Agroéquipement

Un marché qui pourrait se retourner

2022 aura encore été une année atypique pour la profession de l’agroéquipement, comme le révèle le rapport économique annuel d’Axema. L’année a été marquée notamment par un renchérissement et une pénurie de matières premières et de composants essentiels de production en raison de la guerre en Ukraine et de la politique zéro Covid menée en Chine. Alors que la demande est restée soutenue, les difficultés d’approvisionnement et de production se sont traduites par un allongement des délais de livraison, de 12 semaines en moyenne au plus fort de la crise. Aujourd’hui encore, ces difficultés n’ont pas été résorbées. Les délais de livraison dans le secteur sont en moyenne le double de ceux qu’ils sont habituellement. Le retour à la normale se fait très progressivement. Autre élément notable de l’année dernière : la forte augmentation des coûts de production et des prix de vente. En moyenne, les prix des agroéquipements neufs ont ainsi augmenté de 12 % en 2022 et de 17 % depuis le début de 2021. Les hausses de prix décidées en cours d’année 2022 continueront de s’exprimer, en année pleine, en 2023. À la fin février, l’acquis de croissance (c’est-à-dire la croissance des prix des matériels qui résulterait d’un statu quo jusqu’à la fin de l’année) était de 7 %.

Niveau d’inflation inédit

Au total, Axema estime que les prix auront augmenté de 30 % sur trois ans. Un tel niveau d’inflation est inédit depuis les années quatre-vingt. Les industriels s’interrogent sur l’acceptabilité de tels niveaux de prix et ils redoutent plus que jamais un retournement du marché. Enfin, le troisième fait marquant constaté sur 2022, ce sont les ventes de matériel neuf qui ont atteint un nouveau niveau record, à 8,3 milliards d’euros (+15 % par rapport à 2021), malgré les difficultés de production et le report de certaines d’entre elles sur 2023. Cette progression à deux chiffres a été portée davantage par les prix (+12 %) que par les volumes (+2,5 % seulement). Par ailleurs, la situation a été nettement meilleure dans le secteur agricole (+16,5 %) que dans celui des espaces verts (+3,5 %). Ce dernier marché s’est en effet retourné à partir du milieu de l’année 2022, en conséquence de la sécheresse et de l’étranglement du pouvoir d’achat des ménages (le marché des particuliers représente 70 % des ventes de matériel d’entretien des espaces verts).

Prises de commandes en baisse

Pour ce qui concerne l’année en cours, le bilan du 1er trimestre 2023 fait apparaître une profonde divergence entre d’un côté, les niveaux de facturations, toujours en très forte augmentation, et de l’autre, les prises de commandes en chute libre par rapport à l’année précédente. Les prises de commandes affichent ainsi des baisses qui s’échelonnent de 15 % à 50 % selon les familles de produits. Simple trou d’air ou prémisses d’un retournement du marché ? Il est encore trop tôt pour le dire. Les industriels des agroéquipements constatent un certain attentisme du côté des acheteurs – distributeurs et agriculteurs notamment. Même si les prises de commandes se sont raréfiées en ce début d’année, il est presque acquis que le marché des agroéquipements sera en croissance en 2023, de l’ordre de 5 % à 10 %. En effet, les carnets de commandes sont encore bien garnis – 5,5 mois de production en moyenne à la mi-mars – et couvrent quasiment l’année civile. De plus, l’effet prix restera positif, apportant 7 à 10 points de croissance. Dans de telles conditions, le secteur s’oriente vers une nouvelle année record, mais nuancée sur le fond.