Protéines végétales
Protéines végétales : le pari de filières régionales

Berty Robert
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Lors du dernier Sommet de l’Élevage, une conférence a porté sur l’intérêt de structurer des filières régionales de protéines végétales, au service de l’élevage. En Auvergne-Rhône-Alpes, c’est déjà du concret, qui entre en résonance avec la démarche Profilait, lancée en Bourgogne Franche-Comté.

Protéines végétales : le pari de filières régionales
Parmi les projets présentés lors de la conférence figurait l'usine de trituration de Varennes-sur-Allier, portée par le groupe coopératif Ucal.

Prendre conscience de ses fragilités, c’est souvent le meilleur moyen d’avancer. La conférence, organisée début octobre dans le cadre du dernier Sommet de l’Élevage, à Cournon-d’Auvergne, et intitulée « Structurer une production régionale de protéines végétales au service des filières d’élevage : les projets des coopératives » l’illustrait parfaitement. En Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) comme dans de nombreuses autres régions françaises, le changement climatique associé à la hausse des coûts d’alimentation du bétail pousse à s’interroger sur le modèle économique jusqu’alors employé, et à en faire émerger d’autres. Dans ce cadre, le secteur de la coopération agricole a les moyens d’être moteur et les actions mises en œuvre sur la région Aura peuvent aussi nourrir la réflexion menée depuis plusieurs années en Bourgogne Franche-Comté à travers la démarche Profilait, qui porte, elle aussi, sur la structuration d’une filière protéine végétale régionale à destination de l’alimentation des élevages. La conférence mettait en lumière plusieurs exemples concrets. « Nous faisons le constat de dépendances fortes, expliquait Fabrice Pannekoucke, vice-président du Conseil régional d’Aura, en charge de l’agriculture. Les exploitations d’Aura doivent trouver les ressources dont elles ont besoin sur leur territoire et la question de la protéine végétale doit être appréhendée dans ce cadre ». Cette ressource régionale, un premier exemple en était fourni avec le projet mené par la coopérative Ucal, basée dans l’Allier, à Varennes-sur-Allier, entre Vichy et Moulins. Elle a fait le choix d’un outil de trituration de graines qui fonctionne depuis juillet 2022. « Nous avons un potentiel de 30 000 t de graines triturées, de tous types, par an, précisait son directeur, Yves Courrier. Cette usine est capable de décortiquer du colza, ce qui donne des tourteaux plus riches en protéines et en matière grasse ».

Bon contexte

Pour sa première année de fonctionnement, l’unité a trituré 26 000 t (en majorité du colza et du tournesol) aux deux tiers transformés en tourteaux et pour le dernier tiers, en huile. Le débouché commercial des tourteaux ainsi produits, est directement commercialisé par le groupe Ucal qui les commercialise sous sa marque d’aliments pour animaux Atrial. « Économiquement, le bilan est bon, soulignait Yves Courrier, il est même au-delà des prévisions. Il faut dire que nous avons bénéficié d’un bon contexte de démarrage entraîné par le conflit russo-ukrainien, et l’envol des prix. Le retour aux coopératives adhérentes d’Ucal est également bon : nous avons reversé 20 euros/t aux adhérents, ainsi que 20 euros/t sur les tourteaux reversés aux adhérents éleveurs. La récolte 2023 permettra d’assurer largement l’approvisionnement de l’usine, avec une grande proportion de colza et de tournesol, la sole de soja peinant, pour sa part, à évoluer ». Le soja, justement, c’est tout l’objet de la filière mise en place par Oxyane, autre groupe coopératif d’Aura implanté sur dix départements. Son vice-président, Xavier Vincent, a expliqué que le groupe travaille déjà avec l’usine de trituration Extrusel de Chalon-sur-Saône, qui dépend de la coopérative Bourgogne du Sud, elle-même partie intégrante d’Alliance BFC, au côté des coopératives Dijon Céréales et Terre Comtoise.

Parier sur de nouvelles variétés en soja

Dans ce contexte, Oxyane a donc opté pour un outil de transformation entièrement dédié au soja. 30 000 t de tourteaux sont consommés chaque année par les adhérents du groupe et en complément du choix de cet outil, Oxyane s’est aussi impliquée dans l’union de coopératives Top Semence : le but est de sécuriser la recherche pour les futures variétés. « On recherche notamment des variétés de soja moins gourmandes en eau, précisait Xavier Vincent. Nous souhaitons que les producteurs aient des semences certifiées garanties non OGM. C’est un dossier qui réclame l’implication conjointe des comités de pilotage Production animale et végétale au sein de la coopérative ». Une approche qui démontre aussi que structurer une offre régionale en matière de protéines végétales nécessite de développer une vision globale qui n’ignore aucun des aspects complexes de la question.