Syndicalisme
On ne lâche rien

Propos recueillis par AG
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Un bureau commun FDSEA-JA21 s'est tenu le 8 février pour dresser un état des lieux des négociations. Plusieurs responsables syndicaux témoignent.

 

On ne lâche rien
Jean-Luc Gerbron.

Égalim : les contrôles s’enchaînent déjà

Jean-Luc Gerbron, délégué cantonal de Montbard, administrateur à la FNB et Interbev, évoque ici le dossier d’Égalim, plutôt en « bonne voie » selon cet éleveur côte-d’orien : « Il y a beaucoup de boulot mais j’y crois ! Jusqu’à présent, rien n’était respecté dans cette loi, aussi bien dans la grande distribution que dans les collectivités locales… La donne risque de changer, je l’espère, car le nombre d’agents contrôleurs a déjà doublé. Jusqu’à présent, ces agents étaient délégués uniquement par le Ministère de l’Économie : ils peuvent l’être désormais par le Ministère de l’agriculture, c’est une autre nouveauté. Si le travail est fait et bien fait, il devrait y avoir des avancées. Il se dit que trois ou quatre très grosses entreprises ont déjà été épinglées, avec des amendes représentant 1 ou 2 % de leurs chiffres d’affaires. Cela peut vite représenter de grosses sommes… De notre côté, nous, agriculteurs, devons maintenir la pression sur le terrain : c’est une condition essentielle à mes yeux. L’État et la Région ont eux aussi leur rôle à jouer en mettant des budgets dignes de ce nom pour aider les citoyens à manger français dans les cantines des lycées, les hôpitaux, les maisons de retraite, ou encore l’armée ! ».

Énergie : ça devrait aller plus vite

Antoine Carré, secrétaire général adjoint de la FDSEA, évoque une réunion organisée le 8 février à Dijon : « Le préfet avait réuni Enedis et EDF OA autour de la table. La DDT, la Dreal et d’autres instances étaient également présentes. Les délais beaucoup trop longs dans nos dossiers énergie, en particulier le photovoltaïque sur les toits, étaient à l’ordre du jour. Tout va être fait pour résoudre ce problème. Nous, responsables syndicaux, avons désormais les contacts des différents responsables d’agences Enedis et EDF, nous pourrons directement les relancer en cas de besoin. Ces derniers vont tout faire pour diminuer leurs délais. Les dossiers qui rencontrent les plus gros problèmes vont être remis au-dessus de la pile, ils nous l’ont assuré… Le préfet est à notre écoute : nous sentons que la donne a changé depuis les dernières manifestations. Il a mis les points sur les i avec nos interlocuteurs. Pourquoi les dossiers traînent autant ? C’est visiblement compliqué depuis l’arrêté qui a débloqué les plafonds des installations de 100 kW : le nombre de projets a triplé et tout le monde est débordé, aussi bien en ressources humaines qu’en matériels… Il y a encore quelques années, il fallait entre 1,5 et 2 ans pour finaliser une installation, il faut souvent trois ans aujourd’hui… Sur l’agrivoltaïsme, le préfet attend la sortie d’un décret pour prendre des décisions et des orientations. De prochaines discussions seront programmées pour aborder le sujet de la méthanisation ».

Aider les producteurs bios

Samuel Bulot, secrétaire général de la FDSEA, se prononce sur le dossier de l’agriculture biologique : « L’une de nos demandes concerne l’aide réservée aux conversions : à l’évidence, il n’y a plus de candidats pour passer en bio, donc l’argent dédié de cette enveloppe doit être reversé aux producteurs qui sont actuellement lancés et en souffrance. L’argent du bio doit donc rester au bio. D’autre part, nous sommes convaincus que le bon respect d’Égalim permettra de réduire le déséquilibre actuel entre l’offre et la demande. Tout ne sera pas réglé pour autant, mais une partie des volumes de production actuellement déclassés pourrait être absorbée. Plus généralement, nous voulons que le développement de l’agriculture biologique se fasse en cohérence avec le marché, chose qui n’a pas été faite ces dernières années. Concernant l’aide d’urgence attribuée à l’AB, nous demandons des critères plus cohérents, là aussi. Les jeunes qui viennent de s’installer sont beaucoup plus chargés et ne sont pas dans la même situation que des personnes en rythme de croisière ou en fin de carrière ».

Eau : le retour du bon sens ?

Frédéric Le Grand, président du syndicat des irrigants de Côte-d’Or et membre du bureau de la FDSEA, évoque plusieurs dossiers relatifs à l’eau : « Un certain nombre de réunions, notamment avec le préfet, se sont tenues depuis la fin des manifestations. Je pense que l’État a la volonté de bien faire dans plusieurs domaines, mais rien n’est encore écrit. Le combat sera encore très long et il ne faut pas s’attendre à des miracles, mais nous allons à mon avis dans la bonne direction… Il a fallu bloquer la France pour qu’un peu de bon sens vienne à l’esprit des gouvernants, c’est dramatique… Pour l’entretien de cours d’eau, les discussions vont pouvoir enfin reprendre. En ce qui concerne les arrêtés préfectoraux, nous espérons plus de souplesse, sans restrictions par principe, mais seulement lorsqu’elles sont strictement nécessaires et proportionnées. Rien n’est gagné pour autant car j’ai le sentiment que le Ministère de l’Environnement ne s’est pas encore rendu compte qu’il y avait une guerre en Ukraine avec toutes les conséquences qui en découlent… Pour le stockage de l’eau, une plus grande tolérance serait a priori constatée. Des projets de petites réserves pourraient peut-être plus facilement voir le jour, surtout pour l’abreuvement des animaux. L’esprit est là, c’est déjà ça… Mais pour tous ces points, charge à nous de transformer l’essai : des projets aboutis, et des écrits qui resteront même si la situation s’apaise ! ».

Entretien, curage… Le mot de la FDSEA

« Largement encadrées par la loi sur l’eau, toutes les procédures concernant l’entretien, la modification des écoulements, les zones humides, les drainages, les ouvrages… sont difficiles à mener jusqu’au bout. De fait, bien trop souvent, même pour des petits travaux, il faut des dossiers et études longs et coûteux, rédhibitoires au point que les demandes ne sont même pas déposées. La loi ne permet pas de faire n’importe quoi, mais elle n’a pas non plus vocation à interdire les travaux, comme nous le rappelle souvent l’administration. On est bien d’accord, mais pour que ce soit vrai dans les faits, il nous faut une interprétation pratique de la loi, facile à appréhender, qui s’installe dans le temps : c’est ce que nous demandons aux services de la Préfecture de formaliser. Et pour commencer, il faut enfin finir la cartographie des cours d’eau, sans sur-interprétation des critères réglementaires de classement : nous veillerons à ce que ce dossier soit rapidement bouclé ! ».