Étude terroir
Ça creuse !

Chloé Monget
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L’étude terroir sur l’appellation Pouilly-Fumé, évoquée dans des précédentes éditions, se poursuit avec à la mi-octobre l’ouverture de fosses pédologiques.

Ça creuse !
Une vingtaine d'étudiants de l'Institut Universitaire de la Vigne et du Vin de l'université de Bourgogne (IUVV) ont récolté les éléments dans les fosses pédologiques durant une semaine.

Après la pose de capteurs climatiques (voir TDB n° 1669), c’est au tour du sol d’être ciblé – avec l’ouverture de fosses pédologiques - dans le cadre de l’étude terroir initiée par les viticulteurs de l’appellation et du Syndicat viticole de l’aire AOC Pouilly.

Pour rappel

Cette étude a pour but de récolter des informations sur le terroir afin que les viticulteurs puissent connaître précisément leur terrain de travail, afin, le cas échéant, d’adapter leurs pratiques. Cette étude permettra également d’expliquer plus scientifiquement aux clients les particularités de chaque site et donc de chaque vin. Ainsi pour cette nouvelle étape, l’ouverture des fosses et l’analyse sont confiées au bureau d’études « Adama terroirs viticoles » et aux étudiants de deuxième année du Master « Vigne Vin Terroir » de l’Institut Universitaire de la Vigne et du Vin de l’université de Bourgogne (IUVV). Si ces derniers doivent rendre leurs conclusions au printemps 2023, les géopédologues d’Adama en charge du dossier ont, eux, jusqu’en 2024 pour transmettre leur rapport détaillé sur l’étude des sols et des sous-sols de l’aire en AOP.


Comment choisir ?

Pour la première session, 37 fosses ont été ouvertes sur les terres de l’appellation Pouilly-Fumé – soit 80 à 85 % du projet. La deuxième session, avec l’ouverture de 15 fosses supplémentaires, aura lieu l’an prochain afin de terminer de couvrir l’appellation. Emmanuel Chevigny, géopédologue pour Adama pointe : « si la majorité de l’aire d’étude se trouve dans les vignes, il y en a aussi dans les sous-bois ou encore dans des champs, car ces terres – même sans vignes – font partie du territoire de l’appellation ». Pour déterminer où creuser, Emmanuel Chevigny détaille : « Pour parvenir à l’établissement de la cartographie, nous avons fait des sondages à la tarière (plus de 430) à des points stratégiques afin d’identifier les types de sols et de délimiter les unités cartographiques (c’est-à-dire où le sol est identique). C’est dans ces unités que nous avons implanté les fosses, afin d’avoir une vision globale des divers sols de l’appellation ».


L’exception a un prix

Emmanuel Chevigny, et Corentin Rivière, également géopédologue pour Adama stipulent : « Pour le moment 8 à 9 grands types de sols ont été identifiés avec les premiers éléments récoltés. Il faut noter que nous ne voyons pas cela tous les jours ! Nous avons des sols à la fois très argileux, très calcaires, très sableux, ou encore pierreux… En fonction, les problématiques et donc les préconisations ne seront pas les mêmes ». Cette pluralité est d’ailleurs saluée par les étudiants présents sur la fosse (Magaux, Marius, Raphaël et Angela) : « Cette diversité offre des atouts, afin de produire des vins différents. De plus cela offre une belle capacité d’adaptation face au changement climatique ». Malgré tout ils nuancent : « Mais, ce caractère exceptionnel a un revers de médaille. En effet, cette multiplicité engendre des complications, car on ne pourra pas mettre en place un itinéraire technique identique sur l’appellation et, même parfois, sur un domaine. Chaque type de sol requiert une approche différente. Le maître mot est donc de s’adapter… ». Rendez-vous donc dans quelques mois pour la restitution des premiers rapports plus précis.

Du côté des étudiants
L'ouverture de fosses pédologiques permet de récolter des informations (compaction, composition, acidité, etc.) afin de faire des préconisations précises sur les porte-greffes adaptés au sol en question.

Du côté des étudiants

Emmanuel Chevigny et Corentin Rivière soulignent : « nous accompagnons les étudiants durant les descriptions des fosses. Chaque année, la promotion des Master 2 a la possibilité de faire ce type d’analyses, soit sur un seul domaine, soit sur plusieurs - à une échelle évidemment plus réduite que celle que nous réalisons aujourd’hui. Ainsi, nous avons eu l’occasion d’aller dans des domaines de Côte d'Or, d’Aquitaine ou encore à Minorque ». Pour les étudiants interrogés (Magaux, Marius, Raphaël et Angela), cette méthode d’enseignement est appréciée : « nous pouvons mettre en pratique la théorie des cours en situation réelle. C’est très formateur. De plus, le fait d’être en petit comité permet de poser nos questions, mais aussi d’échanger sur nos conclusions plus librement ». Angela, 30 ans, ancienne biologiste, insiste : « Je suis arrivée de Colombie avec un visa travail/vacances, et ai découvert l’importance du vin ici, cela m’a passionnée ! Je me suis donc renseignée sur les études à faire ici et j’ai trouvé celle de l’IUVV. En Colombie, cela n’existe pas. Je trouve très intéressant de voir les différences de sol entre la France et mon pays d’origine ». Si tous leurs projets professionnels ne sont pas encore aboutis, tous souhaitent : « travailler sur le terrain ».