Chiens de protection
Une efficacité prouvée, des contraintes peu abordées
Avec la menace d'attaques de prédateurs sur leurs troupeaux, beaucoup d'éleveurs ont acquis des chiens de protection. Si l'efficacité est avérée et mise en avant, les contraintes, elles, sont très peu pointées. Car avoir un chien de protection demande de l'investissement et cause parfois des dommages collatéraux au sein des troupeaux.
Du côté de Châtel-Gérard, au lieu-dit Les Cornes plus précisément, Hugues Trameau a introduit de l’élevage ovin dans son exploitation, en plein air intégral, en 2018. Avec aujourd’hui 1 100 brebis dans un secteur à risque au niveau de la prédation, l’éleveur a donc choisi d’acheter des chiens de protection. « On a commencé en achetant un chien Patou, en 2018, que l’on a entré en même temps que les moutons, jusqu’à avoir six chiens aujourd’hui, trois Patous et trois Bergers d’Anatolie », commence-t-il. « Ce qu’il faut tout d’abord savoir, c’est qu’il faut compter deux ans pour qu’un chien soit vraiment efficace. Ensuite, lorsqu’on en a plusieurs, il arrive qu’ils ne s’entendent pas entre eux, il faut alors savoir gérer les caractères de chacun ».
Hugues Trameau précise aussi qu’acheter un chien de protection, même provenant d’un élevage de chien de travail, n’est pas gage de réussite optimale. « En tout, on a acheté huit chiens. On en a donné deux car ils n’étaient pas suffisamment fixés au troupeau. On les retrouvait souvent dans la cour à nous chercher et à vouloir aller sur le canapé ».
Une efficacité prouvée, mais…
L’éleveur l’assure, « avoir des chiens de protection est efficace contre la prédation. On a eu qu’une seule attaque (il y a quelques semaines, ou la piste du loup a été « non exclue », avec un agneau tué) alors que tous nos voisins en ont subi plusieurs, avec plus ou moins d’intensité ».
Il nuance. « Mais ce qui n’est pas dit, ce sont les dégâts que les chiens font sur le troupeau. Quand ils sont jeunes, surtout vers 18 mois, ils sont très turbulents, font plein de bêtises et il arrive qu’ils jouent avec les agneaux, les plus faibles, en leur courant après et en les mordillant, et parfois cela va jusqu’à la vraie morsure qui entraîne la mort. Tous les ans, on perd de cette façon une dizaine d’agneaux. Et c’est le cas chez chaque éleveur ».
Hugues Trameau insiste sur le fait que « toute la phase d’apprentissage des chiens, durant les deux premières années, n’est pas simple à gérer. Aussi, on parle des aides de l’État pour le financement des chiens et pour l’entretien (l’achat de croquettes est financé à 80 % indique l’éleveur) mais les dégâts collatéraux sont pour nous ».
Autre contrainte : « Il arrive que les chiens se sauvent pour jouer. On passe beaucoup de temps à leur courir après pour les rattraper ».
À temps plein au sein du troupeau
Si l’apprentissage est aussi difficile, c’est que contrairement à un chien de troupeau, qui se dresse, en lui donnant des ordres (Hugues Trameau en a deux également), « un chien de protection, lui, s’éduque, mais il faut le prendre sur le fait accompli lorsqu’il fait une bêtise. Le gros du boulot est fait par l’instinct du chien, qui vit avec le troupeau, 24 heures sur 24, 365 jours par an. Un chien de protection doit avoir peu de contact avec l’Homme pour vraiment s’intégrer au troupeau ».
L’éleveur remarque toutefois que chez les chiens de protection, « il y a des lignées, certains ont ça dans le sang bien plus que d’autres. Pour le moment, on a assez de six chiens. Mais si demain on doit être amené à faire des portées, on a déjà identifié les chiens pour cela. On a un mâle et une femelle qui ont vraiment le bon tempérament d’un chien de protection », conclut Hugues Trameau.