Soirée élevage de la FDSEA 58
Une limpidité relative

Chloé Monget
-

La FDSEA 58 organisait sa traditionnelle soirée élevage le 17 novembre dernier à Rouy. Elle avait pour thème l'eau ; sujet très sensible pour certains... 

 

Une limpidité relative
Certains échanges ont été vifs, entre la DDT et la salle, lors de la soirée élevage de la FDSEA 58, le 17 novembre dernier. Ici de gauche à droite : Marc Séverac, directeur adjoint de la DDT, Mathieu Dourthe, chef du service eau, forêt, biodiversité de la DDT, Thierry Ferrand, pédologue de la Chambre d'agriculture de la Nièvre, Perrine Raverat, conseillère élevage bovin et bâtiments de la CA 58, Romaric Gobillot, président de la section bovine de la FDSEA 58 et Aurélie Prégermain, animatrice de la section bovine de la FDSEA 58.

Le mécontentement grogne de certains exploitants agricoles était palpable lors de la soirée élevage de la FDSEA 58 du 17 novembre dernier ; en cause, la réglementation sur l’eau – thème de cette année. Romaric Gobillot, président de la section bovine de la FDSEA 58 insiste : « Au vu des dernières années que nous venons de passer, il nous semblait pertinent de nous attarder sur cet enjeu majeur. Le monde agricole cherche des solutions fiables et durables afin de se passer de l’eau prélevée sur le réseau ; tout en maintenant la qualité des productions ».

Quelques conseils

Pour aborder cette thématique, divers intervenants étaient conviés comme la Chambre d’agriculture de la Nièvre (CA 58). Perrine Raverat, conseillère élevage bovin et bâtiments, a fait une piqûre de rappel sur les pratiques idéales à avoir : « les recommandations ne sont pas les mêmes qu’il y a quelques années, car les modalités de productions ont évolué, notamment sur le bien-être animal » avant d’ajouter : « par exemple, il est nécessaire d’avoir un débit important afin que les abreuvoirs se remplissent le plus rapidement possible pour que les animaux n’attendent pas, idem, il faut assez de place pour que chacun puisse boire, sans avoir à patienter ». Elle a rappelé les diverses manières de se passer de l’eau du réseau pour l’abreuvement, comme, notamment, avec l’installation d’une pompe solaire, une pompe bélier, etc. De son côté Thierry Ferrand, pédologue, a évoqué les zones humides et l’accompagnement de la CA 58 pour la réalisation de diagnostic Zone humide en vue d’un projet hydraulique (plan d’eau, par exemple). Il a rappelé la différence entre les zones et les milieux humides. Les premières étant : « des terrains exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau […] de façon permanente ou temporaire ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hydrophiles pendant au moins une partie de l’année ». Les seconds regroupent eux : « des espaces définis par la convention de Ramsar (1) qui englobe certains milieux souterrains, marins ou encore les cours d’eau, en plus des zones humides ». Il insiste « il n’existe aucune portée réglementaire avec le terme milieu humide sur un projet hydraulique », en d’autres termes rien ne les régit. Didier Ramet a de son côté évoqué a mise en place du dossier Partage, pour impliquer tous les acteurs du territoire afin de trouver des solutions au manque d’eau qui se profile pour les prochaines années.

La réglementation

La Direction Départementale des Territoires (DDT) était également présente (avec Marc Séverac, Directeur adjoint, et Mathieu Dourthe, chef du service eau, forêt, biodiversité) afin de rappeler les aspects réglementaires des prélèvements d’eau à usage agricole. Marc Séverac insiste : « Avant tout projet il faut quantifier le besoin, identifier le moyen de répondre à ce besoin, bien le dimensionner car ce sont des projets coûteux et se faire accompagner dans la conception de son projet (CA 58, DDT, bureau d’études). Pour les aborder, il faut respecter deux corpus : la loi sur l’eau et les milieux aquatiques mais aussi les prescriptions du schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE Loire Bretagne ou Seine Normandie) ». Mathieu Dourthe a souligné que « parfois un forage est fait pour rien, car les essais nécessaires à sa mise en fonction montrent un impact trop important sur les autres utilisateurs de l’eau dans le secteur – empêchant donc l’octroi de l’autorisation de prélèvement ». Les retenues de substitution ont aussi été abordées : barrage sur cours d’eau à éviter, retenue en dérivation de cours d’eau, en communication de façon discontinue en aval, sans communication avec un cours d’eau - un article plus détaillé sur les points réglementaires présentés par la DDT sera prochainement publié. Mathieu Dourthe a mis en évidence les divers problèmes que ce type de retenues pouvaient engendrer sur la biodiversité et sur l’écoulement des eaux (retenues de sédiments, ruptures de la continuité écologique, entre autres).

La lame de fond

Ensuite, et c’est là où les voix se sont élevées dans la salle, la définition des cours d’eau et de l’utilisation des cartographies des cours d’eau ont été soulevées par la salle considérant que « certains fossés sont classés abusivement en cours d’eau, rendant impossible un quelconque entretien ». La DDT, de son côté, affirme que les cartes sont mises à jour, par ses soins, régulièrement avec des contrôles de terrain, mais qu’il est aussi possible de déclasser des cours d’eau. De nombreux dossiers individuels ont été évoqués, en soulignant des « pratiques manquant de logique » comme la demande de remise en état « d’un étang créé sous Napoléon qui a été déboutée ». Certains ont mis en exergue que : « Les anciens ont assaini les champs que l’on cultive aujourd’hui et l’entretien des éléments déjà mis en place n’est plus possible pour des raisons réglementaires déconnectées de tout bon sens paysan ». Enfin, le manque de réactivité de l’administration sur des dossiers en cours a été pointé : « Nous devons être réactifs, et nous n’avons jamais droit à l’erreur à la différence des institutions qui nous régissent et qui, elles, prennent bien leur temps pour daigner nous répondre, quand elles le font ». Marc Séverac a assuré vouloir : « améliorer les procédures pour plus de compréhension, et pourquoi pas établir une doctrine locale afin que le dialogue soit constructif ». Emmanuel Bernard, président de la FDSEA 58, conclut : « Les lois et les réglementations sont faites pour être modifiées, mais pour cela il faut être uni face à cet enjeu qu’est l’accès à l’eau. Nous, exploitants, ne voulons qu’une chose : pouvoir continuer d’abreuver nos animaux, tout en respectant l’environnement et les autres usagers – ce respect doit, d’ailleurs, être mutuel. Dans tous les cas, l’administration est là pour appliquer la loi, ce n’est pas elle qui la fait. Il ne faut donc pas se tromper de cible ».

(1) http://www.zones-humides.org/entre-terre-et-eau/ou-les-trouve-t-on/les-sites-reconnus/les-sites-ramsar-en-france