Chambre d'agriculture 1/2
Gestion de l'eau, NNI, S-métolachlore … Ce qu'il faut retenir de la session

Christopher Levé
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La session de la Chambre d'agriculture de l'Yonne a eu lieu le jeudi 23 février, à Auxerre. Divers points ont été abordés, parmi lesquels la gestion de l'eau dans le département, l'interdiction des néonicotinoïdes, ou encore la potentielle interdiction de l'utilisation du S-métolachlore.

Chambre
Arnaud Delestre, président de la Chambre d'agriculture de l'Yonne.

« La question du partage de l’eau a été très présente dans l’actualité de cet hiver », lance Arnaud Delestre, président de la Chambre d’agriculture de l’Yonne. Les travaux du PTGE (programme territorial de gestion de l’eau) sur les bassins de l’Armançon et du Serein ont été tendus, notamment parce qu’ils étaient concomitants avec la révision du règlement du SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des eaux) de l’Armançon. « Les travaux du PTGE doivent aboutir à un plan d’action global d’ici juin 2023 et des groupes de travail se réuniront sur mars et avril », assure Arnaud Delestre.
L’agriculture est concernée par les questions de gestion des milieux humides (drainage et autres aménagements, bâtiments et rejets) et de prélèvements d’eau (abreuvement, irrigation, aspersion antigel). « Les faibles pluies automnales et hivernales, même si elles ont été favorables au développement végétatif des plantes, n’ont pas permis la recharge complète des réserves utiles des sols et encore moins celle des nappes phréatiques. Sauf épisodes de pluie importants sur le mois de mars, les besoins en eau des cultures risques de se faire sentir rapidement ».
Les premières irrigations débutent fin mars. La Chambre a décidé de mettre en place précocement son information aux irrigants ayant fait des demandes d’eau dans le cadre de l’autorisation collective de prélèvements 2023. La question de sobriété de l’utilisation de l’eau est un vrai sujet pour les exploitations agricoles, tant pour les cultures que pour l’abreuvement des animaux. Un appel à projet France AgriMer vient de s’ouvrir (du 13 février au 31 décembre 2023) et a pour but d’aider des investissements permettant d’améliorer la résilience individuelle des exploitations agricoles face aux aléas climatiques.

L’interdiction des NNI, une décision « brutale »

Autre sujet développé lors de la session de la Chambre d’agriculture du 23 février : l’interdiction des NNI (néonicotinoïdes). « Le 19 janvier 2023, la Cour de Justice européenne a statué : « Les États membres ne peuvent pas déroger aux interdictions de mise sur le marché et d’utilisation de semences traitées à l’aide de produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes » », cite Arnaud Delestre. « Cette décision de ne pas déroger à l’interdiction des NNI est brutale, alors que les alternatives ne sont pas au point, ni disponibles pour les agriculteurs qui se retrouvent mis au pied du mur ».
À quelques semaines des semis, les agriculteurs sont dans l’impasse. Si le PNRI (plan national de recherche et d’innovation) a été mis en place, « il n’apporte pas encore d’alternatives aux NNI », juge le président de la Chambre d’agriculture Icaunaise. « Il est urgent de trouver des réponses adaptées pour permettre aux betteraviers de l’Yonne et de France de continuer à cultiver de la betterave et fournir aux 67 millions de Français le sucre, le bioéthanol et le gel hydroalcoolique dans un contexte de recherche de souveraineté alimentaire et énergétique ».
Arnaud Delestre l’assure, « cette situation n’est pas sans conséquence et fragilise la filière. La stabilité des emplois (environ 46 000 dans le domaine) est concernée. En cas de jaunisse, une forte hausse des importations extérieures de sucre sera inévitable », déplore-t-il.

Vers la fin du S-métolachlore ?

Une interdiction qui en appelle une autre ? C’est ce que craint le président de la Chambre d’agriculture au sujet du S-métolachlore, un herbicide utilisé en France sur des cultures de printemps comme le maïs, le tournesol, la betterave, le sorgho ou encore le soja. « Cette molécule se dégrade rapidement en métabolites qui sont très mobiles dans l’eau et qui sont donc fréquemment détectés au-delà du seuil de potabilité dans les eaux destinées à la consommation humaine. À la différence des « chlores du colza » (métazachlore et dimétachlore), les métabolites du S-métolachore sont classés « pertinents » dans le cadre de la réglementation sur l’eau potable. Cela signifie que la norme de potabilité pour l’eau potable qui s’applique à ces métabolites est de 0,1 µg/l », détaille Arnaud Delestre.
L’Anses (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation) vient d’engager une procédure de retrait des principaux usages des produits contenant du S-métalachlore pour réduire la contamination des milieux. Aujourd’hui, même si le retrait n’est pas total, il va concerner de nombreux usages. « L’enjeu principal va être la gestion des graminées (notamment le ray-grass) dans les rotations. Des travaux sur ce thème sont engagés sur certains BAC animés par la Chambre d’agriculture et des leviers commencent à être mis en œuvre par les agriculteurs ».
Lors de la session, Marine Raffray, du réseau Chambres d’agriculture France, est intervenue sur l’agriculture française et sa situation, un an après le début de la guerre en Ukraine. Un sujet sur lequel nous reviendrons lors de l’édition de la semaine prochaine, de votre journal Terres de Bourgogne (n° 1722).

Les Trophées de l'agriculture le 30 mars

Organisés par l’Yonne Républicaine, avec le soutien de la Chambre d’agriculture de l’Yonne, CerFrance BFC, le Crédit Agricole Champagne Bourgogne, Groupama Paris - Val-de-Loire et le Conseil départemental, les Trophées de l’agriculture auront lieu le jeudi 30 mars, à Auxerrexpo.
Cet événement est l’occasion de mettre en l’engagement, l’investissement et les idées de celles et ceux qui font vivre l’agriculture Icaunaise par des savoir-faire et différentes initiatives.
18 candidatures ont été retenues et concourent pour l’un des trophées suivants : le développement durable, l’innovation, la création de valeur, réussir ensemble, dynamique de territoire, installation/transmission. Aussi, le public désignera un prix coup de cœur lors de la soirée.