Énergie
Réussir son bâtiment photovoltaïque

Chloé Monget
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Afin d'épauler les exploitants dans la conception et la mise en place de leur bâtiment photovoltaïque, la Chambre d'agriculture de la Nièvre proposait une journée dédiée, le 20 octobre à La Nocle-Maulaix. 

Réussir son bâtiment photovoltaïque
Étienne Bourgy rappelle qu'un nettoyage régulier des panneaux est préconisé tous les 3 à 5 ans.

« Nous avons de plus en plus de demandes sur ce sujet » pointent Étienne Bourgy et Perrine Raverat, respectivement conseiller Énergie et conseillère élevage bovins et bâtiment à la Chambre d’agriculture de la Nièvre. Afin de répondre à ces requêtes, une journée ciblée sur les bâtiments photovoltaïques était organisée le 20 octobre à la Nocle Maulaix, avec visite de l’exploitation de Claude Blaise (Le Gendre) dont le bâtiment photovoltaïque est sorti de terre en 2018 – via une SAS. Cette rencontre fut suivie par une dizaine de participants.

Cibler son projet

Ainsi, une présentation générale du photovoltaïque en Nièvre a été faite, suivie par un détail de points plus spécifiques comme la production électrique des panneaux en fonction de leur inclinaison et de leur orientation. Aujourd’hui grâce au nouvel arrêté tarifaire plafonnant la production rachetée à plein tarif à 1 100 heures, le photovoltaïque s’installe sur des bâtiments orientés d’Est en Ouest sur nos pentes classiques. Étienne Bourgy évoque que « Les tarifs de rachats sont régis par l’arrêté d’octobre 2021 (1) (modifié par celui de février 2023 (2) puis de juillet 2023 (3)) » avant de rappeler que : « Tous les contrats sont signés pour 20 ans ». Les options de valorisation ont ensuite animé les échanges, avec trois possibilités mises en avant : « vente en totalité, autoconsommation avec vente ou non du surplus ou encore l’autoconsommation totale (hors réseau ou avec raccordement) ». Étienne Bourgy stipule : « il faut cibler ses besoins et définir son projet précisément avant d’opter pour l’une de ces solutions. Dans tous les cas, il est nécessaire de penser qu’en plus du prix des panneaux et celui du bâtiment, il faudra compter celui du raccordement – qui est souvent difficile à estimer. Plus le transformateur sera loin des onduleurs du bâtiment, plus l’addition sera élevée ». Afin d’avoir une certaine idée du positionnement des transformateurs déjà en place une carte Enedis existe : https://data.enedis.fr/pages/cartographie-des-reseaux-contenu/

Surveillance nécessaire

Durant les discussions, la production d’énergie et sa revente se sont apparentées à « gagner sans rien faire ». Mais les conseillers de la Chambre d’agriculture nuancent : « un entretien régulier des panneaux est nécessaire et permet un gain de production de 4 à 6 %. De plus, une surveillance quotidienne du bon fonctionnement des onduleurs est indispensable pour noter tout dysfonctionnement pouvant entraîner une perte d’énergie et donc de rendement ». Sur ce point, Claude Blaise raconte quelques mésaventures : « En élevage, on salit davantage avec le paillage quotidien de la toiture, il faut laver les panneaux plus fréquemment. Dorénavant, je n’attendrai pas cinq ans pour les nettoyer. Il faut aussi prendre garde au réenclenchement du disjoncteur général : car il faut rester en appui environ 10 secondes pour que la remise en route soit effective ». Étienne Bourgy précise que la très grande majorité des onduleurs sont fiables et que même s’ils devaient être changés dans les 20 prochaines années, la provision est prévue au budget. Il n’y a donc pas de surprise sur la rentabilité finale de l’investissement. Il insiste aussi : « Le choix des installateurs doit être fait avec prudence et une qualification est un gage de garantie. Ainsi, vous pouvez la vérifier sur www.qualibat.com/particulier ou www.qualifelec.com/rechercher ou encore www.quali-enr.org/annuaire ». Afin de donner une idée du rendement financier que peut produire une installation, celle de Claude Blaise a été prise en exemple : « Depuis 2018 la production avec environ 925 m2 de panneaux correspond aux prévisions initiales ». Suite à cela, le cadre fiscal fut remémoré : « les bénéfices peuvent être déclarés comme agricoles sous conditions : l’exploitant doit être au régime d’imposition « au réel » et les recettes provenant de ces activités, majorées des recettes des autres activités ne doivent excéder ni 50 % des recettes tirées de l’activité agricole, ni 100 000 euros (4) ». Sur ce point fiscal, il est nécessaire de consulter son comptable en amont du projet pour bien intégrer la vente d’énergie dans ou en dehors de l’entreprise.

Construction

Côté bâtiment, Perrine Raverat rappelle que certains points doivent être pris en compte lorsque le toit supporte des panneaux : « l’orientation des toitures a un rôle primordial dans le positionnement du nouveau bâtiment. À cette caractéristique, s’ajoutera celle du terrain (terrassement ou éloignement des habitations, etc.). En fonction, il pourra être pertinent de bien choisir ses matériaux pour se fondre au maximum dans le paysage – d’ailleurs, dans les zones classées Bâtiments de France, l’utilisation de panneaux dit « Full Black » sont plus appréciés. De plus, si un effort est fait sur les extérieurs, il est probable que le projet soit mieux accepté par les éventuels voisins ». Pour les onduleurs, leur emplacement devra être réfléchi pour correspondre aux préconisations : « le local doit être isolé du bâtiment et à plus de 6 m des animaux ». Les deux conseillers martèlent : « si la mise à la terre des panneaux est faite, celle du bâtiment devra aussi l’être. Le constructeur ne le fera pas car ce n’est pas son métier. Une absence ou une mauvaise mise à la terre d’un bâtiment ou de tous les éléments métalliques (cornadis, barres au garrot, etc.) peuvent avoir des conséquences sur le bien-être animal et potentiellement sur leur état sanitaire : abreuvoir sous tension, concentration des animaux dans un endroit du bâti, etc. ». D’autres paramètres sont aussi à prendre en compte comme la luminosité, ou les mouvements d’air : « si un bâtiment à un volume trop important, la chaleur aura du mal à s’évacuer et l’air aura tendance à se refroidir assez vite, là encore c’est le bien-être animal qui entre jeu, notamment ». Perrine Raverat ajoute qu’il faudra toujours intégrer son projet dans une vision globale de l’exploitation afin qu’il puisse se moduler facilement au fil du temps. Claude Blaise conclut : « nous avions besoin d’un nouveau bâtiment et le photovoltaïque permet d’avoir une certaine assurance pour le recouvrement des mensualités. De plus, si l’installation est faite en nom propre, cela offre une certaine rente pour la retraite notamment. Il faut bien réfléchir son projet à court, moyen et long terme afin d’opter pour les options fiscales et architecturales qui conviennent le mieux à l’exploitant et à l’avenir de sa ferme ».

(1) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044173060
(2) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047183612
(3) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047835995
(4) https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000017898955/2007-12-28