Santé animale
Les antibiotiques, une pratique moins automatique

Léa Rochon
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Fruit des plans Écoantibio 1 et 2, l’usage des antibiotiques en médecine animale est en constante diminution depuis 2011. Le principe de traiter moins, mais mieux, a été très bien assimilé par les éleveurs. Un nouveau plan Écoantibio 3 a été lancé en 2023. Sa nouveauté est d’élargir le spectre aux antimicrobiens et aux antiparasitaires, deux sources d’inquiétude pour les vétérinaires et les éleveurs.

Les antibiotiques, une pratique moins automatique
Le plan Ecoantibio 3 cible un élargissement du spectre aux antimicrobiens et antiparasitaires, source d'inquiétude pour les éleveurs.

C’est un chiffre qui fait la fierté du gouvernement : entre 2011 et 2022, l’exposition aux antibio­tiques en France a diminué de 52 %. Celle à certains antibiotiques critiques, comme les céphalosporines de 3e et 4e générations, a quant à elle baissé de plus de 90 %. Ces résultats sont en grande partie le fruit des plans Écoantibio 1 (2012-2016) et Écoantibio 2 (2017-2021), initiés par les vétérinaires, le monde de l’élevage, les chercheurs et les pouvoirs publics. « Ces deux premiers plans ont même été plus efficaces que ceux à quoi nous aurions pu nous attendre, confie le directeur du Groupement de défense sanitaire (GDS) Auvergne-Rhône-Alpes, Romain Persicot. Le slogan initial était de traiter moins, mais mieux, ce qui a été très bien assimilé par les éleveurs. »

Maintenir les niveaux actuels

Selon le ministère de l’Agriculture, les réductions d’exposition aux antibio­tiques demeurent moins marquées chez les animaux de compagnie. « En définitive, les deux premiers plans étaient une belle réussite pour les animaux de rente, car ils étaient les principaux visés, mais cette affirmation est moins vraie pour la catégorie des animaux de compagnie, affirme Romain Persicot. Or, ces animaux sont directement au contact de l’humain, ce qui peut avoir comme conséquence des transferts de résistance aux antibiotiques. » Depuis 2018, cette résistance bactérienne chez l’animal concerne surtout la bactérie E. coli à l’amoxicilline avec ou sans acide clavu­lanique. La préservation des faibles niveaux d’exposition des animaux aux antibiotiques pour toutes les espèces est ainsi devenue une priorité de santé publique. Le plan Écoantibio 3, lancé en 2023 pour une durée de 5 ans, a doréna­vant un tout autre objectif. Il vise à réduire de 15 % l’exposition des chiens et des chats aux antibiotiques au cours des cinq prochaines années. Côté élevage, le ministère assure que le plan main­tiendra les niveaux actuels d’exposi­tion aux antibiotiques, sans toutefois annoncer de chiffrage, tant la marge de manœuvre est réduite au regard des bons résultats déjà obtenus.

Antimicrobiens et antiparasitaires dans le viseur

Quelques nouveautés figurent tout de même au menu de ce troisième volet. L’accent sera mis sur le rappel des règles de biosécurité. « Il s’agit du premier rempart à l’utilisa­tion des médicaments, insiste Romain Persicot. Dans 80 % des cas, ce sont d’ailleurs des règles déjà mises en place, comme le fait de dépister des animaux à l’introduction, d’installer un pédiluve à l’entrée de la stabulation, de gérer les nuisibles vecteurs de certaines maladies et qui peuvent souiller l’alimentation ou encore de bien nettoyer le matériel et d’isoler des animaux malades dans des box dédiés et écartés de l’exploitation. » Surtout, Écoantibio 3 sera élargi aux antimicrobiens et aux antiparasitaires et ne se restreindra plus aux seuls anti­biotiques. « Nous sortons du cadre histo­rique en intégrant les antifongiques et les antiprotozoaires (1), explique le ministère de l’Agriculture. Les éleveurs constatent et s’inquiètent d’une perte d’efficacité thérapeutique des antiparasitaires. » Une décision jugée judicieuse par le directeur du GDS Auvergne-Rhône-Alpes, pour qui, à force de traitements par excès ou de mauvaises applications, il devient difficile de lutter contre les parasites.

Note de bas de page : (1) L’antiprotozoaire désigne une substance ou un médica­ment qui a pour objectif de combattre les infections causées par des protozoaires, qui sont des organismes unicellulaires, souvent parasites, responsables de diverses maladies chez l’homme et les animaux.