Lutte contre les ravageurs
Des archers qui rendent service aux agriculteurs

Alexandre Coronel
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Très commun dans la région, classé nuisible et invasif, le ragondin est un gibier de choix pour les chasseurs à l’arc, qui peuvent, en s’exerçant sur cette cible, rendre service à la société, et notamment aux agriculteurs… Reportage avec les membres de l’association des chasseurs à l’arc de Franche-Comté !

Des archers qui rendent service aux agriculteurs
A la faveur de la fraîcheur du crépuscule, les chasseurs de l’ACAFC ont chassé quelques ragondins dans le secteur de Choye, en Haute-Saône.

L’Association des chasseurs à l’arc de Franche-Comté (ACAFC) compte actuellement 95 membres, répartis sur les départements du Doubs, de la Haute-Saône, du Jura et du Territoire de Belfort. « Depuis sa légalisation en 1995, la chasse à l’arc progresse régulièrement et gagne des adeptes chaque année, relate Patrick Morel, président de l’ACAFC. Elle n’est pas antagoniste avec la chasse par armes à feu, et d’ailleurs plusieurs adhérents de notre association pratiquent les deux formes de chasse. Les deux principales différences sont la vitesse du projectile et la portée précise de l’arme. Avec l’arc, on est obligé de s’approcher très près de l’animal avant de le tirer, sans attirer son attention (moins de 20 mètres). L’approche discrète, silencieuse, provoque des montées d’adrénaline incomparables ». Outre le permis de chasse conventionnel, le chasseur à l’arc doit avoir suivi une formation spécifique à la chasse à l’arc, qui permet d’acquérir des connaissances pratiques pour manipuler et utiliser cette arme dans des conditions de sécurité optimales. « Contrairement aux projectiles des armes à feu, qui tuent l’animal par onde de choc, la flèche tue par hémorragie. Il faut donc impérativement traverser la zone thoracique, où se trouvent le cœur et les poumons, ce qui demande une grande précision ». L’ACAFC est justement agréée pour dispenser cette formation. Avec sept autres membres de l’association, Patrick Morel s’est rendu du côté de Choye, dans la Haute-Saône, entre Gray et Besançon, en cette fin juin. « Nous intervenons à la demande des agriculteurs. En Haute-Saône, c’est Damien Crucet, responsable régulation du ragondin, qui fait le lien avec les propriétaires et les exploitants agricoles ».

Dégâts aux cultures

Le secteur de Choye est parcouru de petits cours d’eau, et plusieurs étangs parsèment le territoire de la commune. Un terrain de choix… pour le ragondin. Les représentants de cette espèce exotique, classée nuisible et invasive, minent les berges en y creusant des réseaux de galeries. Les phénomènes d’érosion sont accélérés et peuvent entraîner la chute d’arbres, ou compromettre l’étanchéité des digues. La terre déblayée lors du creusement des galeries provoque l’envasement des plans d’eau. Ce petit herbivore, vecteur de la leptospirose et de la douve du foie cause aussi des dégâts aux cultures. Enfin, sur le plan environnemental, il déstabilise l’écosystème aquatique par sa surconsommation de plantes aquatiques et par sa destruction des nids d’oiseaux aquatiques.

Capital sympathie

Les chasseurs à l’arc interviennent donc à la demande des agriculteurs concernés et avec leur autorisation, pour éliminer des ragondins. « C’est une des seules espèces chassables à tir toute l’année sur le territoire français. Les chasseurs à l’arc sont bien perçus, car c’est une chasse silencieuse, qui a la réputation de laisser sa chance au gibier… et c’est vrai ! », précise Patrick Morel. L’habileté et la maîtrise de soi indispensables pour le tir rapproché requièrent de l’entraînement et de l’expérience. La chasse au ragondin offre justement aux pratiquants l’opportunité de s’entraîner en conditions réelles. « Comme tous les gibiers, le ragondin s’adapte à la pression de chasse. S’il est chassé, il devient méfiant, et modifie ses habitudes : il devient crépusculaire ou nocturne. Il a mauvaise vue, mais son ouïe correcte et son bon odorat lui permettent de détecter la présence des humains ». Mobile et prompt à plonger hors d’atteinte en cas d’alerte, le myocastor ou lièvre des marais constitue donc un gibier de choix pour les chasseurs à l’arc, novices ou aguerris. « Rien ne vaut le tir en conditions réelles, avec des cibles mobiles, en trois dimensions, capables de changer brusquement de trajectoire ou de s’arrêter… »