Gendarmerie
Le goût du service

Christopher Levé
-

Thierry et Vincent Mothe sont deux frères, deux frères qui exercent le même métier, celui d’exploitant, mais aussi la même passion en étant depuis plusieurs dizaines d’années réservistes opérationnels de la gendarmerie. Rencontre avec ces viticulteurs qui laissent de temps en temps de côté leurs bottes vertes pour l’uniforme bleu de gendarme.

Gendarmerie
Thierry et Vincent Mothe (de gauche à droite), viticulteurs, frères et réservistes opérationnels de la gendarmerie de l'Yonne.

Viticulteurs à Fontenay-près-Chablis (domaine du Colombier), Thierry et Vincent Mothe ont une petite particularité. Outre être frères et travailler ensemble, ils exercent aussi la même passion. Mais pas n’importe laquelle. Tous deux sont, depuis plusieurs décennies, réservistes opérationnels de la gendarmerie de l’Yonne, au grade de major de réserve.
À 59 ans, l’aîné des deux, Thierry Mothe, a déjà 38 ans de service derrière lui. « J’ai commencé à signer des engagements réserves avec l’escadron de gendarmerie mobile de l’Yonne en 1985, à l’issue de mon service militaire », confie-t-il. Son frère, Vincent, 54 ans, a lui débuté un peu plus tard, en 2003. C’est au sein de la brigade de Seignelay, commandant Chablis, que ce dernier sert. Thierry, lui, fait partie de la brigade de Tonnerre. « Étant maire de Fontenay, je ne peux pas service dans ma communauté de brigade », précise-t-il.
Et c’est bien la seule chose qui diffère entre les deux frères en ce qui concerne cette activité. Car l’un, comme l’autre l’assure : être réserviste opérationnel, « c’est une passion ». « Mon frère et moi avons toujours été un peu baignés dans ce monde de militaires. Notre père à notamment fait la guerre d’Algérie. Le fait de servir la population est une vraie vocation pour moi », confie Vincent Mothe. « En tant que réserviste opérationnel, il y a une mission auprès de la population qui m’intéresse beaucoup. J’estime que dans la constitution il y a beaucoup de droits et que le revers de la médaille, c’est d’avoir des devoirs. Pour moi, cela tombe sous le sens de donner de mon temps pour les autres, d’avoir cet esprit de solidarité. C’est un service que l’on donne », poursuit Thierry Mothe.

La complémentarité

Les deux frères sont aussi unanimes quant au fait, que dans d’autres circonstances, ils auraient pu faire carrière comme gendarme actif. « Si je n’avais pas les vignes, l’exploitation à reprendre derrière nos parents, j’aurais réellement réfléchi à faire une carrière comme militaire », confirme Vincent Mothe. « Mais Thierry comme moi avions un avenir tout tracé avec l’exploitation ».
Cependant, au fil des années, ils ont réussi à lier leur activité à leur passion. « Si on arrive à lier tout cela, c’est parce qu’on a une exploitation diversifiée (avec d’autres productions que la vigne), avec plusieurs personnes qui gèrent. Cela nous facilite la tâche pour partir régulièrement en semaine ou dans le week-end pour des missions. Si on avait été seuls à gérer l’exploitation, cela aurait peut-être été plus difficile. Aujourd’hui on se soutient, on arrive à travailler en fonction de l’autre, c’est plus facile pour concilier le tout. Puis, avec l’âge, on sait gérer notre temps », rit Vincent Mothe. « On est complémentaire », ajoute Thierry Mothe. « Il y en a toujours un qui est là, on peut se reposer sur l’autre. Si l’un de nous deux est absent, l’exploitation tourne quand même ».

Un relais à tous les niveaux

Être viticulteur et gendarme réserviste opérationnel est un atout pour toutes les parties : la gendarmerie, le monde agricole et la population. « On a un double regard, on peut leur apporter notre vision de ce qu’il se passe au sein des communes. On peut jouer le rôle de conseiller auprès des gendarmes actifs », affirme Thierry Mothe. « Comme cela peut se faire dans certains villages avec la participation citoyenne, on fait le relais d’informations auprès de la gendarmerie automatiquement. On est aussi un relais pour la population. Ici, tout le monde sait qu’on est réserviste. On fait bien la part des choses entre la réserve et notre profession, notre citoyenneté. Mais beaucoup de personnes viennent nous demander ou nous donner des renseignements. On se charge ensuite d’être le relais pour les gendarmes actifs », continue Vincent Mothe.
Ce relais, les deux frères le sont aussi avec les jeunes recrues de la réserve opérationnelle. « J’ai toujours eu la volonté de transmettre. Si je peux donner des conseils à des jeunes gendarmes réservistes je le fais avec plaisir », assure Vincent Mothe. « On répond à leurs questions, on leur donne toutes les informations sur les choses où ils sont demandeurs. D’encadrer des jeunes c’est gratifiant et important. Je fais beaucoup de journées défense citoyenneté, c’est important pour moi de communiquer avec les jeunes, de leur expliquer ce que fait la gendarmerie, d’une part, mais aussi le monde militaire dans sa grande globalité », indique Thierry Mothe. « Et puis on a tous les deux de l’expérience aujourd’hui. On est en capacité de conseiller les jeunes, notamment sur leur sécurité », reprend Vincent Mothe. « On a aussi de l’expérience, de par notre profession, pour gérer et encadrer du personnel. Là-dessus, la gendarmerie nous fait également confiance pour encadrer d’autres réservistes », ajoute l’aîné.
Un même métier, une même passion, une même volonté de servir, d’aider et de transmettre. Et un même objectif, celui de continuer d’être réserviste opérationnel de la gendarmerie « tant que le physique suivra », rient les deux frères.