Évènement
Colère agricole : et maintenant ?

Berty Robert
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La Chambre régionale d’agriculture de Bourgogne-Franche-Comté organise, le 12 mars, un événement dont l’objectif est de revenir sur les manifestations agricoles de ces dernières semaines et dessiner les perspectives de sortie de crise.

Colère agricole : et maintenant ?
Avec cet événement, la Chambre d'agriculture régionale de BFC souhaite ouvrir une réflexion sur le mouvement de colère agricole qui s'est exprimé, et sur les suites à lui donner.

Le caractère inédit du mouvement de colère agricole qui a marqué ce début d’année incite à s’interroger sur de multiples points : n’a-t-on rien vu venir ? La base a-t-elle plus poussé les syndicats à se mobiliser que l’inverse ? Que faire à des nombreuses revendications exprimées ? Il y a aujourd’hui plus de questions que de réponses mais l’évènement, organisé mardi 12 mars à Longvic, près de Dijon, par la Chambre régionale d’agriculture de Bourgogne-Franche-Comté (BFC) dans les locaux de Dijon Céréales, ambitionne d’apporter des éléments de réponses et des mises en perspectives, à travers plusieurs interventions. Intitulé « Colère et désarroi du monde agricole, un mouvement inédit : et maintenant ? » il permettra d’entendre le politologue et directeur du département Opinion et Stratégies de l’Ifop, Jérôme Fourquet. Bon connaisseur du secteur agricole, orateur passionnant, il fournira une analyse de la situation et de ses racines (voir encadré). Il apportera aussi des éléments permettant d’imaginer ce que cette crise agricole pourrait engendrer.

Table ronde avec les présidents de Chambres

La matinée se poursuivra avec une intervention (en vidéo) de Serge Papin, ex-pdg de Système U et aujourd’hui administrateur à Auchan Retail International. Il fournira sa vision d’acteur de la grande distribution qui fut aussi impliqué dans la conception de la loi Égalim. Le public pourra ensuite aller plus loin dans la réflexion grâce à la présence, pour une table ronde, de l’ancien ministre de l’Agriculture (2018-2020), Didier Guillaume, de Nicolas Soret, maire de Joigny, dans l’Yonne, et vice-président du Conseil régional de BFC en charge des finances, du développement économique, de l’économie sociale et solidaire et de l’emploi. Table ronde à laquelle participeront les présidents des Chambre d’agriculture de tous les départements de BFC : Vincent Lavier (Côte-d’Or), Didier Ramet (Nièvre), Arnaud Delestre (Yonne), Bernard Lacour (Saône-et-Loire), Philippe Monnet (Doubs et Territoire de Belfort), Thierry Chalmin (Haute-Saône) et François Lavrut (Jura). Chacun apportera un éclairage et une analyse sur la manière dont la colère paysanne a été perçue, comprise, à des échelons locaux, régionaux et nationaux. Les travaux de cette matinée seront aussi accessibles aux étudiants de l’enseignement agricole, qui pourront la suivre à distance.

Note : mardi 12 mars à partir de 9 h 15 chez Dijon Céréales, 4, boulevard de Beauregard à Longvic. Évènement ouvert à tous. Inscription sur le lien suivant : https://forms.office.com/e/JsarDdETt9

Les points saillants de l'analyse de Jérôme Fourquet

Le politologue Jérôme Fourquet, lors de son intervention du 12 mars, abordera les axes principaux qui, selon lui, sous-tendent et caractérisent le mouvement de colère paysanne qui s’est exprimé. Il y a, pour lui, l’empilement de normes, la complexité administrative, l’inflation normative, qui sont des points que l’on retrouve plus largement dans la société française, chez les artisans, les petits patrons, les maires de petites communes rurales. Il y a aussi les difficultés financières, le sentiment que l’on devient des « ouvriers d’État de la production agricole » à qui l’on dit quand il faut semer, traiter, quand on doit rentrer dans les champs, et tout cela sous la supervision de satellites. « Être un chef d’exploitation indépendant, souligne Jérôme Fourquet, est l’une des dimensions essentielles d’un agriculteur. Mais beaucoup ont le sentiment qu’ils n’ont plus la main sur la fixation des prix des productions et sur la manière de mener à bien leur travail ». Le politologue abordera par ailleurs un autre fait notable constaté sur ce mouvement de colère : le rôle joué par les réseaux sociaux. « On peut, remarque-t-il, faire le parallèle avec le récent mouvement de grève des contrôleurs de la SNCF où tout s’est structuré sur Facebook, en dehors du champ syndical. On a là deux professions qui sont pourtant fortement encadrées syndicalement. On a le sentiment que dans ces deux cas, le mouvement n’a pas été pensé par les organisations syndicales stricto sensu même si elles sont ensuite entrées dans la danse. Cela dit quelque chose sur notre époque et sur le phénomène de « désintermédiation » qu’on peut constater ». Enfin, l’intervention de Jérôme Fourquet mettra le doigt sur le sentiment d’isolement et d’incompréhension vis-à-vis du reste de la société, ressenti par les agriculteurs : « l’impression de ne plus représenter que le « dernier carré » d’un secteur professionnel qui, jadis, était très puissant et pesait d’un fort poids démographique dans la société française ».