Ces agriculteurs sportifs qui visent le haut du podium
Joël Limouzin : "Le sport a été une réelle thérapie”

Charlotte Bayon
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Joël Limouzin, éleveur en Vendée et ancien vice-président de la FNSEA, est un ultra-trailer. Il vient de prendre sa retraite pour se consacrer pleinement à sa seconde passion : le sport. 

Joël Limouzin : "Le sport a été une réelle thérapie”
Joël Limouzin au départ de l’Ultra Marin (177 km) à Vannes le samedi 1er juillet 2023. (Crédit Joël Limouzin).

« Je me suis installé très jeune, à 21 ans, sur l’exploitation familiale avec mon frère et mes parents », raconte Joël Limouzin. Très vite, ses engagements professionnels se multi­plient. Président de la FDSEA pendant 17 ans, de la FRSEA des Pays de la Loire pendant 12 ans, il occupera parallèle­ment des responsabilités à la chambre d’agriculture de Vendée, pendant plus de 8 ans. En 2011, il est élu vice-pré­sident de la FNSEA où il siégera pour plusieurs mandats. Aujourd’hui, Joël Limouzin met un terme à une carrière professionnelle pour le moins chargée. Avec le recul, il attribue le mérite de ces années de labeur à sa passion pour le sport.

« Arrivé à 45 ans, le sport me manquait »

Footballeur, de ses 6 ans à ses 25 ans, Joël a mis un frein à sa carrière spor­tive pour se consacrer à son exploi­tation et à sa famille. « Le temps me manquait, j’ai arrêté le foot. Mais arrivé à 45 ans, je me sentais vieillir, perdre en forme et en souplesse. Il fallait que je me remette au sport », confie-t-il. L’ancien sportif se réveille donc avec l’envie de se mettre à la course à pied. « J’admirais les coureurs, je me deman­dais comment ils parvenaient à parcourir de si longue distance. Finalement, je ne suis dit : pourquoi pas moi ? ».

C’est en commençant par 5, puis 10 km, qu’il prend goût à la course et finit par ne plus pouvoir s’en passer. Adepte de dénive­lés et de beaux paysages, il privilégie les courses nature. Il s’inscrit à des compétitions, et augmente d’année en année son niveau. « Mon entourage me mettait en garde concernant ma santé : je leur ai dit que je gérais, de ne pas s’in­quiéter, et j’ai continué sur ma lancée. J’ai fait mon premier marathon à 48 ans, puis un 100 km en Vendée l’année suivante. De plus en plus, je ressentais l’envie de me dépasser, de repousser mes limites », se remémore-t-il. Et cet accomplissement ne se fit pas attendre. Lorsqu’il quitte la FDSEA en 2015, le conseil d’adminis­tration lui offre un bon pour participer à la Diagonale des Fous, un ultra-trail à l’île de la Réunion, l’un des plus dif­ficiles au monde. « 360 km, 10 000 m de dénivelé positif, c’était vraiment intense. J’ai découvert la souffrance, j’ai mis 57 heures à terminer, mais je n’ai rien lâché, par fierté et grâce au soutien de mon épouse et de ma famille. C’est le meilleur souvenir de ma vie de spor­tif », se souvient-il avec émotion. Une épreuve douloureuse mais magique, dont il tire de nombreuses leçons.

« Le sport : c’est une nécessité »

Entre son exploitation, les réunions qui s’enchaînent, les allers-retours à Paris, les courses et les temps en famille le week-end, Joël a mené de front ses engagements personnels et professionnels, malgré le stress et la pression, en accordant une place de choix à sa passion pour le sport. « J’avais une vie trépidante. Ma famille et mes collègues me demandaient tous comment je faisais pour tenir un tel emploi du temps. » À cela, Joël répon­dait avec assurance que « quand on veut vraiment quelque chose, on trouve le temps de le faire. C’était une nécessité, mon corps en avait besoin. D’ailleurs, si j’ai tenu aussi longtemps dans l’en­gagement professionnel, c’est grâce au sport ». Une nécessité physique, mais également mentale. « J’ai pris beau­coup de recul sur la vie, sur la souffrance. Courir me permettait de réduire considé­rablement le stress et m’a rendu service dans de nombreuses situations. Lors de réunions ou de négociations par exemple, je parvenais à rester calme et profession­nel ». D’ailleurs, c’est le sourire aux lèvres qu’il retourne quelques années en arrière. « Avant d’aller à la réunion de bureau de la FNSEA, je me levais à 5 h 30 pour aller monter les marches de Montmartre en courant plusieurs fois. Croyez-moi, quand j’arrivais à la réunion, j’étais en pleine forme ! ». Ce sportif de 62 ans aujourd’hui, énergique et loquace, ne perd pas le rythme : il continue de travailler au sein de son exploitation, à mi-temps retraite, mais trouve désor­mais le temps pour sa famille et pour le sport. Joël Limouzin vient d’achever le grand raid de l’Ultra Marin, 175 km en 30 heures, et prévoit de repartir à l’aventure en retentant la Diagonale des Fous en 2024.