Moissons 2023
Un grain de vie

Chloé Monget
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Les moissons ont débutées dans la Nièvre*, comme chez Jean-Charles Zwaenepoel (lieu-dit Sourdes à Varennes-lès-Narcy). Pour lui cette année est une période « ciseau » requérant une certaine prudence. 

Un grain de vie
Jean-Charles dans sa parcelle d'orge de printemps semée d'automne.

Comme l'an passé, les récoltes ont démarré fin juin dans la Nièvre. Jean-Charles Zwaenepoel a ouvert la porte de sa moissonneuse pour analyser ce démarrage et la suite... « les premiers résultats sont un peu moins bien que ceux de la campagne 2022. La cause est en partie le temps incertain ». 

Premiers retours 

« La moisson c'est mon bulletin de notes de fin d'année : c'est le moment où l'on sait si on a bien travaillé et si on a eu de la chance car nous traitons avec de nombreuses variables incontrôlables, comme le temps. Pour preuve, cette année, le temps humide suivi de sec a instauré un milieu propice au développement des maladies sur les orges de printemps semées d'automne qui, de base, sont très sensibles à l'helminthosporiose ou encore la rhynchosporiose ». Pour le reste, Jean-Charles a débuté sa récolte par l'orge d'hiver (42 ha - semée le 25 octobre avec récolte le 24 juin) « avec un taux de protéines compris entre 9 et 10 et un calibrage entre 77 et 90, ce qui est un peu moins bien que 2022, pour ces deux points », il a ensuite poursuivi son travail avec l'orge de printemps (38 ha – semée le 10 novembre avec récolte le 26 juin) « avec un calibrage entre 50 et 65. Pour le taux protéique, je n'ai pas encore les analyses. Dans tous les cas, je suis un peu déçu car tout cela est en dessous des résultats de 2022. Pour le blé, j'essayerai de le récolter aujourd'hui ou demain (28 ou 29 juin), et j'insiste sur le terme « essayer » car le blé est tout juste mûr, mais je voudrais le prélever avant la pluie du 30 juin afin de pas perdre en qualité/poids. Après les averses, je reprendrais les orges de printemps semées de printemps car elles sont les plus rapides à sécher ». Sans s'arrêter dans ses explications, Jean-Charles continue en parlant des prix. 

Une attention à avoir 

« 2023 est identique à 2013 et 2009 pour les prix, car nous sommes en plein dans l'effet « ciseau ». Nous sommes pour l'achat des engrais azotés entre 800 et 1 000 euros /t avec un prix moyen de vente qui ne sera pas à 250 euros/t. Pour le moment, le prix le plus haut est de 320 euros/t. et le plus bas de 200 euros/t. Les dernières semaines, les prix ont un peu augmenté pour plafonner à 220 euros/t environ. Cette situation risque d'engendrer des EBE proches de zéro voire totalement négatifs dans certains cas. Nous ne sommes clairement pas dans l'euphorie de 2021-2022 où même si les tarifs des engrais augmentaient, les cours suivaient. Aujourd'hui, ces derniers ne suivent plus du tout la hausse des premiers. Les investisseurs n'ont plus confiance et il y a donc une récession mondiale... Pour 2024, les prix des engrais azotés reviendront à un niveau normal (soit le même précédent la crise en Ukraine), un mixte de vente de céréales peut se faire pour l'année prochaine, sans toutefois engager toute la récolte puisque nous ne connaissons pas encore l'assolement. Selon moi, il peut être judicieux d'engager uniquement le blé, l'orge de printemps et le colza pour ceux qui cultivent ce dernier ; il faut rester prudent face à un avenir incertain ». 

Moment de vie 

Si les moissons sont importantes à traiter d'un point de vue technique, il semble que pour Jean-Charles, un autre pan est à aborder : la place de l'entourage. « Tous les midis, mon père vient me déposer mon sandwich confectionné avec le plus grand soin par ma mère. C'est un service de livraison qui s'appelle : Marie-Jeanne 2000** ! On ne fait pas mieux dans le coin avec son sandwich aux aiguillettes de canard crème fraîche ». S'il s'amuse de la situation - tout en dégustant un burger maison dudit service - il reconnaît que cela est pour lui son moment préféré de la journée : « c'est un peu la même sensation que lorsque l'on nous fait une surprise ; et je ne remercierai jamais assez mes parents pour cela ». Même s'il avoue que ce rituel peut être contraignant, il en convient : « je ne vais pas me plaindre car c'est toujours un plaisir ». Parsemées d'anecdotes en tous genres, les moissons sont un moment charnière dans la vie d'une exploitation et, sans nul doute, une tranche de vie inoubliable pour ceux qui participent, de près ou de loin, à la mener à bien tous les ans. 

* (date de l'écriture de l'article : 28 juin). 

** inspiré du prénom de sa maman.