Conférence
Mise au point sur la méthanisation

Chloé Monget
-

Dans le cadre d’un Projet d’initiative de communication (PIC), trois élèves en BTS productions animales du lycée agricole de Challuy ont organisé une conférence sur la méthanisation, le 9 mars dernier à Saint-Saulge.

 

Mise au point sur la méthanisation
Le but de la conférence, organisée à Saint-Saulge, était de faire le point sur les divers tenants et aboutissants d'un méthaniseur.

Le 9 mars à Saint-Saulge, Léana Laveau, Suzanne Kruizinga, et Audric Hofer (tous les trois 19 ans et élèves en BTS productions animales du lycée de Challuy) proposaient une conférence sur la méthanisation, dans le cadre d’un Projet d’initiative de communication (PIC). « Nous avons choisi ce thème car il est d’actualité et est porteur d’avis partagés donc source de débat » explique Suzanne Kruizinga. Audric Hofer ajoute : « nous voulions aussi mettre en avant les nouvelles technologies dans le monde agricole et les alternatives possibles en matière de diversification agricole ». Léana Laveau poursuit : « nous voulions exposer aux agriculteurs les démarches et les aboutissants (investissements, contrats, raccordement) pour une création d’un méthaniseur ». Pour mettre au point cette conférence, les élèves ont eu l’aide de la Chambre d’agriculture de la Nièvre, par le biais d’Étienne Bourgy, chargé de mission Énergie et agroforesterie.

Des préjugés

Pour cette conférence, plusieurs invités ont été sollicités dont Vincent Gallois, chargé de mission Énergie à la Chambre d’Agriculture de l’Yonne, qui pointe : « cette conférence est très intéressante car elle met en lumière l’engagement des jeunes sur l’organisation d’une telle réunion, et sur un sujet parfois sensible ». Sur ce dernier point, il spécifie par exemple : « les odeurs ou encore les risques d’explosions » avant d’ajouter : « Ce sont des préjugés qui ne sont plus d’actualité aujourd’hui. La plupart des gens pensent savoir ce qu’est un méthaniseur, mais finalement certaines connaissances sont erronées. Il n’y a ni odeur – quand le méthaniseur est bien tenu – ni risques d’explosion ou risques pour la santé ou encore les nappes phréatiques, que sais-je encore ! ».

Une problématique spécifique

Jean-Charles Collin, autre conférencier pour l’occasion et ingénieur en développement gaz vert à GRDF précise : « dans le centre de la Nièvre, il n’y a pas beaucoup de postes source pour injecter le gaz et donc moins de réseaux pour le faire transiter. C’est une preuve d’une certaine désertification de ce territoire. Mais, nous travaillons à trouver des solutions pour y pallier afin de proposer une énergie verte à une majorité d’habitants ».

Valorisation

Didier Guyon, élu à la Chambre d’agriculture de la Nièvre en charge du dossier eau et énergie renouvelable martèle : « les projets de méthaniseurs sont intéressants, ils permettent d’acquérir une certaine autonomie énergétique sur nos fermes en termes de dépendance aux engrais, cela prend d’ailleurs tout son sens aujourd’hui avec la crise Ukrainienne. De plus le prix connu et fixé pour 15 ans de rachat du biométhane où de l’électricité donne une stabilité financière à nos exploitations. Les méthaniseurs sont une nouvelle branche dans la diversification des exploitations agricoles et il est indispensable de s’en saisir maintenant ». Jean-Charles Collin enchérit : « nous sommes aujourd’hui dans une réflexion de remise à niveau du prix de rémunération pour les fournisseurs, afin que la vente du gaz issu de la méthanisation soit plus intéressante pour eux face aux prix pratiqués sur le marché pour le gaz importé. Mais, il ne faudra pas rater l’occasion ! D’autant plus lorsque l’on sait qu’un projet met 2 à 8 ans à voir le jour ».

La force du groupe

Vincent Gallois rappelle tout de même qu’une exploitation seule ne peut pas, dans la majorité des cas, alimenter un méthaniseur afin qu’il soit rentable : « il est préférable d’avoir 3 à 4 exploitants ou industriels qui alimentent régulièrement le méthaniseur. De plus, cela permet de répartir l’investissement de départ ; intéressant quand on sait qu’il faut 1 à 5 millions d’euros pour en mettre un en place. Seul problème, il faut se mettre d’accord sur le projet et cela peut être ardu ». Il conclut en préconisant : « d’avoir toutes les clefs en mains et surtout des personnes motivées pour mettre sur pied un tel projet, car les démarches sont parfois longues et fastidieuses ».

Le méthaniseur

Vincent Gallois rappelle que la substitution totale des énergies fossiles ou centrales nucléaires en énergie verte, via les méthaniseurs est délicate. « En effet, pour ce faire, il faudrait potentiellement 1 200 installations de 10 000 t de Cultures Intermédiaires à Valorisation Énergétique soit 8,2 Gwh de gaz injecté par an ; ce qui n’est pas rien ». Pour rappel, la France compte actuellement environ 383 installations de méthanisation en injection et 850 en cogénération (chaleur + électricité). Il souligne également que le procédé de méthanisation est « lié à l’activité microbienne naturelle en l’absence d’oxygène qui conduit à la dégradation de la matière organique en gaz carbonique et méthane principalement. Donc, le tout est complètement naturel ». Pour l’alimenter, il peut y être introduit : fumier, lisier, déchets de tontes, feuilles, boues des stations d’épurations, huile alimentaire usagée, graisse d’abattoirs, etc. Il détaille diverses familles de méthaniseurs : « la voie humide continue, la voie sèche continue ou discontinue en garage, la voie sèche par percolation et enfin par immersion ». Outre le gaz ou l’épandage du digestat dans les prés, une autre valorisation est mise en lumière par Vincent Gallois : « la chaleur produite par le méthaniseur peut servir à chauffer des bâtiments, à sécher du fourrage ou encore à du bois ».