Vendanges 2022
Une année très prometteuse

Chloé Monget
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Avec deux semaines d'avance, les vendanges sont terminées dans la Nièvre. Pour certains, cette année un peu particulière promet un millésime intéressant.

Une année très prometteuse
Marielle Michot a démarré ses vendanges le 12 septembre. Crédit photo : Eddy Graëff/Sencyb

Les vendanges dans la Nièvre sont terminées et elles ne ressemblent en aucun car à celles de l’an passé. « Cela n’a rien à voir ! » s’exclame Marielle Michot (gérante de l’EURL Claude Michot – Les Berthiers, Saint-Andelain). Un avis partagé par Bertrand – retraité actif - et Alexis Jeannot (Domaine Bertrand Jeannot et Fils – Riaux, Saint-Andelain).

En effet, poursuit Marielle Michot, « en 2021 j’ai subi le gel de printemps avec des pertes jusqu’à 75 %. Un printemps très pluvieux avec 9 traitements et presque 4 kg de cuivre sur la partie en conversion bio. Le mildiou a malgré tout été maîtrisé. La vendange était belle avec un rapport sucre/acidité bien équilibré, qui s’est ressenti sur les vins finis avec une belle fraîcheur et des degrés raisonnables au maximum à 12.8 ». De son côté Alexis Jeannot explique que « les pluies et l’humidité ont été les maîtresses de l’an passé. Nous avions commencé à vendanger le 27 septembre pour terminer le 2 octobre, soit près de deux semaines de décalage par rapport à 2022 ».

2022 dans la lignée de 2019 et 2020

Pour cette année, les vendanges ont commencé le lundi 12 septembre pour Marielle Michot et le 9 septembre pour Alexis Jeannot. « Cette année (2022), a été marquée par une pluviométrie correcte au printemps, 2,5 kg de cuivre sur 6 traitements mais l’eau a manqué en août avec des chaleurs records. Les raisins évoluaient peu, restaient petits et les peaux étaient épaisses. Il a fallu attendre les pluies de début septembre et qu’elles soient absorbées » précise Marielle Michot. « J’ai préféré attendre et le rendement en jus s’en est ressenti. Les rendements sont corrects, mais les degrés sont remontés et les acidités ont chuté rapidement. Il y avait déjà peu de malique et le tartrique a rapidement chuté aussi. Les raisins sont restés très sains jusqu’au bout, malgré les pluies qui auraient pu faire éclater les baies. Nous avons eu également de belles journées et des températures élevées au début de la récolte. Mais pas une once de pourriture à l’horizon ! ». Alexis Jeannot avoue quant à lui s’en sortir très bien.  « Le millésime 2022 sera dans la lignée de 2019 et 2020, soit un millésime solaire avec un bon degré même s’il faut surveiller l’acidité qui sera probablement faible ». Alexis Jeannot nuance toutefois son propos : « la sécheresse a fait souffrir certaines vignes, bloquant le mûrissement. Si nous avions eu un peu d’eau, les vendanges auraient commencé encore plus tôt. De plus, à cause des chaleurs, nous avons dû modifier nos horaires de récolte au jour le jour. Même si nous sommes dotés d’un échangeur thermique tubulaire, permettant de refroidir les jus rapidement, cela ne vaut pas une récolte avec une température ambiante fraîche. Au vu de ce que nous annoncent les experts en météorologie, nous pensons investir dans du matériel nous offrant plus de visibilité nocturne afin de vendanger éventuellement la nuit si les fortes chaleurs se poursuivent sur cette lancée. Nous mettons tout en œuvre pour aider notre production – tout en gardant à l’esprit les enjeux sociaux que ce travail de nuit peut engendrer pour notre salarié ».

Difficultés particulières

Si, pour Alexis Jeannot et son père, 2022 fut marqué par une multitude de petites pannes, pour Marielle Michot, c’est une panne majeure qui caractérisera sa récolte. « Dès la fin de la première journée ma machine à vendanger a rendu l’âme. J’avais prédit que cela aurait été sa dernière campagne mais elle n’a pas tenu jusqu’au bout ! Je retiens donc la solidarité vigneronne, car le Château de Tracy m’a prêté une machine pour toute la durée des vendanges. Mais comme elle n’a pas le contrôle de dévers, j’ai pu également bénéficier de l’aide du Domaine Bouchié-Chatellier pour battre ma parcelle la plus difficile ».

Mise en perspective

« À chaque année ses conditions climatiques spécifiques. Il est certain qu’il faut repenser le vignoble. À l’époque où mon père plantait il y une quarantaine d’années, on privilégiait des clones peu productifs, les vendanges étaient plus tardives, les degrés beaucoup moins hauts et la chaptalisation était courante » se souvient Marielle Michot. « Aujourd’hui, il faut plutôt diversifier les clones sur des porte-greffes tardifs autant que possible en fonction du taux de calcaire actif de nos sols et prendre des clones qualitatifs et productifs pour compenser les manquants liés aux maladies du bois » détaille-t-elle. Bertrand Jeannot rebondit : « les goûts des consommateurs ont évolué en même temps que les conditions climatiques qui modifient les saveurs des millésimes. Actuellement, nous sommes sur des vins plus ronds avec des arômes de soleil, alors que dans les années quatre-vingt, par exemple, les vins étaient plutôt acides avec une teneur alcoolique moindre et moins de fraîcheur. Je suis persuadé que les cycles météorologiques nous feront revenir à ces attraits. Mais, laissons aux scientifiques compétents l’amplitude nécessaire pour trouver de nouvelles solutions afin que nous puissions continuer à produire du vin malgré des conditions changeantes. Enfin, les études en cours sur le terroir sont très à propos pour en apprendre un peu plus sur notre outil de travail, afin de toujours ajuster nos méthodes. D’ailleurs, c’est peut-être là la force de notre AOC : savoir s’adapter à tout ».

Une nouveauté pour EURL Claude Michot

L’année 2022 sera aussi pour l’EURL Claude Michot le retour du Chasselas après 30 ans d’absence. Marielle Michot explique : « C’est une opportunité que j’ai saisie. J’ai repris une petite parcelle de 9 ares en fermage. J’avais soumis mon intérêt au propriétaire qui m’a contacté lorsqu’il a cessé d’exploiter. Nous avions du chasselas sur le domaine familial qui a été arraché au profit du sauvignon il y une trentaine d’années. Ce retour est, d’une part, la préservation d’une partie historique de notre patrimoine viticole sur Pouilly et, d’autre part, la diversification de la gamme en proposant un vin moins riche en alcool avec un cépage très productif dont la difficulté se trouve dans le fait de réguler sa production. Pour conclure, je suis persuadée que l’AOC Pouilly-sur-Loire a toute sa place dans l’évolution de la consommation des vins ».