il faudra également que la parcelle sélectionnée pour le pâturage puisse être clôturée afin de mettre en place un pâturage tournant évitant ainsi le piétinement de la parcelle ou les refus en grand nombre. Ce pâturage offrira un apport alimentaire supplémentaire pour les animaux et retardera l’utilisation du stock alimentaire hivernal ou des concentrés. Dans une fiche sur les pratiques agroécologiques en élevage ovin viande, il est indiqué que finir les agneaux en fin d’automne et en hiver sur dérobées est possible, si la pluviométrie sur juillet-août permet aux couverts d’avoir une bonne biomasse pour subvenir aux besoins des agneaux. Cela étant, l’étude montre que la période d’engraissement devrait être plus longue d’un mois, sur couverts, par rapport à la bergerie. Malgré tout, toujours selon le même document, le coût de ration sera diminué de 17 euros par couple brebis/agneaux par rapport à la ration en bergerie. Il faut préciser que le couvert pourra ne pas être complètement détruit après le passage des animaux. Enfin, si l’exploitation ne possède pas de cheptel, des « prêts » de troupeaux peuvent être envisagés avec des éleveurs.

• Le petit conseil : mettre les animaux dans la parcelle lorsque le couvert est bien développé.

• Les "outils" : Privilégier les ovins car ils ont un faible impact sur la compaction du sol.

• Pour en savoir plus :

https://www.inn-ovin.fr/les-derobees-et-les-ovins-especes-a-privilegier-et-modes-dutilisation/

https://www.inn-ovin.fr/documents-techniques/alimentation/paturage/

https://www.inn-ovin.fr/finir-les-agneaux-sur-derobees-en-fin-dautomne-et-en-hiver/

http://www.agrofile.fr/poscif/


Encadré réalisé par Chloé Monget en partenariat avec Christophe Rainon, conseiller en production ovine à la CA 58.