Semis de printemps
Des voleurs à deux ailes

AG
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La Ferme de Bel Asile, à Saint-Colombe-sur-Seine, a dû resemer 35 ha de tournesol après d’importants dégâts de corbeaux et autres volatiles.

Des voleurs à deux ailes
Joffrey Delaire, le 11 mai, sur sa parcelle impactée près de Châtillon-sur-Seine.

Comment semer 70 ha de tournesol sur une parcelle de 35 ha ? Joffrey Delaire connaît la réponse : en resemant… Ce jeune exploitant agricole de Sainte-Colombe-sur-Seine a connu cette mésaventure après des attaques d’oiseaux dès le début de ses semis le 15 avril : « Les corbeaux sont les principaux responsables, mais il y a aussi d’autres espèces comme des pigeons. Les problèmes de ce genre sont assez localisés dans le secteur, mais avec mon père, nous sommes loin d’être les seuls à avoir resemé. C’est une vraie problématique : les corvidés étaient derrière nous dès que nous avons commencé à gratter le champ… C’est bien la première fois que nous avons autant de dégâts, c’est même du jamais vu chez nous ». Joffrey Delaire se montre quelque peu désabusé devant l’inefficacité de ses moyens de lutte : « nous avions pris les devants en installant un tas de dispositifs, dont un canon et un autre matériel imitant le bruit de rapaces. Cela n’a servi à rien… À l’évidence, les corbeaux s’habituent très vite au bruit. Pour les effaroucheurs visuels et dynamiques, le constat est le même… L’autre jour, il y avait trois corbeaux au pied d’une installation, ils paraissaient très tranquilles… ».

Nouvelle tentative, sans garantie

Joffrey Delaire a passé « la vitesse supérieure » en termes de prévention, lors de son resemis intégral du 6 mai : « nous avons installé encore plus d’effaroucheurs que la première fois, aux contours et à l’intérieur de la parcelle, mais sans la moindre certitude de résultat. À la différence des premiers semis, nous avons utilisé un répulsif en traitement de semences, avec un goût censé dissuader les ravageurs. Cela a-t-il marché ? Nous ferons le bilan seulement dans quelque temps car des corbeaux, il y en a encore beaucoup… Je me demande combien de graines ces derniers peuvent manger en une seule journée, je pense que c’est très impressionnant. Ces oiseaux agissent par bandes de cinquante, je ne sais pas combien il peut y en avoir au total ici ».

Une première et une dernière

L’agriculteur côte-d’orien a déjà pris une décision pour les prochaines campagnes, celle de ne plus semer de tournesol dans ses champs à proximité de Châtillon : « cette parcelle en recevait pour la toute première fois, ce sera aussi une dernière, il y a trop de risques… L’année en cours est relativement froide et humide, non propice au développement rapide du tournesol : cela n’a sans doute pas aidé, mais quand même… Nous avons mis du tournesol cette année dans l’idée de diversifier l’assolement et nettoyer la parcelle. Ce n’était visiblement pas la meilleure des idées. Beaucoup trop de corbeaux nichent au centre de Châtillon, leurs surpopulations ne sont pas compatibles avec nos cultures. J’apprends à l’instant que des tirs sont réalisés depuis plusieurs jours à Châtillon et villages voisins, c’est une bonne nouvelle, mais il faudra voir l’impact. Même si le colza se comporte un peu mieux depuis deux ans, ce problème de volatiles réduit encore plus nos possibilités agronomiques dans le secteur. Nous ne savons plus quoi cultiver ! En attendant, la facture de ce resemis devrait approcher les 100 euros/ha, pour une note totale de 3 500 euros. Pour quel résultat ? Réponse dans quelques mois, d’autant que les corbeaux ne sont pas le seul problème. Nous avons beaucoup de limaces et d’autres ravageurs cette année… ».